Tribune
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Publié le 10 Juin 2010

L'Iran isolé, par Pierre Rousselin

Pas plus que les précédentes, les sanctions qui viennent d'être adoptées par le Conseil de Sécurité de l'ONU ne vont arrêter le programme nucléaire iranien.




Si, pour être adoptée, la résolution a été privée des pénalités les plus sévères, ce train de mesures n'en est pas moins, selon Hillary Clinton, «le plus significatif» des quatre décidés depuis décembre 2006. Il l'est, d'un point de vue diplomatique, à plus d'un titre.



D'abord, parce qu'il met un terme à l'ouverture des États-Unis en direction de Téhéran et signe l'échec de la politique de la main tendue, adoptée par Barack Obama à son arrivée à la Maison-Blanche, il y a seize mois, et prolongée bien au-delà du délai initialement prévu.



Fragilisé par la présidentielle truquée d'il y a un an, le régime des mollahs n'a pas saisi l'opportunité qui lui était offerte. Six mois après avoir rejeté la proposition qui lui était faite d'exporter l'essentiel de son uranium faiblement enrichi pour qu'il soit traité à l'étranger, Téhéran a fait mine d'accepter une offre similaire, tout en se réservant le droit de continuer à enrichir du combustible qui pourrait être utilisé pour une bombe atomique. Malgré l'intervention favorable de la Turquie et du Brésil, une telle solution ne pouvait être acceptée.



La résolution 1929 est significative parce que deux grands pays émergents, la Turquie et le Brésil, ont voté contre. Ainsi se concrétise la volonté de ces puissances nouvelles d'imposer leur voix dans le monde, en se distinguant des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, Russie et Chine comprises.



Il faut y voir un changement spectaculaire et durable sur la scène internationale, qui peut aller au-delà de la question iranienne, mais aussi la possibilité pour Brasilia et Ankara de poursuivre eur tentative de médiation.



Concrètement, la résolution va se traduire par une pression accrue sur le régime et sur l'économie iranienne et par un isolement diplomatique du pays. Les sanctions de l'ONU ouvrent la voie à d'autres mesures plus pénalisantes en préparation aux États-Unis et dans l'Union européenne.



Elles ne constituent pas une panacée mais plutôt une politique par défaut, seule alternative disponible à une opération militaire qui aurait des conséquences incalculables.



(Article publié dans le Figaro du 10 juin 2010)



Photo : D.R.