Le CRIF en action
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Publié le 15 Septembre 2010

«Le temps béni du dialogue»

L’Amitié Judéo-Chrétienne de France a publié, mardi 14 septembre 2010, les impressions d’une de ses adhérentes ayant participé à la session d’été 2010 "Découvrir le judaïsme" à Melleray, organisée en partenariat avec les principaux groupes AJCF de l’Ouest de la France, le Service diocésain pour les relations avec le judaïsme (SDRJ) de Nantes.




« La session : « Découvrir le Judaïsme » (13-18 juillet 2010) à La Melleray a démontré qu’entre Juifs et Chrétiens nous sommes dans le temps béni du dialogue. Les organisateurs de cette session, le service diocésain pour les relations avec le Judaïsme des diocèses de l’Ouest, ont donné une impulsion nouvelle à nos rencontres et ont fait de celle-ci un point de référence. Il y aura désormais un avant et un après La Melleray. Le père P. Éon et Thierry Colombié se sont appuyés sur le climat de confiance qui règne entre les trois diocèses de cette région et les groupes d’Amitié judéo-chrétienne locaux ainsi que la communauté juive de Nantes. Ils ont réalisé ensemble ce projet de session sur plusieurs jours avec pour conférenciers des acteurs majeurs du dialogue aujourd’hui : père Jean Dujardin, père Patrick Desbois, père Philippe Loiseau, père Michel Remaud, rabbin Philippe Haddad, Magda Hollander Lafon, Danièle Guerrier et Liliane Apotheker. Monseigneur d’Ornellas, à peine rentré de Côte d’Ivoire, était présent le jour du Shabbat…
En quoi cette session était-elle inédite ? La réponse réside dans la présence des Éclaireurs et Éclaireuses Israélites de France (E.E.I.F.) et de Scouts et Guides de France. Les jeunes ont ainsi, outre l’animation des soirées et de la commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv, préparé les centaines de repas que nous avons pris ensemble. Nous avons donc tous mangé à la même table dans le respect total de la cacherout et vécu un vrai shabbat en partage…
Les interventions furent nombreuses, riches et variées. Elles ont permis de comprendre, comme l’a dit le rabbin Ph. Haddad que notre chemin doit être celui de la « Mahloket Le Chem Chamayim », la discussion entre Sages en vue de l’Éternel, plutôt que la dissension en vue d’occuper seul et de manière exclusive les cieux…
L e jour de la commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv Magda Lafon, rescapée d’Auschwitz, a appelé à la vie les jeunes Juifs et Chrétiens présents, tous avides et respectueux de sa parole. La présidente des EEIF, Mme. B. Boukhriss-Halpern a rappelé son enfance tant marquée par le vécu douloureusement silencieux de son père, immatriculé au bras.
Le père Desbois a parlé de son travail pour retrouver les fosses communes en Europe de l’Est, de la singularité de la Shoah, de la capacité de nuisance des négationnistes. Le Cardinal Lustiger disait que tuer le peuple juif était en somme faire disparaître à jamais le peuple porteur de l’interdiction biblique de tuer. Nous ne pouvons pas nous séparer de la mémoire des assassinés. Faut- il en parler encore ? Autant ? Nous avons peut-être un devoir d’exemplarité en France, porté par de grandes figures comme Serge Klarsfeld, Claude Lanzmann, Simone Veil. Dans d’autres pays, on n’en parle pas, pas plus qu’on n’y parle d’autres génocides. Ne devons-nous pas exporter quelque chose de cette exemplarité plutôt que dire qu’on en parle trop ?, interroge le père Desbois…
... La communauté juive de Nantes a témoigné par sa participation active tout au long de la session, où jamais les Juifs n’ont été aussi présents, qu’elle s’engageait avec confiance dans cette ère nouvelle. La soirée de théâtre animée par ses membres nous a fait goûter à tout l’humour et à la tendresse exprimée dans le monde Yiddish…
… À La Melleray, nous avons changé des regards, déconstruit des préjugés, en un mot comme en cent, lutté contre l’antisémitisme, évoqué le lien du peuple juif à la terre d’Israël, tordu le cou au négationnisme, cette pathologie toujours prête à resurgir. Nous avons aussi incarné avec bonheur les grands textes du dialogue judéo-chrétien, nous avons vécu ensemble sans aller au plus fin dénominateur commun, celui qui gomme les différences, voire les aspérités. Au contraire, nous avons fait jaillir la richesse de nos traditions… »
Photo : D.R.