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Ce dialogue n’a pas toujours été une évidence, il n’a pas toujours été aisé, il a bien failli échouer maintes fois et s’il a résisté aux assauts des vents qui auraient pu l’emporter sur des rivages d’où l’on ne revient pas, c’est précisément grâce à ceux et celles qui croient en la fraternité, à ceux qui se sont choisis comme amis ; Aristote dans son Ethique à Eudème écrivait « l’amitié en acte est un choix réciproque ». Depuis l’Institut de France, dont il est membre, et où eut lieu la remise du prix, Haïm Korsia a rappelé que « le concept de fraternité entre les religions est au cœur de la République ». Fraternité certes, mais sans syncrétisme et le Grand Rabbin l’a affirmé lundi soir « j’ai besoin que tu sois toi, pour que je sois moi » et sur ce long chemin de la connaissance de l’autre « seuls se félicitent d'être arrivés ceux qui se savent incapables d'aller plus loin ». (Amin Maalouf)
Et ils étaient tous là en ce début de semaine humide de novembre : l’archevêque de Paris, Mrg Ulrich, le Président de la Conférence des Evêques de France, Mgr de Moulins Beaufort, le Président de la Fédération protestante de France, le Pasteur Krieger, l’évêque vicaire de la Métropole orthodoxe roumaine, Mgr Marc Alric , le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, le Président du Consistoire Central, Elie Korchia, le directeur du Séminaire rabbinique, le Grand Rabbin Olivier Kaufmann le Vice-président de la Conférence des Rabbins européens, Moshé Lewin, le Président d’honneur du Crif, et lauréat du prix de l’AJCF en 2015, Richard Prasquier et bien entendu le Chancelier de l’Institut de France Xavier Darcos, dont chacun a pu mesurer la complicité amicale qui l’unit à Haïm Korsia.
Dans cette salle magnifique ornée de statues et de portraits des hommes qui ont fait le génie scientifique et artistique de la France, Xavier Darcos a salué cette soirée, même si a-t-il dit dans un trait d’humour : « Haïm Korsia n’a pas de prix, c’est donc un exercice à contre-emploi ». Il a rappelé l’idéal académique d’entretenir une véritable amitié, qui rassemble, qui renforce, à l’instar de celle de Charles Péguy et Jules Isaac et loué les qualités de l’Amitié judéo-chrétienne de France qui rejoignent cet idéal.
Le Président de l’Amitié judéo-chrétienne de France a en quelques mots bien défini le sens et l’importance du dialogue chez le Grand Rabbin de France : « Ce dialogue, vous le ressentez comme une nécessité qui vous vient de votre foi juive, car pour vous, « c’est le lien aux autres peuples qui fait l’essence du judaïsme » (Réinventer les aurores, p.64). La rencontre avec l’altérité est pour vous une ardente nécessité. Emmanuel Lévinas dit que « l’homme juif comprend le monde à partir d’autrui ». A sa suite, vous nous dites que la rencontre vous « pousse à penser l’autre comme un autre moi, c’est-à-dire porteur de désirs différents, mais pas moins dignes que les miens. » (Réinventer, p. 66). C’est une manière de définir la laïcité à laquelle vous êtes si attaché. La laïcité n’est pas un système de tolérance où l’on supporte l’autre tant bien que mal, mais un système de liberté, de connaissance mutuelle et de respect des uns par les autres, de respect des uns et des autres par les pouvoirs publics, un système où chacun apporte sa part pour faire société. »
Et c’est sous les regards ardents et éclairés de Voltaire, Lavoisier, Fénelon, Montesquieu, Turgot, Despréaux qu’à l’issue de son discours, le Président de l’AJCF a remis à Haïm Korsia le prix de l’Amitié judéo-chrétienne de France.
Illustration : Jean Dominique Durand (Président de l'AJCF) , Xavier Darcos (Chancelier de l'Institut), Pasteur Anne Marie Rejnen (Vice-présidente de l'AJCF)
Stéphanie Dassa, Directrice de projets au Crif, Membre du Comité directeur de l’Amitié judéo-chrétienne de France