- English
- Français
Le CRIF qui fut notamment récipiendaire de la déclaration de repentance des Evêques de France en 1997 est soucieux depuis de longues années de maintenir une relation solide avec les chrétiens
Sa réunion annuelle s’est déroulée entre le 30 juin et le 3 juillet à Aix en Provence choisie pour marquer le 50ème anniversaire de la disparition de Jules Isaac. La « conscience indignée et le cœur déchiré » de l’historien français juif, pionnier du dialogue avec les chrétiens, fut largement rappelée.
Le CRIF qui fut notamment récipiendaire de la déclaration de repentance des Evêques de France en 1997 est soucieux depuis de longues années de maintenir une relation solide avec les chrétiens. Très actif dans ce rapprochement interreligieux, il était représenté par Stéphanie Dassa. Liliane Apotheker, membre du Comité exécutif de l’ICCJ et de la commission du CRIF des relations avec les Chrétiens a été l’architecte de la rencontre d’Aix, c’est elle qui a présidé la commission programme du colloque. Jean-Marc Chouraqui, directeur de l’Institut universitaire d’Etudes et de Culture juives partenaire de la rencontre et également membre de la commission du CRIF était présent lui aussi à Aix.
Les principaux axes de réflexion de ces trois journées d’études ont été consacrés à des problématiques comme : laïcité et pratiques religieuses, génocide et modernité, modernité et religion, liberté d’expression et blasphème.
D’autres sujets comme l’antisémitisme en Hongrie ou le caractère séculier ou non de l’État d’Israël ont été abordés durant des ateliers de travail.
Les intervenants français ont rappelé longuement que la laïcité est une invention française, qu’elle relève bien plus d’une proposition, d’un idéal, que d’un modèle.
Enracinée dans la République elle crée un espace commun de neutralité identitaire qui autorise la rencontre avec l’autre et ses différences.
Or la laïcité est vécue parfois comme un interdit comme en témoignent les difficultés auxquelles sont confrontés les établissements scolaires ou les autorités pour la faire appliquer au sein de l’espace public.
Une des idées proposées par certains des intervenants serait d’introduire un module d’histoire des religions dans le système éducatif français.
De nombreuses questions sont cependant venues bousculer le concept français : comment défendre la laïcité sans entretenir un sentiment anti-religieux ? Comment faire porter la voix des traditions religieuses ? N’ont-elles pas ont aussi un message éthique, moral et universel à diffuser dans les sociétés issues de la modernité ? La modernité peut-elle survivre sans religion ? Quelle place pour la tolérance religieuse dans une société laïque ?
L’exemple en France du dernier arrêt de la Cour de Cassation au sujet de la crèche Baby Loup a eu une forte résonnance dans le monde et est venu remettre dans l’hexagone le débat au cœur de l’actualité. De nombreux intervenants ont cité cet arrêt en exemple.
Sur la question du blasphème, l’historien Dominique Avon a cité Platon qui dans la République proposait un contrôle sur les poètes de la Cité, particulièrement pour les passages concernant les dieux et les Héros...Vieille antienne qu’il faut pourtant s’attacher à définir avec précision et en fonction de chacune des traditions en n’omettant point d’interroger son corollaire ; la liberté d’expression. Le Pr Liliane Vana a posé une problématique fort pertinente : ne cherche-t-on pas de nos jours à protéger l’individu et sa croyance plutôt que les croyances ? L’individualisation de la société encourage cette attitude alors que tout prouve qu’il est urgent de trouver des dénominateurs communs qui protègeraient croyants et croyances.
Ces questions sans solution immédiate demandent une réflexion permanente tant elles renvoient de manière systématique à l’humaine condition et à la consolidation du lien social. Éducation, politique, dialogue et donc bonne volonté restent les mots clés pour affronter le défi que tous rencontrent, français ou non : Comment faire société ? Comment mieux vivre ensemble ?
Parmi les deux cents participants présents à Aix-en-Provence pour approfondir ces débats on comptait une centaine de Français et une centaine de ressortissants du monde entier, de très nombreux laïcs, mais aussi des représentants du clergé catholique dont Mgr Jordy, Mgr Dagens, Mgr Beau et le Père Patrick Desbois, des Églises orthodoxes et de nombreux pasteurs, parmi eux Florence Taubman présidente de l’AJCF. Toutes les interventions de ces trois jours d’études seront prochainement diffusées sur le site de l’ICCJ http://www.iccj.org/ et de l’AJCF http://www.ajcf.fr/
S.D.