Le CRIF en action
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Publié le 28 Février 2007

Allocution de Nicole Borvo Cohen-Seat, Sénatrice de Paris, Présidente du groupe républicain et citoyen

Monsieur le Président du Sénat,


Monsieur le Président du CRIF,
Monsieur l’ambassadeur d’Israël,
Monsieur le Grand rabbin de Paris,
Je parle au nom du parti communiste français et j’excuse Marie-Georges Buffet qui ne peut pas être présente. Je veux dire d’emblé que le Parti communiste français condamne avec la plus grande énergie, les actes et les déclarations antisémites des dirigeants de la république Islamique d’Iran et en particulier les discours atterrants du Président Ahmadinedjab. Celui-ci, croyant pouvoir obtenir l’assentiment de son peuple et l’assentiment du monde arabe s’est permis des appels répétés à rayer Israël de la carte.
De telles provocations totalement inacceptables et insupportables à nos yeux sont largement rejetées dans le monde. Leur pouvoir de nuisance est réel. C’est aussi en effet, non seulement une façon d’alimenter l’antisémitisme mais aussi de nourrir ce qu’on appelle le « choc des civilisations », dans un affrontement raciste, communautariste, religieux, dangereux pour les relations internationales et naturellement, susceptible d’accentuer toutes les tensions, les crises et les conflits.
Le régime iranien bafoue systématiquement les droits humains dans des pratiques répressives qui figurent parmi les plus dures. Ces pratiques, il faut le dire, sont dénoncées avec constance dans ce pays par des démocrates et des progressistes en situation très difficile qu’il nous faut soutenir avec détermination.
Les libertés et la démocratie ne peuvent pas être considérées comme des valeurs relatives, se sont des exigences universelles. C’est dans cet esprit que nous avons dénoncé avec force la choquante et consternante réunion négationniste de Téhéran à laquelle un certain nombre de personnes d’Europe et de France ont participé dont Robert Faurisson, négationniste bien connu. Les propos de celui-ci vont faire l’objet d’une enquête préliminaire par la Justice française. Il est, à notre sens, nécessaire qu’il soit sévèrement sanctionné par les tribunaux comme la loi Gayssot, notamment, le prévoit.
Il est profondément dommageable et particulièrement préoccupant que l’Iran, ce pays, cette nation à l’histoire millénaire et de si grande culture, soit mis en contradiction avec les leçons de civilisation tirées des plus grandes tragédies vécues par l’humanité au XXème siècle. Il faut chercher les moyens d’aider politiquement le peuple iranien à construire une démocratie et un avenir à la hauteur des espoirs qui pointent et qui commencent à s’exprimer timidement malgré tout dans cette société qui aspire à une modernité ouverte sur le monde et les valeurs humaines. Soyons vigilants notamment quant aux méthodes à utiliser pour cela, en pensant à tous ceux qui luttent en Iran pour la démocratie.
Les dirigeants iraniens sont suspectés aujourd’hui de travailler à la maîtrise de l’arme nucléaire. Les soupçons pèsent d’autant plus qu’il y a eu des dissimulations antérieures et on voit bien les ambitions de puissance régionale de l’Iran. Il faut bien mesurer la nature et la dimension de l’enjeu. Il s’agit rien moins de la sécurité de l’ensemble du Moyen-Orient dans un contexte où celle-ci est déjà bien mise à mal par la guerre américaine en Irak avec le chaos meurtrier qui s’y développe jours après jours, les tensions qui se diffusent dans toute la région.
Soyons nets et précis, nous voulons que le traité de non prolifération soit respecté et appliqué par tous les états signataires ; ce qui signifie que si l’Iran a le droit de développer un nucléaire civil, l’Iran n’a pas le droit et ne doit pas rechercher la maîtrise de la technologie dit du nucléaire militaire. Une telle acquisition serait un danger et un surplus de déstabilisation pour une région qui n’en a, hélas, pas besoin. Mais tous les Etats signataire du traité de non prolifération doivent s’engager dans un désarmement nucléaire multilatéral et contrôlé. C’est l’article 6 du TNP et c’est le sens du traité.
Il est temps de commencer à s’engager dans cette voie et de montrer l’exemple, en particulier pour les Etats-Unis et pour les autres membres permanents du Conseil de sécurité qui doivent, à ce titre, assumer une responsabilité primordiale en matière de sécurité internationale.
L’exigence du désarmement est pour nous, communistes français, une grande priorité politique et une nécessité permanente. La sécurité ne se divise pas, tous les états sont concernés y compris les non signataires du traité de non prolifération : Israël, l’Inde et le Pakistan, mais aussi, la Corée du Nord qui a annoncé son retrait du traité en 2003.
Les Etats-Unis tout en menaçant de plus en plus explicitement l’Iran, apportent leur aide à l’Inde, laisse faire le Pakistan et négocient avec la Corée du Nord. Ils montrent par cette politique à géométrie variable que leur objectif n’est pas la sécurité mais la gestion de leurs alliances stratégiques dans un contexte d’échec majeur en Irak. Il faut craindre une escalade et une confrontation militaire dont les conséquences pourraient être dramatiques. Loin de résoudre les problèmes, de telles escalades pourraient, au contraire, les aggraver. C’est une perspective redoutable et inacceptable à nos yeux. Nous constatons d’ailleurs avec inquiétude ce que la presse américaine appelle déjà « l’ouverture d’un troisième front » avec l’Iran après l’Afghanistan et l’Irak.
Il faut revenir pour cela au sept propositions de Mohamed el-Baradei, directeur de l’agence internationale de l’énergie atomique et prix Nobel de la paix en 2005. Ses propositions lient en particulier le contrôle renforcé de la non prolifération, au respect par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de leur engagement pour le désarmement nucléaire - notamment au nom du traité de non prolifération. En soulignant la nécessité de reconnaître, afin d’agir pour y remédier que les tensions régionales génèrent la prolifération et la course aux armements. Cet enjeu du désarmement et des conditions de la sécurité devrait être pris en compte de façon multilatérale au sein des Nations unies. C’est en effet, ce que l’on appelle une responsabilité collective.
Enfin, il est certain qu’un règlement politique des conflits, en particulier le conflit israélo-palestinien, dans le respect du droit et de la justice pour le peuple palestinien, contribuerait à créer un climat plus favorable au rétablissement d’une sécurité partagée dans un monde plus sûr, pour reprendre le titre d’un important rapport de Kofi Annan. C’est aussi à ce titre que tous les Etats de la région sont concernés y compris Israël. La France et ses partenaires européens, devraient à notre sens, rappeler que la paix au Moyen-Orient est une sécurité garantie durablement pour tous dans la région. Cette paix et cette sécurité seront aussi, le fruit du respect des résolutions de l’ONU et de la fin de l’occupation et de la colonisation et de la création d’un Etat palestinien.