Le CRIF en action
|
Publié le 26 Novembre 2012

Le CRIF a rencontré M. Vincent Peillon, le ministre de l’Éducation nationale

 

Mardi 20 novembre, une délégation du CRIF, dirigée par son président Richard Prasquier, accompagné de Mme Josiane Sberro a été reçue par Monsieur Vincent Peillon Ministre de l’Éducation nationale au Ministère de l’Éducation nationale.

Nous tenons à remercier vivement Monsieur le ministre pour l’intensité et la rigueur de l’échange

 

Cette réunion, fournie sur le plan des contenus et plus longue que prévu, fut une réelle rencontre.

 

Un ministre issu du sérail, maitrisant parfaitement la problématique tant  matérielle que psychologique et humaine de ce secteur source de rigidités et de tensions  sociétales. Une écoute réelle et attentive qui a permis d’approfondir les échanges dans un climat chaleureux et confiant, dont nous tenons à le remercier.

 

Nous avons pu aborder  sans réserve aucune, les problèmes de fond concernant l’enseignement et l’éducation. Problèmes structurels ou  problèmes inhérents à la scolarité fluctuante des enfants de la communauté en fonction des événements et des secteurs.

 

1) Problèmes éducatifs particuliers aux enfants  juifs

 

Le constat est évocateur : un grand nombre d’enfants juifs ont par la force des choses quitté l’Éducation nationale au profit  d’écoles confessionnelles. La plus grande partie d’entre eux le fait pour des raisons identitaires ou religieuses ; une fraction le fait cependant à la suite d’expériences douloureuses de rejet ou de violence vécues à l’Éducation nationale.

 

Certains de ces enfants rejetés du système officiel sont issus de familles traditionnalistes, parfois même agnostiques.

 

Cette sectorisation par souci de protection ne favorise-t-elle pas le fléau reconnu du moment : le « communautarisme » ?  Les parents soucieux du bien-être et de la sécurité de leurs enfants peuvent-ils courir le risque en certaines circonstances de les abandonner à la solitude et à la violence des cours de récréation ?

 

- Choix difficile pour certaines familles françaises juives coutumières du respect intégral des Lois de la République - préconisé par les textes religieux- et de l’identité réservée au cercle familial. Se couper de l’éducation « nationale » est souvent vécu comme un pis allé, car cela revient à couper l’enfant de son milieu ambiant naturel.

 

- Choix d’autant plus délicat pour ces familles que, au nombre croissant des demandes d’inscriptions et faute de moyens, les écoles confessionnelles ne peuvent toutes offrir à leur public les conditions de qualité et d’ouverture indispensables à préparer l’avenir des enfants qui leur sont confiés.

 

- L’obligation de protection pour ces enfants revient à créer parfois une nouvelle ségrégation involontaire, mais bien réelle : Les enfants juifs des secteurs les plus démunis, vivent au quotidien les difficultés les plus grandes, car violemment ostracisés dans un environnement hostile et sans pitié.

 

- Dans ces mêmes secteurs, les écoles confessionnelles, souvent mises à genoux par le nombre de demandes et les besoins d’aide matérielle, ne peuvent remplir les conditions d’une éducation prometteuse. Ces enfants à la dérive méritent une attention particulière de « l’enseignement public ».

 

Ici plus qu’ailleurs et en priorité, l’Éducation nationale se doit de leur offrir des conditions viables et sécurisées pour leur maintien au sein de l’école pour tous, c'est-à-dire au cœur de la Nation.

 

Nous soulevons enfin les problèmes des nombreux programmes déviants voir pervers, source de rejets et de conflits intercommunautaires, qui ont provoqué souvent sans résultat, la colère et l’action d’associations militantes. Sont évoqués en vrac : livres de français ou d’histoire, portes repeintes à Naplouse, pierres d’Auschwitz déposées à Djénine, pièce de théâtre incongrue, le catalogue est consternant.

 

Décision est prise d’un contact défini vers lequel désormais tous ces projets douteux seront dirigés. La décision est clairement affirmée de les suivre de façon attentive et rapide.

