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Publié le 28 Mai 2004

Les Enfants de la République Y a t il un bon usage des communautés ?(*)

Il faut être reconnaissant à l’UEJF et à son dynamique président, Yonathan Arfi de la publication d’un ensemble de points de vue sur la lancinante question du « communautarisme ».



Nous, Juifs de France, estime en préambule Yonathan Arfi, sommes les « Fils d’Abraham et de Marianne ». C’est pourquoi « nous avons reçu l’extraordinaire secret de la synthèse judéo-républicaine ». Et de préciser, d’emblée : le communautarisme est en fait un « faux concept », un « mot galvaudé, un leurre ». Même avis chez Pierre-André Taguieff : « Le « communautarisme » est « une fausse idée claire », « un terme indistinct à bords flous », un « terme polémique » dont l’usage est « essentiellement polémique ». Pour Dominique Sopo, président de SOS-Racisme, « Le communautarisme serait cette identification à un regroupement communautaire poussé à l’excès, cherchant ainsi la rupture ».

Une distinction s’impose donc et tous les intervenants partagent le point de vue exprimé par Pierre-André Taguieff : Il faut opérer une « clarification sémantique préalable à une éventuelle construction conceptuelle ». Il convient, dès lors, de « désamalgamer « communautaire » et « communautarisme » ». Soyons clairs, cependant, pour admettre, toujours avec Taguieff que « la communauté n’est pas le « communautarisation », et une conception républicaine de la démocratie représentative n’implique nullement l’éradication des « communautés » ». Et d’ailleurs, dit Yonathan Arfi : « Il n’y aura pas, en France, de République sans communautés, ni de communautés sans République ».

Si cette opposition communauté-communautarisme avec les tentatives louables et souvent réussies de dénouer la confusion entre les deux concepts, constitue l’essentiel de l’ouvrage, d’autres thèmes sont traités, comme celui de la discrimination positive. Là, l’unisson des voix n’est pas au rendez-vous. Si Yonathan Arfi estime : « Nous envisageons avec effroi une société où chacun devrait afficher ses sensibilités pour prétendre à des droits » tandis que Dominique Sopo se dit opposé aux quotas ethniques, Amar Dib est « tenté d’y adhérer ». Yazid Sabeg, lui, va plus loin et, donnant en exemple l’expérience américaine de l’affirmative action, il propose de « privilégier à compétence égale ceux qui s’estiment lésés en raison de leur couleur de peau ou de leur patronyme ». Et d’ajouter : « S’il faut faire des expériences, en vertu du droit à l’expérimentation, faisons-les ! S’il faut faire des lois, votons-les ! S’il faut changer la Constitution, comme il fallut le faire pour la parité, changeons-là ! »

Israël, le conflit israélo-palestinien, l’islam, l’intégrisme islamiste, le MRAP, Tariq Ramadan, l’extrême droite… sont encore d’autres thèmes abordés avec fougue et conviction au fil des pages de ce très intéressant recueil. Bravo à l’UEJF.

Jean-Pierre Allali

(*) Publié sous l’égide de l’Union des Étudiants Juifs de France. Avec les contributions de Yonathan Arfi, Paul Bernard, Jean-Yves Camus, Amar Dib, Alain Finkielkraut, Natacha Polony, Yazid Sabeg, Dominique Schnapper, Dominique Sopo, Pierre-André Taguieff et Michel Wieviorka. Éditions de La Martinière, 288 pages, 18 € .