2° L'absence de domicile stable pose des problèmes administratifs et pratiques particuliers, et le carnet de circulation est souvent vécu comme discriminatoire. La législation française est à l'égard des gens du voyage plus favorable que celle d'autres pays (obligation d'aires communales aménagées), mais cette législation n'est pas partout appliquée de façon satisfaisante. Les tsiganes ne sont pas impliqués dans les expulsions actuelles, mais ils subissent gravement les effets de la confusion du discours et ils se sentent évidemment solidaires des Roms qui sont de la même origine qu'eux et forment un seul peuple. Le CRIF entretient des relations avec l'UFAT (Union française des Associations Tsiganes). Il lui a exprimé son entière solidarité et doit rencontrer son bureau prochainement.
3° Quant à ceux qu'on appelle aujourd'hui les Roms (ce qui signifie "homme" et finit par erreur par devenir "d'origine roumaine"), ils sont citoyens européens, et donc ont le droit de libre circulation en Europe. Un "certain nombre d'entre eux" poserait un problème de mode de vie, d'origine de ressources et de délinquance. La France et l'Italie sont les deux pays où les Roms sont venus en plus grand nombre ces dernières années. La législation européenne permet de reconduire à la frontière les étrangers européens qui après un certain temps de présence ne justifient pas de moyens de séjour. Elle leur permet d'ailleurs aussi de revenir.
4° Il y a eu depuis un mois environ 700 Roms reconduits à la frontière, dont, dit le gouvernement, environ 600 de façon volontaire et tous de façon conforme à la loi. Il y aurait eu l’an dernier environ 8 000 Roms expulsés, ce qui montre une stabilité et non une explosion quantitative de ces mesures. Les Roms ont été conduits en avion, avec compensations financières, dans un pays, la Roumanie, dont ils sont les citoyens, et qui est membre de l'Union européenne avec tout ce que cela comporte comme garanties légales. Une comparaison avec les conditions et les conséquences des rafles de Juifs pendant la guerre et leur déportation vers les camps de la mort est donc particulièrement inappropriée, pour utiliser un terme neutre.....Elle relève au mieux de l'ignorance, au pire de la mauvaise foi.
5° Il y a depuis des années un problème grave de discriminations, de mise à l'écart, d'hostilité et parfois de violences envers les Roms dans divers pays européens où ils se trouvent, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Union européenne. L'Union européenne doit s'appliquer à résoudre cette situation sur son territoire, et notamment à contrôler mieux qu’elle ne le fait actuellement l’utilisation par les pays récemment admis des ressources importantes allouées à l’intégration nationale des minorités locales. Ce problème a pris un tour aigu, mais prévisible, avec l'entrée de la Roumanie dans l'Union.
6° Il serait choquant que le discours politique paraisse fustiger une population particulière alors que tout délinquant doit faire l'objet d'un examen individuel sous contrôle de la Justice. Il serait particulièrement déplorable que cela soit fait dans un objectif populiste ou électoraliste. Cependant, s'il y a des poches de délinquance plus fréquentes dans une population donnée il faut le dire et s'acharner à trouver les moyens d'y pallier sans stigmatiser la population dans sa globalité. Ne pas le faire relève de l'hypocrisie politiquement correcte qui pose une chape de plomb insidieuse sur nos sociétés de liberté. Mais la France doit veiller à garder ses traditions d'accueil et d'ouverture. Aucun groupe ne doit être livré en pâture à la vindicte publique.
7° En effet, lorsqu'une communauté est visée par le débat public, quelles que soient les intentions des uns ou des autres, peuvent se déclencher des surenchères réactionnelles. Les juifs ont hélas bien connu ce type d'engrenage et savent que personne ne le maîtrise vraiment. Sur ce sujet sensible, touchant à l’essentiel du « vivre ensemble », le CRIF sera particulièrement vigilant.
Photo : D.R.