A lire, à voir, à écouter
|
Publié le 27 Septembre 2004

World Trade Center 47e étage Récit de Bruno Dellinger

Ce 11 septembre 2001 il se lève de bonne humeur, son emploi du temps est chargé et la journée s’annonce sous les meilleurs auspices. Lorsqu’il arrive à son bureau, du haut de son 47e étage du World Trade Center et comme il le fait le matin, Bruno Dellinger contemple le brun et le gris des immeubles de Manhattan en contrebas, tranchant sur le bleu immaculé du ciel. Jamais blasé et enfin serein, ce Français qui vivait à New York depuis plusieurs années, a fondé sa propre société. Il trouve que tout est « harmonieux » et « beau » et il éprouve un sentiment de fierté d’être ici présent. « Soudain, j’entends le vrombissement strident des réacteurs de l’appareil qui s’approche à toute allure de nous. Je ne comprends pas immédiatement. Je relève la tête de mon ordinateur et à peine ai-je le temps de regarder par les fenêtres qu’un impact d’une violence inouïe ébranle la bâtiment. Une seconde, deux secondes, l’onde de choc descend des étages supérieurs, la tour oscille très violemment, un tableau se renverse, une statuette en marbre vacille, mon fauteuil avance et recule sur ses roulettes. Trois secondes, derrière les fenêtres un déluge sans fin de morceaux d’avion, de poutrelles d’aluminium, de verre, de débris, de kérosène, de feu, des corps peut être, dégringolent devant nos yeux médusés. »



Il faudra des jours et des jours pour que Bruno Dellinger comprenne vraiment ce qu’il est advenu de New York en ce 11 septembre 2001. Ce jour ordinaire est devenu en l’espace de quelques secondes le ground zéro de l’horreur absolue. Et la description que fait Dellinger de l’horreur est saisissante, les pages qui s’offrent à nous donnent la chair de poule. Et si nous avions été là, qu’aurions nous fait ? « La vague frappe. Une détonation, un souffle immense, une déflagration, des débris sifflent autour de moi, un type hurle : Respirez à travers vos vestes ! » Il fait gris. Il fait noir. Bientôt, il fait une nuit totalement noire. Pas d’étoiles. Un dernier crissement de cendres. Puis je n’entends plus rien. Plus un seul bruit. Nuit totale et silence absolu. Je suis en suspens. Le monde a disparu, je suis mort. » Suis la descente aux enfers, l’homme seul blessé, comme un zombie, marche dans les rues désertes de New York, cherchant désespérément à joindre sa famille. Puis vinrent les larmes, les pleurs, la souffrance, la peur et la terreur. Dellinger se sent vulnérable, l’ennemi rode. Mais où est-il ? Que prépare-t-il ? A quel moment New York sera-t-il une énième fois frappée et pourquoi ? « L’ennemi est invisible, il semble surpuissant car il se tait. Il a montré de quoi il est capable, il ne parle plus. »

En quelques pages, c’est une Amérique blessée et vidée que l’on voit défiler sous nos yeux. Mais une Amérique qui relève aussitôt le défi, qui applaudit ses héros, les pompiers, les policiers, les médecins, et c’est tout un chacun qui fait front. Un élan de patriotisme submerge la ville, une grande chaîne de solidarité se forme et permet peu à peu de reconstruire ce qui a été détruit. Dellinger rencontrera de grandes difficultés mais et à sa manière, il vaincra.

Reste que ce 11 septembre n’est pas une date ordinaire, ce 11 septembre a changé la face du monde.

Marc Knobel

World Trade Center 47e étage. Récit de Bruno Dellinger, Editions Robert Laffont, Paris, 2002, réédition J’ai Lu, 2004.