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Publié le 20 octobre dans France Info
Il y a 81 ans, il a organisé ce qui est sans doute la plus vaste opération d’exfiltration de personnes menacées d’arrestation par les nazis, depuis Bordeaux en France. C’était en juin 1940, en pleine débâcle face à l’armée allemande, Aristides de Sousa Mendes avait 55 ans, il était consul du Portugal à Bordeaux. Et du 17 au 24 juin, il a délivré environ 30 000 visas, dont 10 000 pour des citoyens de confession juive, pour leur permettre de quitter la France et rejoindre légalement Lisbonne, dernier port d’Europe assurant encore la liaison vers les Amériques.
Le diplomate, Juste parmi les nations, a commencé à délivrer les sauf-conduits au consulat du Portugal, à Bordeaux. Avant de devoir se replier et poursuivre son œuvre à Bayonne, puis sur le chemin vers Hendaye et la frontière.
Les jours précédents, le dictateur Salazar avait pourtant donné instruction à ses consuls et ambassadeurs de restreindre les visas, de les refuser aux apatrides, aux Russes, aux Juifs expulsés de leur pays d’origine, ou encore aux opposants politiques de toutes nationalités. Mais après plusieurs jours à regarder des familles entières se serrer sous les fenêtres de son consulat, Aristides de Sousa Mendes décide de faire entrer tout le monde. Hommes, femmes et enfants, artistes, intellectuels, religieux se tassent dans les couloirs du bâtiment, dormant sur des chaises ou à même le plancher, et sans manger, par peur de perdre leur place dans la queue.
Un consul mis à pied puis tombé dans l'oubli
Mais le 24 juin, le nombre de réfugiés franchissant la frontière franco-espagnole en direction du Portugal est si important, que le consul est convoqué, démis de ses fonctions, traduit en conseil de discipline pour désobéissance et falsification de passeport, puis mis à pied. Placardisé. Aristides de Sousa Mendes meurt en 1954, à Lisbonne. Et son histoire tombe dans l’oubli.
Douze ans plus tard, en 1966, le Mémorial de Yad Vashem l’honore du titre de Juste parmi les nations. Et au Portugal, il a fallu attendre 1986 pour qu’il soit décoré de l’ordre de la Liberté.
Pourquoi tant de temps ? Parce que Salazar a voulu effacer la mémoire de Sousa Mendes, et qu’ensuite, après la chute du régime, Sousa Medes a payé le fait qu’avant 1940, il était de ceux qui avaient soutenu la dictature militaire. C’est toute la complexité d’une vie : croire au changement, puis déchanter, et enfin désobéir. Mardi matin, au Panthéon, c’est donc aussi ce chemin, cette résistance que le Portugal a honoré, et devant les descendants des réfugiés sauvés, le président Marcelo Rebelo a déclaré : "Le pays s’incline devant la personnalité morale d’Aristides Sousa Mende". Autrement dit, devant le choix de la désobéissance.
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