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Publié le 16 décembre dans La Voix du Nord
Lorsqu’éclate la Seconde Guerre mondiale, la communauté juive, implantée à Boulogne-sur-Mer depuis le début du XIXe siècle, compte plus de 160 personnes. Si un certain nombre de familles quittent la ville avec l’exode, d’autres demeurent. Et, considérés comme traîtres potentiels du fait de la position stratégique de Boulogne dans le cadre de la bataille d’Angleterre, ils doivent être « évacués » de la zone côtière.
Les 16 et 17 décembre 1940, 54 personnes, âgées de 10 mois à 74 ans,sont arrêtées. Enfermées à la prison de l’Évêché, elles quittent Boulogne en train le 17 décembre 1940, et, après un voyage de trois jours et trois nuits, sont parquées à Troyes, d’où certaines s’échapperont. Ceux qui restent seront pris dans la rafle du 28 janvier 1944 et déportés à Auschwitz.
Sur les 162 juifs recensés à Boulogne au début du conflit, il n’a été possible de retrouver la trace que de 81 d’entre eux après guerre. Salomon Wertheimer et François Salomon sont décédés lors de l’invasion ; Sylvain Dardick et Jacques Berr sont eux morts pour faits de résistance – le premier au champ d’honneur sur le plateau du Revard, le second, déporté, à Mauthausen. Il est certain qu’ont également été assassinés à Auschwitz David Bloch, comptable aux Emballages métalliques, 70 ans, et sa sœur Félicité, 72 ans ; Louis Bloch, propriétaire de Paris-Modèles, 50 ans ; Joseph et Sol Eskénazy, marchands forains, 46 et 42 ans, et leur fille Sarah, 15 ans ; Moïse et Cécile Lévy-Haas, commerçants de 70 et 61 ans, et Céline Haas, sœur de Cécile, 55 ans ; Abraham Roumi, propriétaire de la Bonneterie parisienne rue Coquelin ; Maurice Weill-Netter, 65 ans, rabbin de Boulogne et son épouse Clémentine. L’on doit y ajouter Esther Cohen, épouse Pernitchi, 37 ans, et son fils Marcel, 7 ans, vraisemblablement tués également à Auschwitz, et Motil Katz, tailleur, 71 ans, mort lui en détention à Troyes.
Deux morts lors de l’invasion, un au champ d’honneur, 16 dans les camps de concentration. 19 victimes de la barbarie nazie. Un chiffre loin d’être exhaustif, puisqu’il n’a pas été possible de retrouver la trace de 62 personnes. Certains ayant quitté Boulogne avec l’exode, peut-être n’y sont-ils simplement pas revenus. Mais du fait que, à ce jour, « seuls » 4 millions de victimes aient pu être identifiées sur les 6 millions de morts estimés, sans doute les victimes boulonnaises sont-elles plus nombreuses (*).
(*) Doivent être également pris en compte six juifs natifs de Boulogne mais qui l’avaient quittée avant 1940 : Léa Alexandre, Henriette Bader, Lucien Dreyfus, Marcelle Dreyfus, André Lang et Léon Lévy.