Editorial du président
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Publié le 1 Septembre 2011

CSA et Sud Radio, un éditorial de Richard Prasquier

Sud Radio a reçu de la part du CSA, réuni en urgence en huis clos, une mise en demeure de veiller à « ne pas encourager des comportements discriminatoires ». Il s’agit d’une mesure inhabituelle et grave dans la hiérarchie des sanctions du CSA, particulièrement significative pour une station qui avait obtenu il y a très peu de temps de la part de ce même CSA l’attribution d’une fréquence rare et convoitée pour émettre d’Ile de France. Il faut féliciter les organisations (BNVCA en particulier) qui ont attiré l’attention sur l’émission « Liberté de parole » du 22 août 2011, dans laquelle une auditrice a exprimé à l’antenne les stéréotypes habituels sur le « puissant lobby juif » qui soutiendrait DSK, sans que d’aucune façon l’animateur de l’émission (Eric Mazet) lui fasse la moindre remarque sur le caractère antisémite de ses paroles. Bien au contraire c’est ce dernier qui de façon répétée avait poussé les auditeurs à s’exprimer sur le « lobby juif » après avoir trouvé « très forts » les propos d’un auditeur du matin qui avait vomi ces mêmes clichés à l’antenne, mais avait été bloqué par Robert Ménard dont le comportement en l’occurrence avait été impeccable.



On sait que la haine antisémite s’exprime sans frein sur Internet. De nombreux sites ont à l’occasion de « l’affaire DSK » repris les thèmes éculés du pouvoir juif, de l’argent juif, de la sexualité juive et de la solidarité juive ( ce dernier ayant d’ailleurs parfois une certaine connotation admirative….). On sait aussi de longue date que donner de la publicité à une phraséologie aussi nauséabonde a sur le public un effet boule de neige désastreux. C’est pourquoi il ne s’agit pas de censure, mais de prévention à l’incitation à la haine. La liberté d’expression débridée et sans contrôle peut véhiculer les pires instincts et les rendre acceptables. La limite est parfois délicate à tracer ; c’est le rôle du journaliste et de la direction d’une station responsable que de marquer les bornes. Dans le cas présent, Eric Mazet, qui par ailleurs a continuellement dans son émission, et de façon très lourde, essayé d’imposer son propre point de vue, s’est conduit de façon totalement irresponsable.
Mais, et c’est là la bonne nouvelle, l’antisémitisme n’a pas « explosé » à l’antenne. Il est plutôt rassurant d’avoir entendu la quasi totalité des auditeurs exprimer sur DSK (puisque le sujet de l’émission était : « DSK est-il respectable ? ») des opinions diverses mais où le facteur juif n’intervenait pas. Il ne faut pas oublier que la France est aussi ce pays qui a accordé à Dominique Strauss Kahn, qui n’a jamais caché, c’est le moins qu’on puisse dire, son origine juive, un pourcentage d’opinions favorables exceptionnellement élevé dans les sondages d’avant mai 2011. Le déballage antisémite aurait dû rester dans les poubelles du Net. Pour donner du sel à sa médiocre prestation professionnelle, voilà qu’un journaliste essaye de l’en sortir….
M. Eric Mazet sait-il seulement que le titre de son émission « Liberté de Parole » est terriblement proche de celui du journal antisémite le plus célèbre de l’histoire française : la « Libre Parole » de Edouard Drumont ?
Richard Prasquier,
Président du CRIF
Photo : D.R.