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Publié le 22 Mars 2011

Histoire de l’Alliance Israélite Universelle de 1860 à nos jours, sous la direction d’André Kaspi (*)

L’Alliance Israélite Universelle a fêté en 2010 ses 150 ans d’existence. L’imposant travail collectif qui nous est proposé retrace l’histoire extraordinaire d’une vieille dame toujours alerte et qui a su, au cours des décennies, épouser harmonieusement les problématique des époques qu’elle a traversé.




Si tout commence en 1860, il faut remonter à 1840 pour comprendre les motivations de ceux qui seront à l’origine de la création de l’Alliance. 1840, en effet, c’est l’année de la sombre affaire dite « de Damas ». Un moine capucin, le père Thomas, disparaît mystérieusement dans la capitale syrienne. Très vite, on accuse la communauté juive de crime rituel. L’affaire met en émoi la communauté juive et les chancelleries. Dix-huit ans plus tard, à Bologne, en Italie, c’est l’affaire Mortara, un jeune Juif converti au catholicisme par sa servante et littéralement kidnappé par la gendarmerie pontificale. Là encore, le judaïsme mondial est en émoi. Et c’est pour lutter contre le sort fait à leurs coreligionnaires comme on a pu le constater à Damas et à Bologne, que six personnalités juives parisiennes se réunissent en 1860 afin de créer une organisation dont l’objectif initial était de défendre les Juifs partout où ils étaient opprimés. Ainsi naquit l’A.I.U. Les pères fondateurs avaient pour noms Isidore Cahen, journaliste, Élie-Aristide Astruc, rabbin, Eugène Manuel, professeur, Narcisse Leven, avocat, Charles Netter, négociant et Jules Carvallo, ingénieur.



Au fil des ans, l’Alliance va développer un réseau scolaire étendu. Elle se développe en Afrique du Nord comme au Moyen-Orient, notamment en Tunisie, au Maroc, en Iran et en Turquie, formant des générations de jeunes gens et de jeunes filles dans les domaines les plus divers sur fond de culture et de langue française.



Cent cinquante ans plus tard, qu’en est-il de l’A.I.U. ? Dans sa contribution intitulée « Vers une nouvelle Alliance », Sophie Enos-Attali nous décrit une institution vivace en quête d’un nouveau souffle. L’Alliance, désormais, est implantée essentiellement en France, mais aussi en Israël, à Casablanca au Maroc, à Genève, en Suisse et au Canada. On compte également des écoles affiliées à Bruxelles et en Espagne. Sous la direction de Jean-Claude Kuperminc, une bibliothèque tout à la fois patrimoniale et scientifique propose au public, sur huit étages, quelque 130 000 volumes, 3000 titres de périodiques, un millier de manuscrits, 20 000 photographies et plus d’un million de pièces d’archives.



C’est un fait : l’histoire de l’Alliance appartient pleinement à la fois à celle de la France comme à celle du peuple juif.



De nombreuses illustrations, une riche bibliographie et de précieux documents comme la liste de tous les membres du comité central depuis 1860, agrémentent cet ouvrage de référence qui fait désormais autorité pour le sujet. Un très beau livre.



Jean-Pierre Allali



(*) Éditions Armand Colin. Mars 2010. 576 pages. 35 euros. Coordination Valérie Assan. Contributions de M. Abitbol, E.C. Black, A. Danan, S. Enos-Attali, A. Grynberg, L. Hobson-Faure, G. Kauffman, D. Kevonian, J.C. Kuperminc, J. Laloum, Ph. E. Landau, M.M. Laskier, J. Lehr, F. Malino, A. Michel, C. Mouradian, C. Nicault, A. Rodrigue, S. Schwarzfuchs, P. Simon-Nahum et G. Weill.



Photo : D.R.