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Écrit par Eytan Giniewski alias Guinat et par son frère Paul, qui dirigea à Paris le journal sioniste « La Terre Retrouvée », ce livre, fortement autobiographique, à travers l'histoire d'un homme, des mémoires en somme, raconte aussi l'épopée d'une terre et d'un peuple : Israël.
On découvre les années de jeunesse à Vienne avec des descriptions touchantes des membres de la famille et déjà deux passions qui marqueront à jamais l'auteur : la science et le sionisme. « Ma chimie et ma fierté sioniste ont fait de moi un homme de science », reconnaît Eytan Giniewski.
La montée du nazisme et les bruits de botte inquiétants venus d'Allemagne vont bousculer une vie bourgeoise qui aurait pu être tranquille. « À 13ans, en 1933, l'année où Hitler arrivait au pouvoir, j'avais fait ma bar-mitsvah », se souvient Eytan Guinat. À Vienne et dans toute l'Autriche, l'antisémitisme devient une réalité. Prudent et lucide, Joseph Giniewski décide, en 1935, de quitter l'Autriche pour la Belgique. La petite famille vit désormais à Bruxelles. Avec le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, les Giniewski se retrouvent en porte à faux. Bien que juifs, ils sont considérés comme des ressortissants allemands. Otto Giniewski est interné au camp de Saint-Cyprien dans les Pyrénées orientales. Il finira par être libéré et, avec son père, rejoindra Toulouse où sa famille s'était repliée entre-temps. Le jeune homme décide de s'inscrire à l'université de Montpellier pour des études supérieures de physique-chimie. Parallèlement à ses études, il mène une intense activité sioniste et forme un groupe, un gdoud, disait-on alors. En juin 1942, avec ses amis, il fonde le MJS, Mouvement de la Jeunesse Sioniste. Puis c'est Grenoble, en mission du MJS pour y développer le gdoud local. C'est là qu'il va connaître celle qui deviendra son épouse, Lily Sytner. C'est le temps des planques , de la fabrication de faux papiers, du sauvetage des enfants avec l'OSE et des maquis avec les EIF. En janvier 1944, lorsqu'une section de la Police antijuive allemande s’installe à Grenoble, il faut fuir. Les Giniewski choisissent Montauban où naîtra leur fille Judith. Plus tard, à Jérusalem, en 1946, viendra au monde la cadette, Edna.
Après la Guerre et un bref passage à Paris où Eytan Giniewski ne manque pas d'agir en créant là aussi un gdoud, la famille n'a qu'un objectif : Eretz Israël. Le 15 juillet 1945, au départ de Naples, Eytan et les siens embarquent sur le Mataorah, un vieux bateau anglais. Il y a à bord des Anglais de l'Hanoar Hatsioni, des Français, anciens de la Résistance Juive et des « enfants de Buchenwald », particulièrement indisciplinés. Et, enfin, après une traversée éprouvante, Haïfa puis Atlith et le kibboutz de Degania. Très vite, Giniewski va mettre ses connaissances scientifiques au service du yichouv puis d'Israël, notamment au sein d'Hemed, l'unité scientifique de l'armée. Il combattra pour l'indépendance du pays, sera officier puis se lancera avec succès dans l'industrie, créant Hamechil puis Shamtan et ICT (Industries Chimiques et Technologies).
Et c'est enfin une retraite heureuse et active au « Village des Protées », non loin de Nétanya.
Des personnages qui marqueront la vie juive et israélienne au cours des ans et que l'auteur a côtoyés, traversent ce beau livre d'une sincérité émouvante : Dyka Jefroykin, Moulik Szejner, Dov Joseph, Jacques Lazarus, les rabbins René Kapel et Henri Schilli, Tony Gryn, Marianne Cohn, Mila Racine, les frères Jacques et Paul Roitman, Marc Jarblum, Robert Gamzon, Frédéric Hammel ou encore Ephraïm Katzir qui sera le quatrième Président de l'État d'Israël , Ezer Weizmann, futur septième Président d'Israël, David Ben Gourion, Shimon Peres, Golda Meyerson qui deviendra Golda Meïr et bien d'autres.
Fervent admirateur de Theodor Herzl, pas seulement celui de « L'État des Juifs », mais surtout celui des romans prémonitoires « Altneuland » et « L'auberge à l'alinine », Eytan Guinat considère que la plus belle de ses réussites est d'avoir choisi d'être israélien.
À l'image de son sympathique auteur, un beau livre, tout simplement bleu-blanc.
Note :
(*) Éditions du Tricorne. Genève. Préface de Michel Bloch. Février 2014. 208 pages.