Après le récit il y a quelques années des frasques du prince Harry, le tabloïd britannique "The Sun", a de nouveau jeté le trouble en Grande-Bretagne. Sur ses unes papier et numérique du samedi 18 juillet dernier ce sont des images inédites montrant la reine Elisabeth, sa sœur Margaret, et leur mère en train d'effectuer le salut nazi, sous les encouragements de leur oncle Edward VIII, alors futur roi, qui s'étalent. Edward VIII qui imitera le geste quelques instants plus tard. Le retentissement est immédiat, à Buckingham bien sûr, mais également parmi une large partie de la population toujours très attachée à cet emblème qu'est la famille royale.
Ainsi que le souligne le quotidien dont la déontologie est souvent critiquée, les deux princesses, encore dans l'âge tendre (Elisabeth avait alors 6 ou 7 ans), ne pouvaient évidemment pas mesurer le symbole du geste. Pour leur oncle, il en est tout autrement. Sa sympathie pour le régime nazi n'a jamais été un secret. Le débat existe pourtant au Royaume-Uni : dans ce film tourné en 1933 ou 1934, Edward VIII avait-il conscience de l'horreur que soutenaient ces mains brandies ?
Des signes
Il est vrai qu'en 1934, l'indicible génocide orchestré par Hitler et ses sbires n'a pas encore eu lieu. Mais alors en plein réarmement, en violation du traité de Versailles, l'Allemagne devenue nazie a déjà fait montre de lugubres signes avant-coureurs. L'idéologie de son chef, contenue dans "Mein Kampf" rédigé en 1925, ne laisse aucun doute sur ses intentions. Hiérarchisation des races, volontés belligérantes, conquérantes… Le paradigme hostile est déjà bien connu, et avec chaque année qui s'écoule, Hitler apparait de plus en plus capable de parvenir à ses fins.
En 1933, il devient chancelier et dirige désormais seul l'Allemagne. La même année, le camp de Dachau est construit. Journalistes et écrivains français dénoncent immédiatement les dérives de l'Etat fasciste (Guillaume Ducher, "Les camps tragiques", 1934), mais ont un écho limité. Et si Edward VIII n'a peut-être pas connaissance de Dachau en 1934, la presse anglaise fait déjà écho de pogroms antisémites, d'autodafés et de la menace militaire grandissante. Il ne peut les ignorer.
Ce soutien à l'Allemagne semble tout d'abord dû à un anti-communisme farouche qui parcourt les membres de l'aristocratie à cette époque. Leur crainte de voir se déverser le bolchevisme en Europe et au Royaume-Uni supplante celle d'Hitler, qu'ils voient comme un rempart sur le continent face à l'influence stalinienne. Edward VIII n'est donc pas le seul à chanter les louanges de l'Allemagne fasciste et à souhaiter un partenariat avec elle. Selon l'historienne Karina Urbach, dont The Guardian publie une tribune, beaucoup pensaient, comme Edward, que "c'était la seule chose à faire"...
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