« Juif, et fier de l’être »

25 January 2017 | 143 vue(s)
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Antisémitisme

Découvrez mon discours prononcé lors de la plénière de clôture de la 11ème Convention nationale du Crif, le 14 novembre 2021, en présence du Premier ministre Jean Castex.

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Billet d'humeur par Marc Knobel

Souvenez-vous de cette scène ahurissante et dramatique. Nous étions le 11 janvier 2016, Benjamin Amsellem, un enseignant juif de Marseille, sort de son établissement scolaire. Il est alors attaqué en pleine rue, alors qu'il portait la kippa, par un adolescent furieux et hystérique, assassin en puissance x. Benjamin Amsellem s'en était sorti avec des blessures légères, parvenant à parer les coups furieux avec la Torah qu'il tenait à la main. L'agresseur, lycéen à l'époque, issu d'un milieu « classique et normal », ce Turc d'origine kurde, avait été appréhendé. Celui qui avait dit agir « au nom d'Allah » n'avait montré « aucun regret, si ce n'est celui de ne pas avoir tué sa victime », indiquait à l'époque une source proche de l'enquête. Il avait expliqué vouloir « planter les juifs et les policiers », qualifiés de « mécréants ».

Il avait été radicalisé par l’Internet, surfant sur des sites qui exploitent la crédulité et le mal être de ces adolescents, pour en faire des tueurs froids et sanguinaires. Parce que les djihadistes magnifient la guerre, la souffrance et la mort et sèment le chaos. Parce que Daech utilise avec une parfaite maîtrise les réseaux sociaux. Il s'agit là d'un puissant outil au service de leur cyberguerre et cette propagande haineuse fait donc le tour du Web. Le djihad numérique a devant lui de nombreux et terrifiants boulevards.

Terrifiant.

L'agresseur, lycéen à l'époque, devra bientôt répondre devant le tribunal pour enfants de tentative d'assassinat « en raison de la religion » et « en relation avec une entreprise terroriste », a précisé une source judiciaire à l’AFP. N'ayant pas encore 16 ans, à quelques jours près, lors de son passage à l'acte, il bénéficie automatiquement de l'excuse de minorité, et la peine maximale applicable - la perpétuité dans le cas d'un adulte -, est réduite à 20 ans.

Mais, en vérité, dans quel monde vit-on qu’il faille dans certains quartiers cacher sa kipa ?

Dans quel monde vit-on qu’il faille penser que l’on pourrait être agressé, parce que Juif dans une rue quelconque ?

Dans quel monde vit-on que certains voudraient que nous rasions les murs, que nous partions ou que nous mourrions ?

Dans quel monde vit-on qu’il faille regarder même derrière soi, de peur de se voir agresser ?

Dans quel monde vit-on de lire que l’on raille la Shoah ? Qui sont ces fous qui osent ainsi cracher sur nos tombes ?  

Dans quel monde vit-on que sur l’Internet, des torrents de boue diabolisent les Juifs ?

Dans quel monde vit-on qu’il faille tolérer les insultes, les moqueries, les railleries, les stéréotypes, les préjugés ici ou là ? Ne fut-ce qu'un seul?

Et dans quel monde vit-on que nous ne devrions protester et élever un cri ?

Dans quel monde vit-on que l’on devrait baisser la tête ? Baisser les yeux ?

Dans quel monde vit-on que l’on doive supporter cela ?

Je me souviens… Ma grand-mère, mère de mon père, hospitalisée, souffrante et vieille.

Alitée et souffrante, dans une chambre d’hôpital, perdant la tête, ne s’exprimant plus qu’en Yiddish. Sa voisine de chambre, agacée, lui disant …
« Vous ne pouvez pas vous taire, sale juive. »
Et ma grand-mère, cette vieille femme, de lui répondre, et en français cette fois, une des dernière fois de sa vie :
« Madame, juive je suis et fière de l’être, mais sale, c’est vous qui l’êtes ! »

Je me souviens aussi que sa grande fierté tout au long de sa vie était de s’exprimer en français, de lire le français et de vivre en harmonie avec ce/son pays, la France.

Plus jamais nous ne raserons les murs.