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Publié le 20 Août 2012

Comment Israël se prépare à une éventuelle attaque de l’Iran – interview de Frédéric Encel

Les relations entre Israël et l'Iran sont de plus en plus tendues. Comment Israël se prépare-il à une guerre contre l'Iran ? Israël prévoirait d'utiliser les sms pour prévenir d'éventuel bombardement. Quelles installations a prévues le pays en cas d'attaque de l'Iran ? 

je pense qu'Israël espère ne pas avoir à intervenir militairement

Frédéric Encel : Depuis au moins les années 1980, les Israéliens savent que leurs ennemis toucheront davantage l'arrière que le front stricto sensu, et qu'ils doivent faire face aux missiles. Le pays a connu sa première grande expérience en janvier et février 1991 avec les Scud irakiens. La seconde, c'était en 2006 avec les engins du Hezbollah libanais, et la troisième - plus limitée- en 2008-2009 avec ceux du Hamas palestinien à Gaza. Psychologiquement, les civils sont donc prêts à envisager de nouvelles offensives balistiques. Face à l'Iran, la crainte est tout de même plus grande de voir s'abattre des missiles plus puissants et mieux ciblés, sur Tel Aviv notamment. Après, pour ce qui concerne les installations protectrices, chaque quartier et chaque village est pourvu de nombreux miklatim, c'est à dire d'abris puissamment fortifiés. Les sirènes et la radio nationale jouent aussi un rôle important, et sans doute demain les SMS. De fait, tant en 1991 qu'au cours des attaques de missiles ultérieures, les pertes civiles avaient été extrêmement réduites.

 

Les déclarations d'Israël ne sont-elles pas seulement de la poudre aux yeux, de la communication pour faire peur à l'Iran ?

 

Dans toute montée d'une crise géopolitique, chaque protagoniste tente de bomber le torse afin de montrer sa détermination et, le cas échéant, ses capacités objectives. J'ignore si les déclarations musclées d'Israël relèvent de l'intox. Ce qu'on constate en tout cas, c'est la santé très chancelante des ingénieurs nucléaires iraniens ces derniers mois... Et la grande fragilité des installations informatiques face aux virus. En réalité, je pense qu'Israël espère ne pas avoir à intervenir militairement. Donc on assiste à la fois à des coups de gueule en guise de plan com' et à une vraie préparation à toute éventualité. De ce point de vue, la nomination de l'ancien chef des services de renseignement intérieurs, Avi Dichter, à la défense passive, est intéressante ; elle doit inspirer confiance à l'intérieur, et crainte à l'extérieur...

 

Comment peut-on expliquer cette montée de la violence alors que le conflit syrien semble polariser l'essentiel de l'action des médias ?

 

Je ne parlerai pas de montée de violence tant qu'aucun coup de feu n'a été tiré. Du reste, rappelons qu'en dépit de ses fréquentes invectives antisionistes et négationnistes, le pouvoir islamiste iranien n'a jamais agressé directement Israël et vice versa... Sur le fond, il est normal que les médias et les chancelleries se préoccupent prioritairement de la guerre civile en Syrie : plus de 20 000 morts en 18 mois, une tension internationale entre grandes puissances, des Etats fragiles ou très armés aux frontières, etc. Mais les deux dossiers se rejoignent à la marge, car Téhéran soutient à fond Damas dans sa répression. La Syrie est l'unique allié militaire de l'Iran.

 

La France aurait préparé un plan d'évacuation pour les ressortissants français vivants en Israël. Comment cela peut-il prendre forme ? Est-ce réellement possible ? Et combien cela va coûter ?

 

Que la France se préoccupe de ses ressortissants établis à l'étranger en bâtissant des plans d'évacuation, rien de plus normal. Y compris si des moyens navals ou aériens considérables doivent être engagés à des coûts élevés. Mais en l'occurrence, sauf éventuellement pour les personnels diplomatiques et certains autres nationaux, je n'imagine absolument pas d'évacuation de masse. La raison en est simple : pour l'essentiel, les Français installés en Israël le sont pour des raisons beaucoup plus idéologiques et/ou spirituelles que professionnelles. Autrement dit, ils décideront sans nul doute de demeurer aux côtés de leurs nouveaux compatriotes en cas d'attaque balistique iranienne. C'est en tout ca ce qui s'était produit les fois précédentes. Mais nous n'en sommes pas encore là. Tous les autres canaux que la confrontation militaire maximale n'ont sans doute pas été épuisés...

 

Propos recueillis par Charles Rassaert.

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