Le CRIF en action
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Publié le 10 Février 2004

Discours d’Arié Bensemhoun, Président du CRIF Midi-Pyrénées Au dîner du CRIF, le lundi 2 février 2004

Monsieur le Ministre,



Permettez-moi tout d’abord de vous souhaiter la bienvenue à Toulouse.

Toulouse, terre de tolérance, haut lieu de la République municipale avec les Capitouls, mémoire voltairienne de l’Affaire Calas.

Toulouse, symbole de la fraternité chrétienne du Cardinal Saliège, juste parmi les nations, dénonçant avec courage dans une pastorale qui le fit entrer au Panthéon des Grands Hommes du siècle dernier, le droit antisémite de Vichy.

Droit inique s’il en fut, dont le professeur Vladimir Yankelevitch venait notamment de faire l’objet, en étant expulsé, ici, de la Faculté des Lettres.

Toulouse, capitale de la résistance où fut fondée notamment, l’Organisation Juive de Combat, qui se dressa avec courage pour combattre les nazis et s’opposer à la milice collaborationniste de Vichy.

Toulouse enfin, où la présence des communautés juives, se confond avec l’Histoire de France la plus ancienne. Les juifs furent dans cette région depuis les premiers temps de l’ère chrétienne, avant même que la France ne se soit constituée en Nation unifiée. Ils s’y sont enracinés malgré les vicissitudes de l’histoire, avec passion et amour.



Merci d’avoir accepté l’invitation du CRIF et d’honorer de votre présence cette soirée annuelle qui fait se rencontrer, au-delà des clivages politiques, des chapelles religieuses et des conditions sociales, des hommes et des femmes mus par le même idéal, celui de la République, qui proclame les valeurs fondamentales auxquelles nous sommes farouchement attachées, Liberté, Egalité, Fraternité.

C’est la communauté juive de Toulouse et ses représentants qui vous accueillent ce soir, pour, à la fois, rendre hommage au républicain de gouvernement que vous êtes, à l’homme de terrains, courageux et déterminé, qui avez su prendre toute la mesure de la gravité des événements que nous vivons et subissons depuis le mois de septembre 2000, mais aussi, pour partager avec vous, une réflexion sur l’avenir de notre nation et de notre société.

Le contexte de cette soirée, reste marqué par l’antisémitisme qui sévit à nouveau dans notre pays, avec une violence inédite depuis la seconde guerre mondiale.

Oui, nous traversons une crise grave, que nous devons trouver ensemble, la force de surmonter :

- Crise de la laïcité,

- Crise de l’école,

- Crise de l’intégration,

- Crise du lien social et de la paix civile …

Une crise qui va bien au-delà de la seule communauté juive, car comme l’a rappelé le 17 Novembre 2003, le Président de la République, et samedi soir encore, le premier Ministre au dîner national du CRIF : « Quand on s’attaque à un juif en France, c’est à la France tout entière que l’on s’attaque ».

Notre longue expérience a fait de nous les sentinelles vigilantes de l’Histoire, notre mémoire est le baromètre de la société, et le sort qui nous est fait est d’abord le révélateur de la maladie qui ronge l’humanité. Et comme à chaque fois, le malheur des juifs, soyez en sûr, annonce le malheur du monde.

Après une période de grande confusion où il semblait impossible de nommer les choses, de dire clairement, que la violence dont les juifs sont victimes n’est pas un simple phénomène de délinquance.

Qu’elle est le fait d’une partie de la population arabo-musulmane, issue de l’immigration ;

Qu’elle est sous-tendue par une idéologie nauséabonde et entretenue par un enseignement de la haine, qui ne connaît aucune frontière susceptible de l’arrêter ;

Qu’elle est véhiculée par tous les canaux qui sont habituellement ceux de l’information et du savoir :

- Par des ouvrages ignobles,

- Par des prêches assassins dans certaines mosquées, y compris en France,

- Par des programmes télévisés mensongers et délirants, qui n’hésitent pas à mettre en scène, les pires calomnies contre les juifs.

