Accompagnant son exposé de projections de diapositives très éloquentes, le docteur Lucien Moatti, auteur d’un récent ouvrage : « La mosaïque médicale de Tunisie. 1800-1950 » a brossé le portrait d’une cinquantaine de grands médecins juifs de Tunisie dont le fameux « médecin du ghetto », David Scialom. À l’aide de tableaux statistiques et d’histogrammes, il a pu mettre en évidence l’implication dans le domaine médical des différentes composantes du pays : Juifs, Musulmans, Maltais, Italiens, Tunisiens et Français. Le professeur Robert Haïat a tenu, à sa suite, à rendre hommage à deux grands médecins non-juifs, le Rouennais Charles Nicolle, qui obtint le prix Nobel de médecine en 1928 pour sa découverte sur le rôle du pou comme vecteur du typhus et l’ophtalmologue suisse Auguste Jean Cuénod. Jean Corcos, pour sa part, a brossé un portrait émouvant de son père, le docteur André Salomon Corcos, grande figure de la médecine juive en Tunisie, disparu en 2007 et dont les travaux sur le kala-azar, le paludisme ou encore la fameuse « maladie périodique » qui affectait spécialement la population juive, ont fait autorité, associant à sa carrière, son épouse et assistante, le docteur Sarah Corcos née Zarka.
Le professeur Robert Modigliani, hépato-gastro-entérologue, a narré, avec beaucoup d’humour, les aventures de Nathanaël, le héros de son livre, fortement autobiographique, « Le bâton et l’eau chaude. Voyage d’un Juif italo-tunisien ». Spécialiste en andrologie et en endométriose, le docteur Jean Belaish a axé son intervention sur de savoureuses anecdotes autour d’incidents survenus dans sa carrière. Enfin, le professeur Marc Fellous, généticien de renom qui dirige le laboratoire de génétique de la reproduction (Unité Inserm 567) de la faculté de médecine de l’hôpital Cochin, découvreur avec son équipe, en 1993, du gêne SRY qui détermine le sexe masculin, a présenté, diapositives à l’appui, un travail extraordinaire qui vient en opposition complète avec les prétention de l’écrivain Shlomo Sand sur la nature du peuple juif. Une enquête scientifique minutieuse auprès de populations juives d’origine tunisienne, en région parisienne et en Israël a permis notamment de conclure que les Juifs tunisiens ne se sont pas beaucoup mélangés au cours des siècles avec les populations locales. Le professeur Fellous a également évoqué le fameux chromosome Y des Cohanim, objet de nombreuses études avant de présenter l’action qu’il mène, dans un tout autre domaine, pour la préservation et l’entretien du cimetière juif du Borgel à Tunis.
Une soirée, de l’avis de tous, très enrichissante.
Photo : D.R.