Tribune
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Publié le 25 Janvier 2010

«Il faut sauver le processus de paix»

Israël s'inquiète pour la paix. Les jours, les semaines que nous vivons actuellement sont d'une grande importance pour notre région. Des signes inquiétants s’amoncellent. La reprise des tirs de roquettes de Gaza sur les citoyens du sud d'Israël, des attentats sporadiques en Cisjordanie sont autant de signaux d'alarme qui doivent nous inquiéter. L’histoire de notre région nous en enseigne la raison: le vide de négociations fait le plein de la violence.




Depuis la rupture unilatérale par l’Autorité palestinienne des négociations de paix avec l'ancien premier ministre Ehud Olmert et sa ministre des Affaires étrangères Tzipi Livni, l’Etat d’Israël est en droit de s'interroger sur la volonté réelle du président Mahmoud Abbas d'avancer vers la paix. Pourquoi les Palestiniens refusent-ils aujourd'hui de reprendre les négociations? Pourquoi laissent-ils passer occasion après occasion?



Avec l'entrée en fonction du nouveau gouvernement Netanyahou, la communauté internationale attendait qu'Israël agisse dans trois domaines, afin de favoriser la reprise du processus de paix.



Première attente: la volonté d'Israël de négocier sans délai ni préalable. Israël n'a plus rien à prouver. Notre premier ministre la proclamée des son élection. Et plus encore le 23 décembre dernier, lors de la conférence annuelle des ambassadeurs d'Israël dans le monde, devant tous les diplomates israéliens de haut rang, il déclarait que «la reprise des négociations est aujourd’hui l’objectif diplomatique numéro un d’Israël››.



Deuxième attente: Israël doit accepter le principe de deux États pour deux peuples. Benjamin Netanyahu l'a annoncé haut et fort, dès le mois de Juin 2009, lors de son discours fondateur à l’université Bar-Ilan: deux États-nations, juif et palestinien, vivant côte a côte, en paix et en sécurité. Il a appelé de ses voeux la création d'un État palestinien démilitarisé qui devra reconnaître la place d'Israël dans la région en tant qu'État juif: Une décision courageuse unanimement saluée dans le monde, y compris par la France.



- Troisième attente: Israël et la communauté internationale doivent soutenir l'Autorité palestinienne et agir pour améliorer la qualité de vie des Palestiniens. Il n'est pas -un-jour, pas un discours qui ne place Mahmoud Abbas au centre de l'avenir politique de la région. Il n'est pas un projet pour construire et améliorer les moyens de gouvernance de l'Autorité palestinienne qui ne soit soutenu par Israël, y-compris dans le domaine de la sécurité, Aujourd'hui près de 70% des postes de contrôle ont été supprimés et nous sommes témoins, en Cisjordanie, d'une croissance économique de 7 % en 2009, selon un rapport du FMI, l’une des plus fortes croissances au monde. Israël y a largement contribué aux cotés d'une communauté internationale fortement mobilisée. Alors que les Palestiniens négociaient jusqu’à présent sans pré-conditions, le gel des implantations qui jusqu'alors était un des sujets sur la table des négociations est subitement devenu une condition ã satisfaire avant toute reprise de celles-ci. Autrement dit un prétexte pour ne pas négocier avec le gouvernement en place. Pourtant, même ceci n'a pas dissuadé le gouvernement qui a annoncé ce qu’aucun de ses prédécesseurs n'avait jamais fait: un gel de la construction pour dix mois. De la part de la droite israélienne, il s'agit d'une décision dont il faut savoir apprécier l’importance historique.



Aujourd'hui, l’attitude des Palestiniens s'inscrit dans un refus systématique de toute initiative de paix. Un constat inquiétant qui contraint les Amis de la paix a douter de la volonté réelle des Palestiniens d'y parvenir. Pourquoi Mahmoud Abbas ne reprend-il pas les négociations? Ces démarches de la part d’Israël sont-elles insuffisantes ? Pourquoi la communauté internationale ne fait-elle pas pression sur l’Autorité palestinienne?



Le président Abbas a besoin du soutien des pays arabes, de l`Europe et des États-Unis pour affirmer son leadership. Mais l'avenir de la paix a aussi besoin d'un leadership courageux côté palestinien. Penser que la pression internationale sur Israël remplacerait des négociations honnêtes et responsables est un fantasme. Seuls des accords de paix négociés par les parties concernées ont perduré; nul ne pourra imposer des solutions venant de l’extérieur.
L’État d'Israël est inquiet pour la paix car nous savons que le terrorisme est la réponse à l'impasse de négociations de paix. Le dialogue est le seul remède à la violence. Aujourd'hui, les États-Unis, l'Égypte, la France agissent dans la région pour permettre la relance des pourparlers. Mais pour l'instant, le dialogue avec notre partenaire palestinien pour la paix est rompu. Nous avons tous des responsabilités à assumer. La communauté internationale l'a fait. Le monde arabe, lui, l'a-t-il fait? Israël répondra présent à toute initiative crédible de reprise du dialogue. Les Palestiniens seront-ils cette fois au rendez-vous ou poursuivront-ils le jeu dangereux de l'attentisme?



Daniel Shek, ambassadeur d’Israël en France (article publié dans la Croix du 25 janvier 2010)



Photo : D.R.