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Publié le 10 Janvier 2012

Non, le FN n'est pas un parti comme les autres

Hervé Gattegno, rédacteur en chef au "Point", intervient sur les ondes de RMC du lundi au vendredi à 8 h 20 pour sa chronique politique "Le parti pris". Il répond aux questions de son magazine à propos de Marine Le Pen :



À la question posée hier : "Le FN est-il un parti comme les autres ?", 74 % des auditeurs de RMC ont répondu oui. Vous ne partagez pas ce point de vue. Votre parti pris : Non, le FN n'est pas un parti comme les autres.



Si on entend par "comme les autres" un parti qui concourt normalement au jeu électoral, le FN est un parti comme les autres. Il ne réclame pas non plus, dans son programme, l'abolition de la démocratie représentative - alors qu'il est lui-même fort mal représenté (il n'a ni député ni sénateur). Donc on ne peut pas le qualifier d'antidémocratique. En revanche, le FN est un parti qui s'inscrit dans la lignée de l'extrême droite autoritaire, nationaliste et isolationniste, et dont le discours sur la "préférence nationale" jure très nettement avec nos principes républicains. De ce point de vue, le FN est différent, volontairement en marge du système politique traditionnel. C'est même ce qui fait son succès.



Précisez votre pensée : vous trouvez que les critiques contre Marine Le Pen contribuent à la faire progresser dans l'opinion ?



Il y a, dans l'ensemble, une présentation doublement faussée du FN - exagérément lénifiante sur ce qu'il est et démesurément alarmante sur la menace qu'il représente. C'est vrai que Marine Le Pen a réussi à substituer à l'image de l'extrême droite pétainiste et antisémite celle d'un parti populiste qui défend les Français les plus défavorisés. Derrière l'image, la réalité n'a pas beaucoup changé... D'un autre côté, et bien qu'elle soit très haut dans les sondages, il y a souvent une exagération de son audience réelle : c'était le cas dans la présentation du sondage paru hier dans Libération. Le texte disait que 30 % des Français n'excluent pas de voter FN... en incluant dans ce chiffre 12 % de sondés qui disaient qu'ils ne voteraient "probablement pas" pour lui. Au mieux, c'est une présentation erronée ; au pire, une manipulation.



C'est une façon de jouer à se faire peur ?



Oui... et non. Libération, qui fait clairement campagne pour François Hollande, a voulu exagérer le poids électoral du FN pour appeler au vote utile. C'est grossier, mais c'est un classique. La réalité, c'est que Marine Le Pen oscille entre 17 % et 20 % dans tous les sondages et que c'est déjà énorme : très au-dessus du score de son père en 2002 et plus que la plupart des partis d'extrême droite en Europe, où certains participent au gouvernement. Ce qui empêche le FN d'y arriver en France, c'est qu'il reste une large majorité qui lui est irrémédiablement hostile (68 % dans le sondage d'hier ; c'est peut-être ce chiffre-là qui méritait d'être souligné...). Dans une élection au scrutin majoritaire, il se trouve toujours une majorité contre lui. C'est ce qui explique qu'il n'ait pas d'élus au Parlement, très peu dans les départements, les régions et les grandes villes.



Est-ce que ça peut aussi expliquer que Marine Le Pen ait du mal à obtenir ses 500 signatures ?



Sans doute - même si je crois qu'elle les aura. N'en déplaise à Mme Le Pen, il est probable que l'UMP et les autres n'ont pas besoin d'exercer des pressions sur les élus locaux pour qu'ils hésitent à lui apporter leur parrainage. Ce qui fait peur aux petits élus, ce n'est pas que les partis sachent qu'ils signent pour Marine Le Pen, c'est que leurs électeurs l'apprennent - précisément parce que ses idées suscitent un rejet plus fort que celles des autres partis. C'est la limite de sa stratégie de marginalité volontaire. Avec cette conséquence, la plus frappante de toutes : des quatre candidats qui apparaissent capables d'être au second tour, elle est la seule qui n'a aucune chance d'être élue.



Photo (Hervé Gattegno): D.R.



Source : le Point



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