On y retrouve pêle-mêle, les accusations du complot juif international, reproduisant le faux antisémite du protocole des sages de Sion, inventé au 19e siècle, et celle du meurtre rituel, comme dans ce film, Al Shatat, réalisé par la chaîne Almanar du Hezbollah au Liban.

On y voit en gros plan, un Rabbin égorger un enfant non-juif, puis recueillir son sang pour en faire les matsots, les galettes de la pâque juive. Ces scènes sont insupportables.

Ces films sont conçus pour conditionner les esprits à la haine et au fanatisme. Ils sont des outils diaboliquement performants pour recruter, dés le plus jeune âge, de futurs terroristes, qui n’hésiteront pas à se sacrifier au nom d’Allah, en entraînant avec eux dans la mort des dizaines d’innocents.

Ces films sont diffusés en France par les relais satellitaires et inondent les cités où fleurissent les paraboles. Je me félicite qu’enfin, le gouvernement et le CSA aient pris les mesures qui s’imposent pour faire cesser ces agissements contraires à la loi. D’ores et déjà, je crains que les dégâts de cette pollution mentale, soient considérables.

- Enfin au risque de déplaire, il faut dénoncer certains médias qui ont été trop souvent complaisants avec les auteurs des agressions antisémites et partisans dans le traitement de l’information sur le conflit du Moyen-Orient.

Pour ce qui est de l’antisémitisme, les médias ont, semble-t-il, réussi en partie à se libérer du politiquement correct compassionnel, pour oser enfin dénoncer la véritable nature de cette violence. C’est un élément très positif.

Mais, pour ce qui est d’Israël et du Moyen-Orient, beaucoup reste à faire pour restituer avec objectivité la véritable nature du conflit et les responsabilités des parties en présence. Car nous savons que le conflit israélo-palestinien sert à la fois de prétexte et de catalyseur à l’antijudaïsme qui sévit en France et en Europe, comme la prouvé l’enquête de l’Union Européenne, qui n’a pas été rendue publique, tant elle était accablante.

L’antisémitisme nouveau, est en quelque sorte la synthèse de l’inquisition qui conduisait les juifs au bûcher, ou les contraignait à renier leur foi et l’antisémitisme nazi, qui par la diabolisation et l’exclusion des juifs de la société humaine, a ouvert les portes d’Auschwitz, ce conglomérat de la mort dont nul ne pouvait espérer réchapper.

Aussi inattendu que cela puisse paraître, le danger n’est pas venu d’où on l’attendait. Ce n’est pas de l’extrême droite antisémite - qui n’a d’ailleurs rien perdu de sa virulence et qui continue à hanter la vie politique des démocraties européennes - que les coups sont venus.

Non, c’est aujourd’hui dans le monde arabo-musulman que se recrutent les fanatiques les plus dangereux, prêts à tout pour faire triompher leur folie et imposer au monde, ce qui apparaît comme l’embryon d’un totalitarisme qui marque déjà de son empreinte ce 21e siècle naissant.

Mesdames, Messieurs, prenons garde aux amalgames et aux raccourcis ravageurs. Nous, Juifs, en avons été trop souvent les victimes, pour ne pas discerner dans la complexité des événements, le bon grain de l’ivraie.
Ce n’est pas la France qui est antisémite, disons le une fois pour toute, mais c’est en France que l’antisémitisme progresse le plus.

Ce n’est pas l’islam ou les musulmans qui sont en cause, car ils sont eux-mêmes sur la ligne de front. C’est la menace que l’islamisme politique radical fait peser sur le monde, que nous dénonçons.

L’antisémitisme qui sévit en France est une plaie importée, qui a trouvé dans la misère de nos quartiers et de nos cités un terreau favorable pour se développer.

Cet antisémitisme se nourrit, du négationnisme, de la criminalisation d’Israël, de la compétition victimaire à laquelle se livrent les palestiniens avec la complicité de l’extrême gauche et du courant alter-mondialiste, enfin, de l’antisionisme.

Dans de nombreux pays arabes ou musulmans et au sein même de l’Autorité palestinienne. Les ouvrages de Hitler, de Faurisson, de Garaudy et d’autres sont de véritables best seller.

