- English
- Français
Quelles sont vos priorités pour ce mandat de trois ans auquel vous êtes élu ?
L'affaire Merah a été pour moi un traumatisme. J'avais connu une vague de violences antisémites pendant mon premier mandat (2001-2004) à la présidence du CRIF. À Toulouse et Montauban, il s'est agi d'un meurtre d'enfants juifs et de militaires, ce qui montre que l'antisémitisme n'est pas le problème des Juifs, mais le problème de la France.
En outre, on assiste à un regain d'antisémitisme en Europe qui se traduit par des violences, différentes selon qu'on parle de l'Europe occidentale ou de l'Europe orientale. Dans le premier cas, il s'agit d'actes commis par des jeunes issus de l'islam radical, en rébellion contre leur manque d'intégration sociale et qui trouvent chez les Juifs des boucs émissaires. Dans le second, en Hongrie, ou en Russie, on a affaire à une extrême-droite très musclée et xénophobe. Le tout alimenté par la crise.
En France, l'État fait son travail en matière de sécurité. Mais force est de constater que les violences augmentent. Je ne pense pas qu'on puisse mettre un policier ou des fils de fer barbelés devant chaque synagogue, chaque boucherie casher. Je crois en revanche que les caméras de sécurité sont relativement dissuasives. Mais, il faut surtout entamer tambour battant un immense effort d'éducation. Je voudrais que le CRIF soit un centre de gravité permettant de réfléchir et de faire des propositions concrètes sur le plan de l'éducation et de la sécurité. Nous devons trouver des outils pédagogiques pour sensibiliser parents, syndicats, magistrats, enfants à la tolérance, au respect des différences.
Quels changements comptez-vous apporter au CRIF ?
Le CRIF doit être capable de se remettre en cause, de s'ouvrir davantage à la société civile provenant tant du monde économique, qu'universitaire, scientifique ou administratif. C'est la raison pour laquelle je me propose d'en modifier les statuts pour permettre de coopter un certain nombre de personnalités juives et d'avoir un vivier plus fécond de futurs dirigeants communautaires.
Je souhaite vivement que le Consistoire Central, qui a également été à l'origine du CRIF en 1944, et qui représente une très grande partie de la communauté religieuse, revienne en son sein, quelque dix ans après l'avoir quitté pour différentes considérations personnelles. Je vais faire des efforts en ce sens, j'espère qu'il acceptera la main tendue. Nos relations sont amicales, mais je les souhaite plus étroites. L'unité fait la force dans les circonstances actuelles.
On a parfois taxé le CRIF de "deuxième ambassade d'Israël en France".
J'essaierai de faire évoluer cette opinion. Je considère que le CRIF est là pour défendre les Juifs en France, pas pour intervenir en toutes circonstances sur ce qui se passe en Israël. Certes, nous avons une solidarité totale avec Israël, mais ce n'est pas notre sujet. Notre sujet, c'est l'antisémitisme en France.
Le CRIF avec AFP