 

2) Problèmes internes à l’Éducation nationale source de dysfonctionnements 

 

De plus en plus d’enseignants se plaignent de situations conflictuelles avec leurs chefs d’établissements. En tant qu’ancien chef d’établissement nous faisons remarquer au ministre, que l’ouverture du Concours de recrutement aux différents corps est à l’origine de bien des incompréhensions et des conflits internes à la communauté éducative.

 

Cette situation nouvelle est souvent source de frustrations pour des enseignants parfois très spécialisés, qui ne peuvent trouver un terrain d’échange pédagogique réel auprès de leur direction.

 

La formation de ce nouveau corps semble donner plus d’importance à la gestion et au Droit administratif qu’à la pédagogie et à la relation privilégiée « enseignant enseigné ».

 

En cours de formation, quelle place accorde-t-on à la maitrise de la relation avec des populations de plus en plus diversifiées, de situations familiales complexes, à la protection d’un corps enseignant soumis à la violence du geste, du verbe  de l’élève et souvent au mépris des familles.

 

Cette remarque semble trouver un écho attentif à la réflexion du ministre.

 

Le ministre affirme alors sa volonté de soutenir avec conviction le corps enseignant face à ces débordements qui prennent de l’ampleur. Les problèmes seront examinés au cas par cas et seront réglés avec une fermeté affirmée. Voilà qui redonnera confiance et stabilité à bien des équipes en souffrance.

 

Nous soulevons également les problèmes relatifs à la gestion catastrophique des programmes LCO (langues et cultures d’origine). Il s’agit de l’obligation faite à enseigner aux enfants étrangers leur langue d’origine.

 

Les locaux de l’éducation nationale sont mis à disposition sans aucun droit de regard sur les enseignants recrutés. C’est ainsi que lors du rapprochement des familles en 74 sont arrivées des cohortes de « professeurs-imams-wahhabites » qui ont largement contribué à islamiser des populations jusque-là simplement traditionalistes.

 

Islamisation brutale source en partie des heurts intercommunautaires de banlieues.

 

Le rapport Obin avait signalé ce risque sans écoute ni résultat en 2005.

 

Nous abordons  le problème des formations les plus négligées par l’état : la formation professionnelle qui n’est plus à la hauteur des exigences du monde de l’emploi.

 

Suppression du BEP, remplacement de Bac pro de pâtissier-confiseur-chocolatier mine d’or du savoir faire à la française par un Bac pro de pâtissier boulanger de grande surface.  Est-ce bien réaliste ?

 

De l’abandon (directive européenne) de la formation professionnelle initiale pour les élèves en difficulté des sections spécialisées, jetant chaque année en fin de scolarité 110 000 enfants sans certifications ni diplômes, voués au chômage à la déclassification sociale et donc à l’agressivité la haine et la violence est-ce une juste évaluation ?

 

Bien d’autres spécificités et erreurs du système sont abordées en un dialogue réel et confiant.

 

Ces manques de l’Éducation nationale concernent les enfants de la communauté nationale et ceux de la communauté juive en particulier :

 

Une école harmonieuse où enseignants et enseignés ont des projets, un avenir, un vouloir-vivre commun, ne peut accepter de jeter à la rue les auteurs des manifestions violentes de 2005 et vouer les enfants juifs à l’école confessionnelle, sans se poser plus de questions sur ses responsabilités.

 

Le problème de l’Éducation nationale autrefois « Enseignement public » est un problème prioritaire qui nous concerne tous et ne saurait être traité de façon particulière sous un simple aspect communautaire.

 

Le bien-être et la réussite de nos enfants au sein de la nation, ne peut relever de notre seule préoccupation. Il est le problème de la Nation de sa cohésion future et de sa réussite, nous avons le devoir de nous en préoccuper au sein d’une collectivité rassérénée et unie.

 

Au terme de cette rencontre, nous tenons à remercier vivement Monsieur le Ministre pour l’intensité et la rigueur de l’échange, pour l’espoir perçu, d’une écoute plus attentive et proche du terrain de l’avenir de nos enfants quelle que soit leur couleur leur origine, leur foi.

 

Merci Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale.

 

Josiane Sberro