Présent à la manifestation, Richard Prasquier, le président du CRIF, a dans son discours rappelé le lien qui unie les Juifs de France et les Israéliens francophones « soudés par notre passé, les drames et les gloires du peuple juif, soudés par nos espoirs et nos inquiétudes communes, celles d'un Israël en paix dans un monde débarrassé du fanatisme, de l'intolérance et de la haine antisémite ». Revenant sur les relations franco-israéliennes, Richard Prasquier a parlé d’une « nouvelle phase, plus confiante, amicale et compréhensive des impératifs de sécurité d'Israël ». Le président du CRIF a insisté sur l’importance de l’entrée d’Israël dans l’Organisation Mondiale de la Francophonie et espère que « le Président Nicolas Sarkozy, qui y est attentif, pourra modifier cette situation ». « Car il y a sur cette seule place de Netanya dix fois plus de francophones que dans certains pays qui sont acceptés dans cette organisation au détriment de toute justice et de toute raison! », indique t-il en ajoutant : « La francophonie en Israël, c'est aussi la possibilité pour les francophones d'accéder aux aides, à l'accompagnement, aux manifestations culturelles qui leur sont spécifiques dans la proportion de leur représentation. »
C’est dans cette optique que le Mouvement francophone israélien est né. « Nous voulons faciliter l’intégration des francophones israéliens afin qu’ils s’impliquent réellement dans la vie citoyenne », explique Yossi Taieb. En effet, les francophones ont de grandes difficultés a faire entendre leur voix et à défendre leurs intérêts. « Il est grand temps que la communauté francophone harmonise ses actions, parle d’une même voix et prenne sa place en Israël », déclare Yossi Taïeb. Les prochains projets de ce mouvement apolitique sont la création d’un comité de réflexion, présidé par l’ancien ambassadeur d’Israël en France, Nissim Zvili, et d’équipes communautaires qui monteront diverses activités dans le domaine social et culturel.
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Discours de Richard Prasquier
C'est la première fois qu'un Président du CRIF s'adresse à un public aussi nombreux de francophones israéliens et de Juifs de France regroupés. Je savoure ce moment et je remercie le Mouvement francophone, Yossi Taieb et les autres organisateurs de cette soirée de me donner cette occasion. Rassurez-vous, je ne serai pas long: ma famille m'attend à Petakh Tikva pour un mariage et j'ai déjà eu du mal à leur expliquer que je serais forcément en retard.
Les Juifs de France sont environ 600 000 et les Juifs francophones en Israël sont aussi environ 600 000. Je ne dirai pas, vous, les francophones d'Israël et nous, les Juifs de France, tant nous sommes soudés les uns aux autres, soudés par nos familles (qui d'entre nous n'a pas ici des parents ou des amis très proches ?), soudés par notre passé, les drames et les gloires du peuple juif, soudés par nos espoirs et nos inquiétudes communes, celles d'un Israël en paix dans un monde débarrassé du fanatisme, de l'intolérance et de la haine antisémite.
Outre ceux qui ont fait leur Alya définitive, il y a ceux qui s'installent pour leurs grandes migrations d'été, de printemps ou d'hiver, d'autres encore qui y passent leurs études ou leur retraite . Pour certains, c'est l'avion de l'aller le jeudi et l'avion du retour le dimanche. Il est loin le temps où le départ était pour la vie et où une fois installé dans le pays, on ne le quittait plus jamais. La fluidité est le mot d'ordre actuel. C'est une bonne chose, et sachez-le, c'est une spécialité française, alors que notre pays, en général, ne brille pas particulièrement par sa flexibilité....
Le CRIF en tant que représentant politique de l'ensemble des organisations juives de France n'a pas particulièrement vocation à travailler pour l'Alya, ce qui ne signifie évidemment pas qu'il s'y oppose en quoi que ce soit. Notre objectif est de lutter contre l'antisémitisme et d'améliorer l'image d'Israël. Ce que nous espérons c'est une Alya de conviction plutôt qu'une Alya de fuite, une Alya en Eretz Israël plutôt qu'en Floride. Ce n'est pas toujours vrai actuellement et c'est notre devoir de lutter en France avec nos moyens pour que ce soit de plus en plus le cas.