Tsahal, l’armée de défense d’Israël, est présentée comme une horde de tueurs d’enfants, et son action comparée aux abominations commises par les nazis.

Les Palestiniens cherchent à s’imposer comme la figure de substitution du martyrologe juif, en retournant contre Israël et le peuple juif, tous les symboles de son histoire.

Tout cela conduit à rendre légitime, la destruction de l’Etat d’Israël et son remplacement par un Etat binational ou les juifs à nouveau minoritaires, finiraient par disparaître.

Il faut pouvoir se libérer de quelques idées préconçues et d’une grille de lecture héritée de la seconde guerre mondiale pour comprendre la véritable nature de cet antisémitisme que je viens de décrire.

Ce n’est pas facile et je ne suis pas convaincu que se soit clair pour tout le monde. Mais le gouvernement auquel vous appartenez, a eu la lucidité et le courage de commencer à dire et à faire les choses.

Vous avez mis en place, une cellule de veille à laquelle le CRIF national participe. Vous connaissez donc la nature et la gravité des agressions qui sont perpétrées contre les juifs partout dans notre pays, et ce qui est plus inquiétant encore, à l’école, sanctuaire de la République, qui n’est pas, loin s’en faut, préservée.

C’est ainsi qu’au-delà du discours qui traduit votre prise de conscience et la gravité des faits, vous avez pris des mesures, qui tant au niveau de la police que de la justice et de l’éducation nationale, commencent à porter leurs fruits.

Il est incontestable que vous menez une véritable politique gouvernementale de lutte contre l’antisémitisme. Nous devrions donc avoir toutes les raisons de nous rassurer. Et c’est précisément cela qui est effrayant, comme l’écrivait Yonathan Arfi, le Président de l’UEJF dans le journal Le Monde : « ils font leur travail, et, visiblement cela ne suffit pas ».

Certes, les agressions enregistrées diminuent, mais le nombre de celles qui sont répertoriées reste dangereusement élevé, leur gravité ne se dément pas et nous savons que toutes les victimes ne portent pas plainte. Nous en avons l’exemple ici même à Toulouse.

Si l’on ne peut occulter la détermination et l’action du gouvernement, ainsi que les résultats qui sont d’ores et déjà quantifiables en termes de prévention, sécurisation, arrestations et procédures judiciaires, je ne peux cacher que l’inquiétude de la communauté juive est immense.

Nous avons hélas une longue expérience des persécutions et de la haine qu’à travers l’histoire nous ont voué les nations, pour savoir que la crise que nous connaissons n’a rien de passager.

Il y a quelques années encore la célébration de la Mémoire nous laissait penser que les leçons de l’histoire avaient été tirées et nous laissaient envisager une ère de paix et de fraternité dans un monde guéri de ses vieux démons.

Mais hélas, mille fois hélas, c’est Brecht qui avait raison : « le ventre qui a enfanté la bête immonde est encore fécond ».

C’est ainsi, que la violence des premières agressions de la fin de l’année 2000, nous a stupéfié, en nous rappelant de biens mauvais souvenirs et en nous renvoyant à une précarité de notre condition de juifs, que nous pensions appartenir au passé, 60 ans à peine après la Shoah.

Notre première réaction fut la peur. Nous sentions à nouveau le ciel s’obscurcir sur nos têtes et le sol se dérober sous nos pieds.


Allions-nous revivre ce que nos parents et grands parents avaient vécu ?

La persistance de ce phénomène, la multiplication des agressions et le silence de l’opinion, a ajouté l’inquiétude à la peur, car en plus d’être menacés, nous avions l’impression d’être seuls, abandonnés de tous.

Où est le sursaut républicain qui fit descendre dans la rue il y a 14 ans, des centaines de milliers de manifestants, de droite comme de gauche, avec à leur tête le Président de la République François Mitterrand, quand avait été profané le cimetière juif de Carpentras ?

Ceux qui étaient à nos côtés en 1990 sont, aujourd’hui silencieux, comme si le fait que les actes anti-juifs soient commis en très grande partie par des jeunes issus de l’immigration excusait tout. Cela n’excuse rien !

