Tribune
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Publié le 28 Décembre 2010

La vieille journaliste indigne, par Meïr Weintrater

Ce texte est publié dans la rubrique Tribunes Libres réservée aux commentaires issus de la presse. Les auteurs expriment ici leurs propres positions, qui ne sont pas inéluctablement celles du CRIF.




Helen Thomas est une dame, âgée de 90 ans, qui avait tout pour entrer dans l’histoire comme l’une des grandes figures du journalisme américain. Elle avait travaillé pendant 57 ans à l’agence United Press International (UPI), dont elle fut longtemps la représentante auprès de la Maison Blanche. Elle prenait une part active à toutes les conférences de presse présidentielles, posant des questions souvent impertinentes et toujours remarquées. Devenue une icône de la vie publique aux Etats-Unis, elle écrivait ces dernières années des billets pour la chaîne de journaux Hearst.



Et voilà qu’en juin 2010, Helen Thomas accorde une interview filmée à un site internet juif. Interrogée sur l’État d’Israël, elle déclare: «Qu’ils foutent le camp de Palestine». L’interviewer, interloqué, lui demande ce que doivent faire, selon elle, les Juifs vivant en Israël. Réponse: «Qu’ils rentrent chez eux, en Pologne, en Allemagne, ou en Amérique».



Scandale. Helen Thomas publie des excuses, mais cela ne suffit pas, et elle doit démissionner de ses fonctions à la chaîne Hearst.



L’affaire revient au premier plan de l’actualité quand Helen Thomas, qui est la fille de deux immigrants libanais chrétiens, prend la parole devant une association arabe américaine à Detroit. Et elle en remet une couche. Non, elle ne regrette rien. D’ailleurs, dit-elle, «le Congrès, la Maison Blanche, Hollywood et Wall Street sont la propriété des sionistes». C’était le 2 décembre 2010.



Nouveau scandale. L’université où Helen Thomas avait fait ses études annonce la suppression d’un prix annuel pour «la diversité dans les médias» qui portait son nom. Et là, montée au créneau de plusieurs associations arabes américaines, qui prennent la défense de la vieille dame. Avec pour effet que des propos évidemment racistes, où le mot «sioniste» sert de substitut commode au mot «juif», sont endossés par des organisations ayant pignon sur rue.



En d’autres termes, ce que nous avons connu en France sous le nom de «phénomène Dieudonné», les Américains le découvrent aujourd’hui grâce à Helen Thomas. Welcome to the Club.



Billet diffusé sur RCJ le 22 décembre 2010



Photo : D.R.