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Publié le 1 Septembre 2016

#Opinion - Terrorisme islamiste, après l'émotion, par Alain Bauer

Pour le criminologue, les attentats qui ont endeuillé la France cet été confirment et amplifient des évolutions perceptibles depuis des années.

On ne peut pas faire sérieusement de l'antiterrorisme avec la vieille culture du contre-espionnage

Publié dans le Figarovox le 1er septembre 2016
 
Les attentats qui ont endeuillé la France cet été confirment et amplifient des évolutions perceptibles depuis des années déjà, analyse le criminologue.
Voici plusieurs semaines déjà que les derniers attentats ont frappé la France. Ailleurs, à Aden, Alep, Syrte ou Mossoul, des actes terroristes ont lieu tous les jours. Utilisons donc cette accalmie en France pour analyser ce qui nous vise.
 
La multiplication des attentats à faibles moyens mais importantes répercussions (à Nice, Ansbach et Saint-Étienne-du-Rouvray) confirment tristement ce que tentent de faire comprendre depuis des mois tous ceux qui avaient analysé la transformation de l'hyperterrorisme en lumpenterrorisme, la diversification des profils, et l'impérieuse nécessité de modifier l'approche traditionnelle face aux évolutions des terrorismes.
 
Voici vingt ans, surpris par l'apparition de Khaled Kelkal, le premier hybride, criminel passé au terrorisme sans antécédents politiques préalables, la France subissait une série d'attentats dirigés par le GIA/GSPC algérien. Depuis, une multitude d'opérateurs terroristes aux profils variés défient régulièrement les services de renseignements, mais aussi les forces de sécurité de voie publique.
 
On trouve pêle-mêle et souvent en même temps des «agents» envoyés par le siège, des «agents» reconnus par le centre mais très autonomes et des «opérateurs» spontanés et inconnus, aux actes plus ou moins revendiqués par les organisations terroristes en fonction de leur humeur et du moment. Existent aussi quelques cas entre-deux où l'État islamique, al-Qaida ou al-Nosra se félicitent que «Dieu l'ait permis» ou «l'ait voulu».
 
Cette diversité et ces difficultés de compréhension et d'analyse, auxquels on peut ajouter les problématiques posées par quelques rares véritables loups solitaires (Kaczynski aux États-Unis, Breivik en Norvège, Micah Johnson à Dallas), n'excusent pas les erreurs ou les fautes des services publics.
 
En matière de renseignement, les défaillances ont été depuis longtemps détaillées. On ne peut pas faire sérieusement de l'antiterrorisme (temps court et partage) avec la culture du contre-espionnage (temps long et secret). La compilation massive de données ne remplace pas l'analyse, elle la noie. Depuis 1995, les services savaient beaucoup et comprenaient peu. La commission d'enquête américaine sur le 11 Septembre l'a amplement démontré. S'agissant de l'attentat de Nice, en revanche, le reproche n'est pour l'instant pas recevable... Lire l'intégralité.