A lire, à voir, à écouter
|
Publié le 12 Avril 2006

Nissim Zvili. Israël : L’image et la réalité (*)

Tous les observateurs intéressés par les questions proche-orientales et tous les acteurs communautaires juifs en conviennent : pendant les trois années où il a représenté l’État d’Israël à Paris, Nissim Zvili a été un ambassadeur remarquable qui aura réussi, à un moment où la tension entre la France et l’État hébreu était perceptible, à arrondir les angles et à inverser la tendance. Et, selon les mots d’Elisabeth Schemla, à permettre « une mutation diplomatique spectaculaire » de façon à ouvrir « l’ère des intérêts partagés ».


C’est pourquoi la publication des articles que Nissim Zvili a écrits, ici et là, du temps de sa mission, dans des journaux de tous bords, est particulièrement bienvenue. Quatorze articles qui sont autant de documents parus dans Le Figaro (5), Le Monde (3), Libération (3), L’Express (1) et, pour ce qui est de la presse juive, L’Arche (1) et Tribune Juive (1).
Ces prises de positions sans fard et sans concession, avec la main de fer dans le gant de velours d’un diplomate aguerri, permettent de bien mettre en évidence les positions officielles d’Israël sur tous les grands sujets du moment.
Avec, en toile de fond, un principe, le parler vrai. Car, affirme Nissim Zvili, citant Charles Péguy : « Un demi-savoir est toujours un faux savoir… Les demi-vérités ne servent que les prêcheurs de haine et les bâtisseurs d’impasses. Le mensonge est destructeur…Au fil des ans, les raccourcis historiques sont devenus des autoroutes, les occultations ont masqué les faits et les mensonges se sont mués en vérités » (Le Figaro. 10-01-05).
Et des vérités vraies, en voici, au fil des pages de ce recueil exemplaire :
À propos du Hamas : « Prétendre que le Hamas est une organisation sociale, c’est se résoudre à laisser une génération supplémentaire de jeunes Palestiniens s’abreuver de haine, de désespoir et de violence…Aujourd’hui, l’Europe doit prendre ses responsabilités. Déclarer le Hamas organisation terroriste, c’est mettre fin à la duperie : c’est appeler un chat un chat » (Le Figaro. 02-09-03). Quatre ans après et alors que la communauté internationale se débat dans un dilemme délicat : comment aider les Palestiniens sans favoriser le Hamas désormais au pouvoir, ces propos n’ont pas pris une ride.
Sur la clôture de sécurité : « Le terrorisme n’a pas laissé à ceux qui veulent la paix d’autre choix que de construire une barrière pour la défendre ». « De quel droit, au nom de quelles certitudes, sur la foi de quelles informations juge-t-on l’attitude d’un pays démocratique, plus petit que la Bretagne, entouré d’États dont certains n’ont pas renoncé à le détruire ? » (Le Monde. 27-10-03).
Sur les Palestiniens : « La vérité est que pour faire la paix, il faut être deux, et qu’aujourd’hui Israël est seul à la vouloir mais n’a pas d’interlocuteur » (Le Figaro. 20-12-03). « De façon générale, Arafat entrave toute initiative allant dans le sens de la coexistence et de la paix » (Le Figaro. 17/18-07-04). « Ce que j’aime énormément chez Mahmoud Abbas, c’est son pragmatisme et son réalisme ». (L’Express. 07-02-05).
À propos du terrorisme et de l’islamisme : « Y aurait-il de bons terroristes et de mauvais terroristes ? Attention à la réponse. Car s’il y a terrorisme et terrorisme, c’est qu’il y a victimes et victimes… » (Libération. 26-03-04). « Il y a un culte de la mort sur lequel les islamistes font croître la haine et la violence ». (Libération. 07-02-05). « Unis contre Israël pour déstabiliser la région, l’Iran des ayatollahs et la Syrie d’inspiration baassiste, à première vue opposés, se servent du levier du Hezbollah pour maintenir la tension ». (Le Figaro. 27-04-05).
Sur Israël, enfin : « L’espoir réside dans le fait que la démocratie israélienne est solidement enracinée, elle est consubstantielle à la renaissance de l’État » (Libération. 07-02-05). « Israël doit évidemment rester un État juif sinon, il n’est pas nécessaire dans cette région. Il faut être clair là-dessus…On ne reviendra pas aux frontières de 1949. On ne peut pas ignorer la réalité du terrain. Évacuer 8000 Israéliens des territoires sera une épreuve pénible pour la société israélienne, et personne ne peut envisager qu’on puisse en évacuer 200 000. Il y aura donc des blocs d’implantations qui seront annexés à l’État d’Israël. On parle d’environ 4 à 6% du territoire de la Cisjordanie. Il y aura peut-être un échange… » (Tribune Juive. Mai 2005.).
Et, preuve que même les diplomates les plus avertis et les mieux informés ne sont pas des prophètes et peuvent se tromper, cette estimation, faite un an avant les élections palestiniennes : « Notre analyse dit que le Hamas arrivera à peu près à 30% » (Tribune Juive). On connaît, hélas, la suite et la réalité d’aujourd’hui.
Un document précieux à lire, à relire et à conserver.
Jean-Pierre Allali
(*) Dossier de presse. 2002-2005.Cité-Press. 50 pages. Préface d’Elisabeth Schemla.