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Publié le 12 Février 2004

Les Études du CRIF

Pierre-André Taguieff, « Néo-pacifisme, nouvelle judéophobie et mythe du complot. De la « guerre juive » à l’ « agression américano-sioniste », Les Études du CRIF, numéro 1, juillet 2003, 36 pages.



Marc Knobel, « La Capjpo, une association pro palestinienne très engagée ? » Les Études du CRIF, numéro 2, septembre 2003, 36 pages.

Patrick Desbois et Levana Frenk « Opération 1005. Des techniques et des hommes au service de l’effacement des traces de la Shoah », Les Études du CRIF, numéro 3, 44 pages.

Les Études du CRIF, qui sont publiées sous l’égide de l’Observatoire des médias de l’institution, sont dirigées avec talent et efficacité par le chercheur Marc Knobel, accompagné par un remarquable comité éditorial. Les Etudes s’inscrivent peu à peu et avec bonheur dans le paysage médiatique français.

Ces études thématiques -qui se veulent un outil pédagogique- en sont à leur troisième parution depuis juillet 2003. Remarquablement présentés, agréablement illustrés, assortis de nombreuses notes, ces véritables dossiers sont d’indispensables outils de travail et de réflexion.

Le premier numéro, dû à la plume alerte et sans compromissions du philosophe Pierre-André Taguieff, auteur de l’ouvrage très remarqué « La nouvelle judéophobie »*, est précisément consacré à un sujet d’une actualité brûlante. Intitulée « Néo-pacifisme, nouvelle judéophobie et mythe du complot. De la « guerre juive » à l’ « agression américano sioniste », cette étude démonte avec brio les mécanismes pervers qui se sont sournoisement échafaudés dans notre pays pour dénigrer, sans fondement sérieux, tout à la fois les États-Unis et Israël, l’ « internationale juive » et le « sionisme », présenté comme la source de tous les maux de la planète. L’auteur met l’accent sur les dérives des organisations « pacifistes » et d’extrême gauche françaises et sur les innombrables dérapages sémantiques constatés lors de manifestations essentiellement « pro palestiniennes ». Avec courage et lucidité Pierre-André Taguieff dénonce la démission du monde devant les dictatures et la démonisation du judaïsme et d’Israël qui pourrait aboutir à une « chasse aux Juifs » dans la société française. Un affreux slogan, souvent entendu ces mois derniers résume ce phénomène inquiétant : « Mort aux Juifs. Vive la Palestine ».

La deuxième livraison des Études, due à la plume de Marc Knobel, s’intéresse au CAPJPO, une nébuleuse aussi mystérieuse que nocive. Sous le titre « La Capjpo, une association pro-palestinienne très engagée ? », nous est proposée une enquête sur la Coordination des Appels pour une Paix juste au Proche-Orient ». Un intitulé prometteur qui se révèle rapidement trompeur. Car sous la houlette de sa présidente, une ancienne journaliste de l’A.F.P., Olivia Zemor , la Capjpo, fondée en 2001, se révèle en réalité profondément anti-israélien et viscéralement pro palestinien. En bref, tous les torts sont du côté de l’État hébreu, tous les mérites vont aux palestiniens qui, seuls, semblent mériter la compassion et la compréhension agissante de la Coordination. Fait remarquable : de nombreux militants du Capjpo sont d’origine juive. Cela ne les empêche pas de prendre régulièrement pour cible le CRIF. Étrange organisation qui, sur son site Internet, n’hésite pas à proposer une interview exclusive d’Ahmed Saadat, secrétaire général du FPLP, pour qui la solution de deux États séparés, Israël et Palestine, est illusoire et que seule est réaliste la disparition à terme de l’État hébreu. Pourtant, dans ses statuts, la Coordination indique vouloir « contribuer à l’établissement d’une paix juste et durable entre les peuples palestinien et israélien, par l’intermédiaire, notamment de la création d’un État palestinien, à côté de l’État d’Israël » En réalité, sous couvert d’une objectivité souvent mise en défaut, la Capjpo s’avère, au fil des mois être un véritable groupe de pression, un lobby, au seul profit de la cause palestinienne. En témoigne le tissu relationnel constitué par les associations qui, régulièrement, se retrouvent dans les mêmes cortèges que la Capjpo parmi lesquelles la Confédération Paysanne, la fédération Internationale des Droits de l’Homme, la Jeunesse Communiste Révolutionnaire, Lutte Ouvrière, La LCR, la LDH, le MRAP, les Verts et…l’Union Française des Juifs pour la paix. Une nébuleuse anti-israélienne qui promeut le boycott commercial et sportif d’Israël et tire à boulets rouges sur l’État juif et sur ceux qui le soutiennent.

Dans un tout autre domaine, le n°3 des Études du CRIF est consacré à un personnage peu connu, Paul Blobel et à sa sinistre contribution au massacre du peuple juif par les nazis. Sous la signature du Père Patrick Desbois (secrétaire du Comité Episcopal des Evêques de France pour les relations avec le judaïsme) et de Levana Frenk (historienne), une enquête historique magistrale, intitulée « Opération 1005. Des techniques et des hommes au service de l’effacement des traces de la Shoah », nous livre les secrets des agissements terrifiants des unités mobiles de tuerie, les Einsatzgruppen. Parmi eux, Paul Blobel, chef du sous-commando 4a de l’Einsatzgruppe C déployé en Ukraine , l’un des 23 inculpés du procès n°9 du tribunal militaire de Nuremberg, qui fut condamné à mort et pendu à Landsberg, le 7 juin 1951. Serviteur zélé du Reich, Blobel, né en 1894 à Potsdam, issu d’un milieu modeste et qui se destinait au métier de charpentier maçon, orientera complètement sa vie en adhérant, en 1931, au parti national-socialiste avant de rejoindre, en 1932, la S.S. C’est alors qu’il se découvrit un penchant inné pour la criminalité. À travers le parcours de cet archétype du tueur nazi sans scrupule, responsable avéré de la mort de 60 000 personnes, c’est toute la tragédie du peuple juif d’Europe que retrace ce numéro 3 des Études. À la tête de l’Opération 1005 en mai 1942, Blobel sut mettre ses sinistres capacités au service de la « Solution finale » et d’une entreprise terrifiante de destruction massive de tout un peuple. Lances flammes et dynamite, fours élémentaires et bûchers géants, appareils broyeurs de matières solides, moulins à os, brigades des cendres et fosses gigantesques, furent les instruments meurtriers de l’entreprise de Blobel et de ses sbires dans leur volonté de détruire les Juifs et de faire disparaître toute trace de leurs forfaits.

*Pierre-André Taguieff. La nouvelle judéophobie. Éditions Mille et une nuits. 2002.

Jean-Pierre Allali