Jean-Pierre Allali
Mémoire des possibles : Itinéraire d’une famille Tune, par Stéphane Attal (*)
Juif d’origine tunisienne, Stéphane Attal est un communicant spécialisé dans le conseil aux entreprises et aux personnalités. Dans cet ouvrage agréablement illustré, il retrace l’itinéraire de sa propre famille. À propos, « Portugais », c’est un nom juif, çà ? Eh bien si l’on en croît Claude Mezrahi, spécialiste de l’onomastique juive, la réponse est « oui ». Et il précise que lorsque les Juifs furent expulsés des pays de la péninsule ibérique, beaucoup se rendirent dans les pays d’Afrique du Nord et, notamment en Tunisie. Comme les premiers arrivés venaient plutôt de Lusitanie au Portugal, la dénomination de « portugais », en arabe « Portekiche » leur fut attribuée. « Portugais » ? Mais quel rapport avec notre sujet, allez-vous dire. Eh bien tout simplement c’était là le patronyme de l’arrière-grand-mère de l’auteur. Et cette madame Portugais a marié ses deux filles le même jour ! L’aînée Tita, épouse Albert Ouaki, un commerçant. Marie, la cadette s’unit, elle, à Félix Uzan, un légionnaire, le grand-père de Stéphane.
En guise de dot, les deux hommes obtiennent la gestion d’un café à La Goulette, une station balnéaire des environs de Tunis. Dans la pratique, c’est Félix qui s’en occupera. Albert, lui, court par monts et par vaux pour proposer ses trousseaux. Tita va donner naissance à Jules, aîné de ses neuf enfants, une future célébrité qui créera la fameuse enseigne Tati et auquel un chapitre du livre est consacré (Tonton, ce génie !). Marie, de son côté aura pour enfants Germaine, Suzette, Teddy, Hector et Viviane, la mère de l’auteur.
Peu avant la Guerre, Félix embarque sa famille pour Paris. Il sera serveur de nuit chez Chartier pendant que Marie devient marchande des quatre saisons.
Entre Tunis et Paris, on suit la saga d’une famille juive tunisienne avec ses hauts et ses bas. Pour les plus jeunes, c’est l’époque de la révolution yé-yé, des Rolling Stones, des vacances dans le Sud, du lycée Carnot (celui de Paris, pas celui de Tunis !)
Outre Jules Ouaki, la famille compte une autre célébrité : Joseph Sitruk, cousin germain des parents de Stéphane et futur Grand rabbin de France.
L’adolescence, la bar mitsvah, les filles, le tennis, le bac, les études, la passion des champs de courses, les années Mitterrand, la rencontre avec Elisabeth, « mon amour ». La vie commence à 60 ans.
Très sympathique.
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions Transmettre. Septembre 2021. 118 pages. 18 €.