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Publié le 10 Septembre 2015

L'histoire de Louise, par Louise Attia (*)

Une histoire invraisemblable et pourtant vraie. À découvrir.

Une recension de  Jean-Pierre Allali
Louise, c'est Ourida Louise Attia, née le 2 avril 1939 à M'sila dans le département de Constantine, en Algérie. Fille de Moïse Attia dit Mouchy et d'Esther Bounan. Alors qu'elle est hospitalisée à Clamart, elle décide de rédiger ses mémoires. Ce qui nous vaut ce livre. Un livre de souvenirs qui fleure bon l'Algérie de papa où les Juifs, portaient la « djubba » et où les femmes arabes se déplaçaient en « cabcabes », des sabots de bois. On y retrouve les « blis-blis », pois chiches séchés, le pain « matloh », à la semoule et les « kanouns » du chabbat, « platas » de l'époque. Mais ce qui frappe, surtout, dans le récit de Louise, c'est la succession de malheurs qui ont marqué sa vie. On a peine à croire qu'une telle déveine puisse exister.
La petite Louise n'a que sept mois quand sa mère est emportée par une fière intestinale. Dès lors, elle sera confiée à une nourrice arabe, Fatima, puis à sa tante paternelle, Raymonde. En 1940, comme tous les Juifs d'Algérie, elle perd la nationalité française. Très vite, elle réalise que son père n'est pas très recommandable : « Mon père ne respecte rien ni personne, il profite sans vergogne de l'argent de ses parents décédés, oublieux de la peine qu'ils ont eu à bâtir leur fortune, et il est a terreur de ses frères et sœurs ». Pire, « Amateur de femmes, il a de nombreuses maîtresses ». Moïse Atlan, violent, n'hésite pas à corriger sa fille à la cravache à la moindre incartade.
En 1945, Louise est mise en pension chez une autre tante, Rosalie, à Alger. Là, elle devient le souffre douleur et la servante de la famille jusqu'en 1946 où la voilà à Djelfa, chez la tante Esther puis, à nouveau, à Alger. Là aussi, on en fait la petite bonne, l'esclave même, chargée de vider les pots de chambre et de s'occuper des chats. 
En 1947, Louise accompagne sa famille d'adoption à Marseille en vue d'un départ en Palestine. Mais comme elle attrape une gale tenace, l'alyah est annulée et tout le monde se retrouve à Paris. De retour à Alger Louise est à nouveau placée chez Rosalie : bonne à tout faire le matin, cireuse de chaussures l'après-midi.
1949. Mouchy, qui a été embauché comme mécanicien et gardien chez Citröen, part avec Louise pour Paris. Ils habitent le quartier de la Goutte d'Or, un hôtel de passes. Louise a dix ans, mais ne sait pratiquement ni lire ni écrire car elle n'a pas été scolarisée. Son père boit et joue au poker tandis qu'elle fait les poubelles. Souvent, Mouchy finit ses soirées en cellule de dégrisement au commissariat. En 1950, de peur de perdre la garde de son enfant, il la confie à une autre de ses sœurs, Fortunée. Littéralement trimbalée d'une parente à une autre et de foyers d'accueil en maisons d'enfants, Louis croisera un jour le Grand rabbin Kaplan qui lui trouvera un gîte à Neuilly.
La vie de Louise, on l'aura compris, ne sera jamais de tout repos. En 1959, elle épousera un coiffeur, Alfred Joseph Sarfati, de Bousaâda dont elle divorcera en 1995. Joseph Sarfati est mort en 2001. Il avait été opéré, quelques années avant, d'une tumeur au cerveau.
Un sympathique cahier iconographique illustre agréablement ce livre qui nous raconte une histoire invraisemblable et pourtant vraie. À découvrir.
Note:
(*) Éditions Glyphe. Avec la collaboration de Françoise Dachy. Juin 2015. 156 pages. 14 euros.
CRIF