Où étaient, les démocrates et les défenseurs des droits de l’homme, en février 2002, quand nous manifestions contre l’antisémitisme au cri de « synagogues brûlées, République en Danger » ?

A l’exception de quelques-uns, ils sont restés sourds à notre détresse et aveugles à nos souffrances. Pour ne pas avoirs réagis, ils ont dû descendre dans la rue quelques semaines plus tard, parce que Jean-Marie Le Pen et le Front National étaient au 2e tour de l’élection présidentielle. Mais avons-nous seulement tiré les enseignements de ce séisme politique, dont nous pourrions bien vivre le remake à l’occasion des élections régionales.

Peur, Inquiétude, aujourd’hui, c’est la colère qui pourrait bien l’emporter, car nous nous étions promis, que jamais, plus jamais, nous n’accepterions de baisser la tête.

Or il faut bien le constater, beaucoup de juifs, notamment dans la région parisienne, sont obligés de raser les murs, mais n’est-ce pas finalement le but recherché ?

Il me vient d’ailleurs en mémoire, cette terrible scène, au cours de laquelle, en marge d’une manifestation “d’opposants” à la guerre en Irak, des jeunes juifs, du mouvement Hachomer Hatzair, ont été pris à partie par des « pacifistes en keffieh », armés de gourdins, au cri de : « il y a des juifs là-bas »

Ces jeunes juifs ont été tabassés et insultés pendant que, montant sur une estrade de fortune et munis d’un porte-voix, un des agresseurs improvisait un discours, on ne peut plus explicite où il disait je cite : « nous les Arabes nous pouvons marcher la tête haute, eux les juifs seront obligés de baisser la tête ».

La scène a été filmée et diffusée sur toutes les chaînes de télévision… et les agresseurs, qui ont agi à visage découvert, courent toujours.

Ce n’est qu’un exemple parmi, hélas, tant d’autres et je crains qu’il ne faille plus, que ce qui est mis en œuvre, pour éradiquer cette peste qui, s’en prend aux juifs, mais dont l’objectif est de détruire le système hérité de la Révolution. De porter atteinte à la dimension universelle des Droits de l’Homme, pour lui substituer une idéologie qui priverait tout le monde de son esprit critique et de sa liberté.

Peur, inquiétude, colère, que dire, à toutes celles et à tous ceux, dans la communauté juive, qui nous interpellent et qui nous interrogent pour savoir, si les juifs ont encore leur place en France ?

Oui vous avez bien entendu, cette question est terrible pour « les fous de la république » que nous sommes, comme le souligne, dans un magnifique ouvrage, Pierre Birnbaum.

Certes, la réponse est plus facile aujourd’hui que nous sentons la nation mobilisée dans le combat pour la défense des valeurs républicaines et contre l’antisémitisme.

Vous connaissez notre modération et le sens des responsabilités dont le CRIF et l’ensemble des institutions juives ont toujours fait montre.

Mais à une question aussi grave, nous devons répondre avec conviction et honnêteté. Voilà pourquoi, nous souhaitons œuvrer avec vous, à rétablir la confiance entre les français juifs et la France.

Vous dites ne rien vouloir laisser passer. C’est important, et c’est un engagement qui a vocation à marquer les esprits. Mais il faut aller beaucoup plus loin, et mobiliser toutes les forces vives de la nation en déclarant grande cause nationale la lutte contre l’antisémitisme.

Il faut rendre impossible l’agression qui s’est banalisée contre les juifs.

Nous avons besoin dans ce combat de l’engagement de tous et peut-être en premier lieu, des représentants du Conseil Français du Culte Musulman, que vous avez porté, avec détermination, sur les fonts baptismaux.

Il fut un temps, heureusement révolu, où l’islam n’avait pas de représentants. Aujourd’hui, qu’ils sont en place et reconnus, il leur appartient de lever toute ambiguïté, quant à l’adhésion aux principes qui nous fondent, en tant que société laïque et démocratique.

Les représentants du CFCM doivent donner l’exemple et montrer le chemin notamment aux plus jeunes par un engagement républicain sans faille. Les français musulmans, doivent relever le défi de la modernité car ils ont la chance de vivre dans un état de droit, un état démocratique qui respecte l’islam quand il sait être tolérant, généreux et humaniste.

