Wafa Sultan, psychologue syrienne exilée aux Etats-Unis a critiqué la religion musulmane sur Al-Jazira. Cela lui a valu des menaces et des articles injurieux. Sur Al Jazira (le 21 février 2006), elle évoque les attentats terroristes qui endeuillent l’Europe, l’Asie ou le Proche Orient : « Les Juifs ont derrière eux la tragédie de l’Holocauste et ont (néanmoins) obligé le monde à les respecter au moyen de leur savoir, nom de leur terreur ; (ils ont forcé le respect du monde) par leur travail. Nous n’avons pas vu un seul Juif se faire exploser dans un restaurant allemand. Nous n’avons pas vu un seul Juif protester en commettant des meurtres. Les musulmans ont transformé en décombres trois statues de Bouddha. Nous n’avons pas vu un seul bouddhiste incendier une ambassade. Seuls les musulmans défendent leurs croyances en brûlant des églises, en tuant, en détruisant des ambassades. Les musulmans doivent se demander ce qu’ils peuvent faire pour l’humanité avant d’exiger que l’humanité les respecte. »
Dans An Nahar, Saoud al-Mawla se demande si l’islam serait antisémite ? al-Mawla pense que « le Hamas, comme les autres organisations islamistes, affiche des théories racistes, qui viennent tout droit des mouvements nationalistes arabes ». « Un troisième événement donne toute l’ampleur de la confusion mentale, idéologico religieuse, chez les islamistes contemporains et montre à quel point cette attitude emprunte essentiellement au legs du nationalisme arabe le plus chauvin. Lors d’un symposium que nous avons organisé à Beyrouth, consacré aux fondamentalismes dans les religions, j’ai évoqué ces islamistes qui adoptent la mentalité étriquée du nationalisme et finissent par voir un héros en Saddam Hussein, refusent de considérer les revendications des Kurdes ou des Berbères, ou négligent les minorités religieuses, les percevant comme des non-Arabes ou non-musulmans, et par là même instruments de l’étranger. Je m’aidais des essais de Hassan Al-Banna [fondateur des Frères musulmans] et des premiers Frères musulmans, dans les années 1930. Au début de leur expérience politique, ils avaient la volonté de représenter la communauté nationale égyptienne dans toutes ses composantes, musulmans, coptes et mêmes juifs. J’ai montré qu’il y avait quantité de candidats chrétiens sur les listes électorales des Frères musulmans et que même les juifs égyptiens donnaient leur écot aux campagnes des Frères. Eh bien, les plus grands représentants du mouvement en Egypte se sont écriés que mes propos étaient une insulte contre Al-Banna, contre les Frères musulmans et contre l’islam lui-même, et me demandèrent de m’excuser, comme si j’avais commis un crime ! C’est un colloque de la mouvance islamiste libanaise à Beyrouth qui a fourni l’occasion d’un débat sincère : j’ai demandé aux présents, tous imams ou étudiants en sciences islamiques, quelles étaient les justifications théologiques pour employer l’expression “descendants des singes et des pourceaux”, retirant ainsi toute humanité à l’individu juif. Dans le débat est apparue la volonté consciente de la pensée islamique contemporaine d’ignorer l’autre, de crainte de se voir reprocher par les nationalistes un manque de fermeté ou un retrait devant la pression occidentale, sourcilleuse en matière d’antisémitisme… »
Marc Knobel
Le Courrier international, n° 809, pp. 36 – 46, 3 euros.