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Par Marie-Sarah Seeberger
Mardi 22 mars, dans un Paris baigné de lumière, nous avons rendez-vous avec Revital. Nous avons convenu de nous retrouver dans un hôtel du sud de Paris dans lequel sont logées des familles juives ukrainiennes réfugiées en France.
Revital nous accueille chaleureusement, le sourire aux lèvres, et quelques cernes de fatigue sous les yeux. Depuis plusieurs semaines, cette salariée du Casip-Cojasor est en charge de toute l’intendance pour les juifs ukrainiens hébérgés ici.
Cette mission d'hebergement et de prise en charge est rendue possible grâce au Fonds social juif unifié qui travaille de concert avec le Casip-Cojasor et l'OSE.
Revital nous montre le coin repas (casher), aménagé au fond du hall. On y trouve de tout : du café, du thé, des céréales, des biscuits, du sel. Comme à la maison.
Plus loin, des jeux de société et des jouets pour les plus petits débordent d’une étagère.
Une femme brune, parfaitement maquillée et coiffée vient vers nous. C’est Oxana, qui a accepté de nous raconter son histoire. Son mari David la rejoint quelques minutes plus tard.
Oxana est propriétaire d’un club de fitness à Vinnytsia, une ville de 350 000 habitants au sud de Kyiv. David, quant à lui, est l’assistant du Rabbin de la ville et gère une partie de l’organisation de la communauté juive locale, grande de 3 000 personnes.
Le 24 février dernier, leur vie a basculé.
Au milieu de la nuit, Oxana reçoit un appel de l’une de ses collègues : des bombardements se font entendre, la guerre a commencé. Oxana n’y croit pas. C’est impossible. Elle réveille David et se met à chercher des informations sur Internet. « On a cru à une blague… » soupire David.
Quand elle comprend la gravité de la situation, la première réaction d’Oxana est d’écrire sur la messagerie groupée pour prévenir ses employés qu’il ne faut pas venir le lendemain, que le club serait fermé. « Une réaction humaine en fait » glisse Oxana, cherchant le regard complice de son mari.
Le lendemain, la vie quotidienne est déjà devenue difficile. Il y a la queue partout, aux distributeurs, dans les supermarchés, dans les pharmacies.
Oxana et David s’installent dans le sous-sol et y resteront jusqu’au 8 mars, date de leur départ. « Nous avons eu de la chance, notre sous-sol était chauffé et propre. C’était loin d’être le cas pour tout le monde » explique David.
Des voisins et des amis les y rejoignent. Mais pas uniquement. Des gens de passage – en fuite depuis Kharkiv – y trouvent aussi refuge pour se reposer.
David réquisitionne l’école juive de la ville et la transforme en centre d’accueil, principalement pour aider ces Ukrainiens en transit d’une ville à l’autre. Il gère le centre nuit et jour et veille sur chacun.
La fille de David et Oxana vit en Israël, et leur fils – par chance – est parti en Thaïlande la veille de l’invasion pour un nouveau travail.
Le couple prend la décision de quitter Vinnytsia le 8 mars, à bord des bus de l’Agence Juive. Direction la Roumanie, sans savoir ce qui se passera ensuite.
Après leur passage de la frontière, ils sont accueillis avec de la musique, des chants et de la nourriture. David nous montre une vidéo qu’il a faite là-bas. On se dit que la musique adoucit donc véritablement les mœurs…
« Tout était très bien organisé, même pour les animaux ! » précise Oxana, mentionnant Polina, leur chat, qui fait partie du voyage.
Après une semaine passée dans un hôtel en Roumanie, ils prennent la route de Paris, en bus, accompagnés du Beth Habad.
Depuis, ils sont logés dans cet hôtel parisien et pris en charge par le Casip-Cojasor et les associations juives françaises. Ils disent ne manquer de rien et être très reconnaissants envers les associations qui les aident au quotidien. Ils sont aussi très sensibles aux marques de soutien envers l’Ukraine qu’ils perçoivent un peu partout dans Paris.
David est content de trouver autant de synagogues dans Paris et une vraie solidarité pendant les offices.
Timidement, ils osent parler d’espoir et de paix. Ils espèrent pouvoir bientôt retrouver leur vie et leur quotidien.
Grâce au Fonds social juif unifié (FSJU), Oxana et David ont obtenu le statut de réfugiés pour 6 mois, en quelques jours seulement. Avant de nous quitter, David nous confie qu’il aimerait pouvoir revenir en France un jour, « sans le petit papier rose ».
Nous adressons nos remerciements à Katya et Edgar pour leur présence et leur traduction.
Oxana, David et Polina ©CRIF
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