Il y a deux siècles, quelqu’un qui fut votre illustre prédécesseur dans cette action, car il est à l’origine, de la création du Consistoire Central des Israélites de France - je vieux bien sûr parler de l’Empereur Napoléon Ier - a réuni le Sanhédrin pour vérifier au travers de questions précises la compatibilité de la foi juive avec les règles de l’Empire.

À cet interrogatoire pressant, les israélites de l’époque répondirent par cette sentence talmudique, vieille de 20 siècles et qui fut le passeport du peuple juif pour s’intégrer au sein des nations qui l’accueillaient : « Dina de malkhouta dina », ce qui veut dire, la loi du pays est la loi. Quand il y a conflit, c’est la loi du pays d’accueil qui s’impose.

Or, à quoi assistons-nous aujourd’hui, dans le débat sur la laïcité, sinon à une volonté de ceux qui sont accueillis de dicter leur loi à ceux qui sont accueillants ?

Que voit-on, sinon comme l’écrit Yvan Rioufol dans le Figaro :


« La France désarmée devant les islamistes qui la narguent sur son sol. Elle est désarmée car une dialectique de la repentance s’est mise en marche, qui assimile les fondamentalistes aux victimes de l’Occident colonialiste. Elle est désarmée car la République des Droits de l’homme est tétanisée à l’idée d’être accusée d’islamophobie. Elle est désarmée, car nombre des arguments antiaméricains et antisionistes des intégristes sont ceux que l’on entend dans le cercle des politiques et des médias ».

Avec Denis Jeambar, directeur de la rédaction de l’Express, j’affirme que l’heure n’est plus aux tergiversations car : « Les ennemis de la République doivent se frotter les mains devant ces hésitations (…) ils ont semé le doute dans l’exception républicaine française. Il est urgent de se ressaisir ! Quand une nation ne sait plus ce qui la fonde, et que son peuple s’interroge sur les principes qui le rassemblent, elle se déglingue ».

En ces temps de globalisation et de mondialisation, le mal qui nous taraude, est planétaire. Il appelle donc des réponses au niveau intérieur mais aussi au niveau international.

La voix de la France doit se faire entendre à l’étranger, à Damas, à Téhéran ou à Kuala Lumpur. La France doit affirmer les principes qui sont les siens, dans le respect de ses intérêts géostratégiques et politiques, mais sans se compromettre avec des Etats voyous qui doivent êtres combattus plutôt que courtisés.

Nous devons nous interroger, comme l’a fait le Président national du CRIF devant le Premier Ministre, Samedi soir, sur : « la pertinence de notre politique étrangère qui tolère que la Libye, condamnée pour avoir fait exploser deux avions avec leurs centaines de passagers, puisse présider la commission des Droits de l’homme de l’ONU ?

Comment la France a-t-elle pu s’abstenir ?

S’interroge Roger Cukiermann avant de poursuivre :

Quant à la Syrie, nous ne devrions pas montrer de complaisance pour les assassins de nos soldats au Liban en 1982 ou de notre ambassadeur, Louis Delamarre, la même année, ou pour les occupants d’un pays ami le Liban ».

La France doit également s’engager sur le territoire national comme au niveau international à condamner avec force l’antisionisme.

Car dénier au seul peuple juif le droit de disposer d’un petit bout de terre, là où des siècles avant l’avènement des grandes puissances et des grandes religions, il avait déjà bâti une civilisation florissante, est une injustice qui n’a déjà provoqué que trop de malheurs.

Le sionisme rappelons le, est le mouvement de libération nationale du peuple juif. L’antisionisme n’est pas une opinion comme les autres qui pourrait s’assimiler à la possibilité de critiquer l’Etat d’Israël.

Israël est une démocratie critiquable dans ses décisions, mais pas condamnable dans son essence, dans son droit et sa légitimité à être.

