Le spectateur, c’est un fait, ne voit pas le temps passer et Coco Bensoussan (Gad Elmaleh) en Juif d’Afrique du Nord, qui a parfaitement réussi, du moins dans les affaires, est époustouflant. Génial inventeur de l’eau frétillante qui vient s’insérer dans le commerce des boissons entre l’eau plate et la pétillante, Coco est riche, milliardaire même. Son chauffeur, Maurice dit Mimo (Daniel Cohen), qui, autrefois lui sauva la vie, est tout à sa dévotion bien qu’il évite de « sourire devant les flashes » en conduisant. Max (Ary Abittan), son chef de projet, a inventé la kippa du siècle, la « kippacabana » qui sera tirée à 4000 exemplaires. 4000, c’est le nombre de personnes que Coco compte inviter pour la bar-mitzwah de son fils Samuel (Nicolas Jouxtel), une bar-mitzvah dont la terre entière va garder le souvenir : elle se déroulera au Stade de France et Coco promet, à cette occasion, d’ « éclater » tout le monde. Éclater, voilà le maître mot de ce parvenu mythomane qui, dans sa folie des grandeurs ne voit pas que sa femme, Agathe (Pascale Arbillot), catholique convertie au judaïsme (probablement chez les Libéraux si l’on en croît l’apparition du rabbin Daniel Farhi dans la synagogue où se déroule la cérémonie) et ses enfants s’éloignent peu à peu de lui. Pour obtenir la « fériatisation » du jour de la bar-mitswah, afin que les invités soient libérés de toute obligation, Coco s’arrange avec le préfet (Jacques Spiesser) qui est prêt à tout devant les prodigalités d’un généreux donateur. L’important, c’est que « tout le gratin dauphinois vienne pour la fête ».
Samuel, lui, bien qu’habillé par le meilleur tailleur de la ville (Enrico Macias), n’a pas très envie de cette bar-mitzwah spectacle. Il préfère s’adonner à sa passion, le patinage sur glace. Hélas, son père ne vient jamais assister à ses entraînements. Les choses se compliquent quand le cardiologue (Gérard Depardieu) qui suit Coco lui annonce une mauvaise nouvelle. Dès lors, Coco va peu à peu s’humaniser, ce qui nous vaut une fin de film plus tendre et plus émouvante.
Très sympa, donc, mais on est en droit de se poser des questions quant à ce type de film qui met en avant toute une communauté, ici la communauté juive. Dans un tout autre domaine, un film sorti à la même époque, « Le premier cercle », de Laurent Tuel avec, notamment, Jean Reno, entraîne aussi une réflexion du même type. Le film s’ouvre sur des images d’archives du génocide des Arméniens en 1915 et une voix off nous tient à peu près ce discours : « Certains rescapés de ce génocide ont chois la France. Il y en a qui ont bien tourné et d’autres qui sont devenus des bandits. Voici l’histoire de Milo Malakian, un gangster d’origine arménienne… ». Etait-il nécessaire de rappeler le génocide en début de film ?
Pour en revenir à Coco, on sait combien, dans le mental de certains, le Juif est associé à l’argent. C’est cette conception abjecte et qui ne repose sur aucune réalité -il y a, dans notre pays et ailleurs, bien plus de Juifs pauvres que de Juifs riches- qui a entraîné les dérives et les drames que l’on sait, dont la tragédie d’Ilan Halimi, assassiné par le gang des « Barbares » de Fofana au motif fallacieux que sa famille, juive, pouvait, par définition, payer une importante rançon.
Danger donc. Néanmoins, en l’occurrence, nous choisirons d’être optimistes et de considérer qu’il vaut mieux retenir le bon côté de cette comédie. Tout en restant très vigilants.
Jean-Pierre Allali
(*) 1h35. De Gad Elmaleh avec Gad Elmaleh, Pascale Arbillot, Léane Grimaud, Daniel Cohen, Manu Payet, Jean Benguigui, Noémie Lvovsky, Gérard Depardieu, Enrico Macias, Ary Abittan, Gladys Cohen, Jacques Spiesser, Nicolas Jouxtel