Lu dans la presse
|
Publié le 5 Mai 2020

France - Les cybergendarmes ont ouvert 280 enquêtes liées au Covid

Redoublant d’ingéniosité, certains hackers prétendent vendre de la chloroquine en ligne.

Publié le 5 mai dans Le Figaro

Sur le front du numérique, la riposte s’organise. Selon un bilan porté à la connaissance du Figaro, les cybergendarmes ont ouvert 280 enquêtes dans le cadre d’infractions liées au Covid-19. Trois quarts d’entre elles sont au préjudice de particuliers, le reste cible des sociétés pour des préjudices se chiffrant parfois en millions d’euros. «Au début de la crise, il s’agissait surtout d’annonces illégales, d’hameçonnage pour récupérer des données personnelles via un faux courrier électronique ou encore d’escroqueries, détaille le colonel Éric Freyssinet, chef du pôle national de la lutte contre les cybermenaces. Depuis le week-end de Pâques, nous avons recensé une dizaine d’attaques visant des accès à distance que des entreprises et établissements de santé ont mis à disposition de leurs employés avec un simple identifiant et un mot de passe.»

Retranchés en général en Europe de l’Est, mais aussi en Iran et peut-être en Chine, les hackers assoiffés de bitcoins redoublent d’ingéniosité pour trouver la faille et paralyser à distance les systèmes. Selon une source informée, plus de 200 structures auraient été dans le collimateur de pirates du web. Une dizaine d’entre elles, parmi lesquels des Ehpad, des laboratoires mais aussi des centres hospitalo-universitaires, auraient été ainsi la cible d’une demande de rançon.

Installés au pôle judiciaire de la gendarmerie nationale, à Pontoise (Val-d’Oise), les enquêteurs du Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) ont établi une liste d’adresses IP potentiellement compromises. Les victimes, réelles ou supposées, ont été contactées. Diffusant des guides pratiques de prévention, des référents sûreté et des experts «N’tech» distillent aux professionnels du soin des recommandations visant à réduire le champ des vulnérabilités.

Sur le terrain, 5300 cybergendarmes, dont 300 particulièrement pointus, parmi lesquels figurent des enquêteurs habilités à naviguer sous pseudos, sont mobilisés contre les menaces qui planent sur le web depuis le début de l’épidémie. Par endroits, les investigations ont parfois permis de soulever de très gros lièvres.

70 sites frauduleux fermés

Ainsi, les gendarmes de la section de recherches de Strasbourg ont été à l’origine de la fermeture de pas moins de 70 sites frauduleux qui prétendaient vendre en ligne de la chloroquine. «L’enjeu, pour ces escrocs d’envergure et parfaitement organisés, était d’avoir un excellent référencement sur les moteurs de recherche et, quand un internaute tapait “chloroquine pas cher”, il tombait dessus sans coup férir», explique le colonel François Despres, patron de la SR de Strasbourg, qui a permis de mettre au jour 43.000 connexions en un temps record.

Sur ces plateformes, des cachets de chloroquine étaient proposés à 1 euro pièce tandis qu’une boîte de 30 comprimés coûte 4 euros en pharmacie. Il s’agissait en réalité d’arnaques visant à extorquer de l’argent à des personnes aveuglées par la peur que suscite la pandémie de coronavirus. Invoquant une «démarche aussi préventive que curative», le colonel Despres l’affirme: «Au nom d’un impératif de santé publique, il fallait supprimer sans attendre ces pages susceptibles de vendre des produits nocifs.»

Comme souvent dans ce genre de dossiers tentaculaires, les hébergeurs étaient retranchés à l’étranger pour brouiller les pistes.