Il faut avoir le courage de dire que l’antisionisme, n’est rien d’autre que le dernier avatar de l’antisémitisme, et qu’à ce titre, il est aussi intolérable que l’antisémitisme.

la France peut redonner l’espoir à ceux comme nous qui croyons à la réconciliation des peuples.

Nous croyons à la paix entre israéliens, palestiniens et le reste du monde arabe, pourvu que soient reconnus sans arrières pensés, les droits de chacun.

Nous croyons à deux états séparés et indépendants ou chacun pourra vivre en toute sécurité en assurant l’épanouissement et le progrès de ses ressortissants.

Nous pensons que cela ne sera possible que lorsque justice sera rendue au peuple juif qui traverse l’Histoire en supportant toutes les infamies. Cette justice, passe par la reconnaissance de la souveraineté du peuple juif sur Jérusalem. Car Israël sans Jérusalem, c’est priver les juifs de leur âme et de leur raison d’être.

Jérusalem, capitale d’Israël, ville unifiée et ouverte, doit être le symbole de la réconciliation des peuples qui reconnaiteront enfin, le rôle et la place du peuple juif, au lieu de vouloir se substituer à lui.

La justice, c’est de reconnaître le droit d’Israël à se défendre face au terrorisme suicidaire et génocidaire de ses ennemis fanatiques, dont le programme est de tuer des juifs où qu’ils se trouvent et quel que soit leur âge.

C’est de faire les taire les mensonges de ceux qui veulent se décharger sur Israël de toute la culpabilité du monde.

Car, si l’on en croit le Prix Nobel de littérature José Sarramago, Ramallah, c’est Auschwitz, quant à Mikis Théodorakis, Israël est aujourd’hui la racine du mal, pour les « défenseurs de la cause palestinienne » la barrière de sécurité est le mur de la honte ou le mur de l’apartheid. Les habitants de Judée Samarie, des colons sanguinaires.

Les terroristes eux sont des activistes quand ils ne sont pas des résistants.

Les civiles déchiquetés par les bombes humaines palestiniennes, comme se fut à nouveau le cas jeudi à Jérusalem, seraient les victimes de l’entêtement de Sharon à humilier les palestiniens, comme les islamikases, des désespérés plus à plaindre qu’a blâmer.

Il y avait parmi les victimes de jeudi à Jérusalem, un jeune Français qui se rendait à l’école. Sa mère n’a récupéré que quelques morceaux de chair dans un sachet en plastique. Quant au fils de l’ancien Grand Rabbin de Toulouse, sa voiture suivait le bus et il ne doit qu’à la chance d’être encore en vie.

Depuis septembre 2000, 19000 attaques sur le territoire d’Israël ont fait près de 1000 morts et plus de 6000 blessés, qui resteront marqués à vie ; la plupart sont des civils, le plus souvent des femmes et des enfants.

Dois-je continuer ?

Cela n’est pas nécessaire car je crois que chacun a compris que se sont d’abord les mots qui tuent. Le mur de la haine que l’on construit dans le cerveau des jeunes générations, sera plus difficile à abattre, que quelques kilomètres de barrières électroniques de sécurité, même faites de fils de fer barbelé.

Voilà, ce que je voulais vous dire ce soir.


D’autres sujets se pressent dans mon esprit, mais le temps nous manque et je suis persuadé que nos invités sont impatients de vous entendre, car c’est aussi pour vous qu’ils sont là ce soir.

Je conclurais donc sur une note d’espoir pour notre pays la France.

La France, qui a tant donné au monde, peut être, doit être, ce lieu de brassage où juifs chrétiens, musulmans, agnostiques ou libres-penseurs, peuvent inventer un modèle de civilisation, qui aura vocation à rayonner dans le monde entier, pour être l’exemple de la coexistence pacifique et respectueuse de toutes les traditions.

Pour la première fois dans l’histoire, les fidèles des grandes religions du livre, cohabitent avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, dans un pays de liberté, d’égalité et de fraternité. Une vraie Démocratie respectueuse des Droits de l’Homme.

Il y a là une responsabilité à laquelle nous ne pouvons nous dérober, car, dans ce monde plein de cris et de haines, c’est la mission que l’histoire en marche nous a assigné.

Merci de votre attention.