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Publié le 4 Décembre 2008

La vérité, ma mère. Les aventures de Supfermann Par Olivier Ranson (*)

Le dessinateur Olivier Ranson, bien connu au sein de la communauté juive, nous offre, avec ce nouvel album, une occasion de rire et de réfléchir.


Alter ego juif du célèbre Superman, voici Supfermann, qui, comme son nom l’indique est, « oy weis mir ! », un Juif ashkénaze pur sucre.
Il était une fois, très loin dans le ciel, à des milliers d’années-lumières de notre galaxie une petite planète appelée Chelm. Chelm, oui, tout-à-fait, comme la fameuse ville de Pologne. Une pire « couenssidence » !
Et voilà qu’on apprend que le soleil de cette mini-planète agonise, se meurt. Que faire ? Comment conjurer le sort et prévenir la catastrophe. Le Conseil rabbinique se réunit. Des personnages, hauts en couleur (surtout du noir) et en schtreimels, à la barbichette aussi longue que leur expérience supposée, discutent à l’infini : faut-il exclure les non-religieux responsables supposés du courroux divin ? Ou alors organiser une quête ? Ou un colloque ? Une pétition, une commission ou peut-être avancer l’heure de la prière matinale ?
Un laïc qui passait par là, juste pour réclamer une facture impayée, le fourreur Jakob Supfermann, a tout entendu. Il est atterré. Si c’est la fin du monde, c’est la fin de son commerce ! « Oy weis mir ! ». Et comment on va faire pour solder la marchandise en stock ! Et comment payer les études de son fils chéri Yossel, études de médecine, bien sir, oh pardon, d’avocat, « ji veux dire » ?
Comme il faut toujours, en pareil cas consulter sa douce moitié, l’imposante Rachel, Jakob finit par avouer à sa femme qu’il a pris ses précautions et construit en secret une petite fusée intergalactique à pilotage automatique programmé pour un voyage en direction de…la planète Terre.
Et c’est ainsi que Yossel et sa « mamon », laissant Jakob régler les affaires courantes s’embarquent pour le grand saut interplanétaire.
A l’arrivée, mouvementée, Yossel découvre qu’il possède des pouvoirs, celui de voler
(comme un oiseau pas comme un malfrat, « bien sir ») et, du Pôle Nord où il a atterri il ne lui faut que quelques secondes pour se retrouver…au Sentier, chez David Winstein où les choses ont bien changé : les Sépharades sont majoritaires, les commis sont des Hindous et des Africains et le seul Ashkénaze qu’on trouve encore dans le quartier, c’est le Rabbi de Loubavitch. Et encore, en photo seulement. « Oy weis mir ! »
Un sympathique Juif d’Afrique du Nord, bronzé, chauve avec queue de cheval et Maguen David bien apparente à côté de son « Haï » lui fourgue un invendu, un justaucorps bleu en synthétique agrémenté d’une cape rouge. Sur la poitrine une étoile de David avec un grand « S », « S » pour « Super Soldes au Sentier ».
Et c’est parti pour des aventures désopilantes. « Je vais devenir un justicier ! Je vais combattre l’injustice et l’oppression qui règnent sur cette planète ! Je traquerai tous les criminels et je consolerai les affligés » clame Supfermann devant sa mère affligée que seul intéresse le stock de manteaux de « fourrire » découverts dans leur igloo aménagé du Pôle Nord.
Face à Maurice et à Samy Bijaoui, à Sidney Farniente et à tous leurs clones séfarades, Supferschmok, pardon Supfermann aura fort à faire d’autant plus que Batmamane, le héros 100% sépharade fait son apparition, « sur la vie de ma mère ! ».
Du Palais de l’Elysée au désert proche-oriental avec Ben Laden, on se fend la pêche. On reste un peu sur sa faim à la fin et on attend la suite. Hilarant.
Jean-Pierre Allali
(*) Couleurs d’E. Pinchon, Enzo Grigoli, Michall. Editions Hugo BD. 2008. 66 pages grand format. 12, 95 euros.