Nous avons la chance de vivre actuellement un renouvellement des relations entre la France et Israël. Les plus jeunes ne savent plus comme ces relations ont été extraordinairement étroites avant la guerre des Six Jours, cette guerre qu'Israël se permit de gagner grâce à des avions français mais contre l'avis du Président français de l'époque. Les glaciations ultérieures et leurs épisodes les plus spectaculaires, vous les connaissez aussi bien que moi. Mais je pense réellement que nous sommes actuellement dans une nouvelle phase, plus confiante, amicale et compréhensive des impératifs de sécurité d'Israël. Restons prudents dans nos attentes, lucides dans nos analyses, et si besoin déterminés dans nos réactions, mais nous savons tous que le climat a changé.
Israël, vous le savez, n'a pas été accepté dans la francophonie: les prétextes allégués sont irrecevables. Nous espérons que le Président Nicolas Sarkozy, qui y est attentif, pourra modifier cette situation. Car il y a sur cette seule place de Nathanya dix fois plus de francophones que dans certains pays qui sont acceptés dans cette organisation au détriment de toute justice et de toute raison!
Mais la francophonie, elle est aussi dans les cœurs et pas dans les bureaucraties hypocrites. Pour ceux qui ont été élevés dans cette culture, c'est un capital de réflexion et de beauté qui peut nous enrichir et qui, associé à tous les autres trésors de notre tradition juive, nous donne une plus profonde ouverture à l'universel. J'étais hier au centre culturel français de Tel Aviv pour une réunion avec l'Union des Etudiants Juifs de France. Je m'y suis senti chez moi. Vous devez vous y sentir chez vous.
Mais la francophonie en Israël, c'est aussi la possibilité pour les francophones d'accéder aux aides, à l'accompagnement, aux manifestations culturelles qui leur sont spécifiques dans la proportion de leur représentation.
Je rends ici hommage aux organisations francophones, aux hommes et aux femmes qui, en Israël et aussi en France démultiplient les efforts de l'Agence Juive dans ce domaine. Pour la France, je pense en particulier à l'AMI et aux initiatives que prend le Consistoire. Mais la nécessité existe de renforcer et de fédérer ces efforts de solidarité dans le cadre d'un Mouvement unifié à l'intérieur d'Israël. Toutes les bonnes volontés doivent converger dans une optique ouverte sur tous les secteurs de la communauté francophone, quelles que soient les implications personnelles politiques ou religieuses. Des interlocuteurs communautaires locaux travaillant en synergie sont un préalable important dans la meilleure intégration des olim, sujet fondamental pour tous, car les phénomènes de yerida et de frustrations, souvent occultés sont des échecs humains personnels, mais aussi communautaires.
L'ambassadeur Nissim Zvili qui fut l'extraordinaire représentant d'Israël en France pendant les années dures de l'Intifada a accepté d'aider à cette réflexion.
Je me réjouis particulièrement de cette initiative, en tant que Président du CRIF. Nous n'avons ici aucun objectif de pouvoir. Nous sommes simplement heureux d'aider à tout ce qui va dans le sens de l'unité, du travail en commun dans le respect des différences, dans l'ouverture au monde et l'affirmation claire de nos valeurs. Il n'y pas d'énergie à perdre sur les conflits d'individus.
C'est sur ces bases que le CRIF a été fondé et c'est sur ces bases que je continuerai à le mener.
Dans toute fête, il y a place pour des moments de tristesse: je voudrais dire notre émotion devant le terrible accident qui a coûté la vie à ces deux enfants sur la route d'Eilath et à la détresse de leur père qui en est l'auteur involontaire.
Je voudrais aussi rappeler la mémoire de mon respecté ami le Rabbin Paul Roitman, décédé hier à Jérusalem, qui fut après la guerre un éducateur hors pair du Bne Akiva et de Thora veTsion et qui a conduit de nombreux élèves à s'installer en Israël.
Et enfin, après avoir rencontré hier un autre franco-israélien, Noam Shalit, le père de Gilat, je voudrais vous rappeler de garder dans nos pensées et nos actions les soldats Shalit, Regev et Goldwasser.
Behatslaha