Séducteur, David saura convaincre Jack et Marjorie de lui confier leur fille pour des sorties de plus en plus élaborées jusqu’à un voyage à Paris, le rêve de toute jeune fille anglaise de bonne famille.
En compagnie d’un couple d’amis, Danny (Dominic Cooper) et Helen (Rosamund Pike), Jenny, littéralement initiée par David, va connaître la vie facile des boîtes de nuit, des concerts mondains, des vêtements luxueux, des ventes aux enchères où les millions ne comptent pas et des demeures somptueuses dans les beaux quartiers. Jenny va faire l’admiration béate de ses congénères du lycée, telles Tina (Ellie Kendrick) et Hattie (Amanda Fairbank Hynes) , le désespoir de son petit copain Graham (Matthew Beard) et la stupéfaction de son professeur, Miss Stubbs (Olivia Williams) comme de la directrice de l’établissement qu’elle fréquente, Miss Walters (Emma Thompson). Adieu Oxford et… vive la vie.
Hélas, on s’en doute, il y a un hic. David n’est pas en réalité le généreux mécène, héritier d’une riche famille amoureux éperdu d’une jeune fille dont il pourrait être le père, mais dont il déclare haut et fort qu’il veut en faire son épouse. Son compère, son acolyte, plutôt, n’est pas non plus très recommandable. On découvre peu à peu qu’on a affaire à de véritables escrocs. David est en réalité un marchand de sommeil qui profite de la détresse d’émigrés noirs pour leur proposer des locations douteuses. À l’occasion, dans des maisons habitées par des personnes âgées, il n’hésite pas à dérober un tableau ou une gravure.
Et, pour couronner le tout, la malheureuse Jenny, découvre, incidemment en cherchant du feu dans une boîte à gants, que son amoureux est marié et père de famille. Elle fera d’ailleurs la connaissance de l’épouse, Sarah (Sally Hawkins), au demeurant sympathique et résignée.
Mais, le hic du hic, c’est que d’entrée de jeu, David Goldman se présente comme juif à la famille Miller. Si cela étonne Jack et Marjorie, ils s’y feront, se réjouissant par avance d’un beau mariage annoncé. Les enseignantes de Jenny, elles, par contre, nous gratifieront de belles tirades antisémites, témoins de l’atmosphère, en Grande-Bretagne, dans certains milieux, à cette époque.
L’histoire a beau être déclarée comme autobiographique, la connexion Juifs-Brigands ne manquera pas d’être faite par certains mauvais esprits. Et c’est cela qui gêne. Était-il nécessaire d’introduire la judéité de David d’autant plus qu’il n’est pas très regardant en matière de religion puisque sa première invitation proposée à Jenny est pour une sortie en boîte un vendredi soir ?
Les acteurs sont tous excellents avec une palme spéciale à Carey Mulligan, mais on ne saurait passer sous silence un petit malaise autour du personnage brillamment interprété, il faut le reconnaître, par Peter Sarsgaard.
Fort heureusement pour Jenny, elle fera amende honorable et reprendra le cours de sa vie de jeune fille interrompu par un beau rêve qui n’était finalement qu’un songe creux.
Aux réticences près sur le personnage de David, « Une éducation » est un très bon film.
Jean-Pierre Allali
(*) De Lone Scherfig. 1h35. Avec Carey Mulligan, Peter Sarsgaard, Alfred Molina, Dominic Cooper, Rosamund Pike, Emma Thompson, Olivia Williams, Cara Seymour, Sally Hawkins, Matthew Beard, Amanda Fairbank Hynes, Ellie Kendrick et Beth Rowley.