Tribune
|
Publié le 6 Mai 2008

Walid Joumblatt dénonce l'Etat parallèle formé par le Hezbollah au Liban avec l’aide de l’Iran

Walid Joumblatt, chef du Parti socialiste progressiste (PSP) et figure éminente de la majorité politique libanaise, réclame la destitution de l'officier responsable de la sécurité de l'aéroport de Beyrouth, Walid Choucair, ainsi que l'expulsion de l'ambassadeur de la République islamique d'Iran, Mohammed Reda Chibani, et l'interdiction des vols de la compagnie Iran Air, rapporte Le Monde, du 5 mai 2008.


M. Joumblatt fonde sa requête, formulée samedi 3 mai lors d'une conférence de presse, sur des documents officiels prouvant, selon lui, une implication possible du Hezbollah libanais dans des projets d'attentat à l'intérieur du pays. D'autres documents attestent de la construction par le Parti de Dieu d'un réseau de lignes téléphoniques parallèle au réseau officiel et couvrant plusieurs parties du territoire libanais.
C'est la seconde fois en l'espace de quelques jours que le dirigeant du PSP dénonce l'autonomie de fait et les infrastructures parallèles que le Hezbollah veut créer dans certaines zones du Liban. Une semaine plus tôt, le Parti de Dieu avait séquestré pendant cinq heures, à l'intérieur de la zone qu'il contrôle dans la banlieue sud de Beyrouth, le citoyen français Karim Pakzad, représentant du Parti socialiste français à l'Internationale socialiste. Le Hezbollah avait justifié cette séquestration et l'ensemble de ses mesures d'autogestion par la nécessité de protéger ses responsables et ses cadres contre la menace permanente pesant sur eux de la part d'Israël.
Les documents évoqués par M. Joumblatt et publiés samedi par le quotidien libanais Al-Nahar sont un échange de courrier daté du 30 avril entre le ministre de la défense, Elias Murr, et les services de renseignement de l'armée. Ils font état de la présence dans une zone contrôlée par le Hezbollah à proximité immédiate de l'aéroport de Beyrouth d'au moins une caméra de surveillance braquée sur la piste 17 de l'aéroport. Cette piste est réservée aux avions privés, aux hôtes officiels et aux hélicoptères militaires.
Le Hezbollah, qui est un allié de l'Iran et de la Syrie, a indiqué que la ou les caméras visaient à repérer d'éventuels cambrioleurs d'outils et de matériaux de construction destinés à l'une de ses associations sociales, le Jihad Al-Bina ("La lutte pour la construction"). Tout en accusant M. Joumblatt de collusion avec les Etats-Unis et Israël, le Parti de Dieu a tourné en dérision ses accusations, qualifiées de pur produit de « l'imagination » et des « cauchemars » de leur auteur.
Walid Joumblatt redoute que l'objectif soit d'épier l'arrivée de personnalités libanaises ou étrangères afin d'organiser leur assassinat ou leur enlèvement sur la route conduisant de l'aéroport à la capitale.
Les agendas des déplacements à l'intérieur du pays et à l'étranger de responsables de la majorité politique sont tenus secrets pour des raisons de sécurité.
« Nous savons que les régions interdites aux forces légales de sécurité (allusion aux bastions du Hezbollah) sont un grand réservoir de voitures piégées qui peuvent être envoyées à tout moment en n'importe quel lieu pour tuer des responsables politiques ou des officiers de la sécurité », a ajouté le chef du PSP.
M. Joumblatt craint également que les avions d'Iran Air ne servent à acheminer des fonds et des équipements militaires à l'intention du Hezbollah. Il a justifié sa demande d'expulsion de l'officier responsable de la sécurité de l'aéroport par le fait que ce dernier est, assure-t-il, complice du Hezbollah. Dès lors, a-t-il dit, tout le système de surveillance installé à l'aéroport avec l'aide de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) n'a plus aucun sens.
La justice a été saisie de l'ensemble des documents incriminés. Le gouvernement libanais devait examiner, lundi 5 mai, l'affaire des lignes téléphoniques du Hezbollah.