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Faudrait-il in fine refuser aux enfants toute éducation religieuse au prétexte de les influencer spirituellement de façon peut-être définitive sans leur demander leur avis ? Mais ne faudrait-il pas non plus interdire pour rétablir l’équilibre toute propag
L’affaire provient d’une circoncision effectuée sur un enfant musulman de quatre ans chez qui le geste avait été suivi d’hémorragie. La famille n’a pas été condamnée, mais il n’en sera pas de même la prochaine fois qu’une affaire analogue viendra devant les tribunaux de ce district, car suivant la justice allemande le fait qu’une décision judiciaire soit connue du public, et celle-ci l’est évidemment désormais, influence la décision qui est prononcée à l’égard des contrevenants.
Il n’est pas utile dans cette Newsletter d’expliquer ce que signifie la circoncision dans le judaïsme, marque essentielle de l’Alliance. Les responsables religieux le feront bien mieux que moi. Chacun d’entre nous connaît l’importance de cet acte.
On peut remarquer, mais finalement ce n’est pas tout à fait l’angle qui a été suivi par la cour de Cologne, que sur le plan médical l’ensemble des avantages de la circoncision, même s’il y a polémique à ce sujet, est largement supérieur (prévention de cancers masculins et féminins, propagation du Sida..) à ses risques, exceptionnels si le geste est effectué par des professionnels compétents.
On peut aussi remarquer que s’il y a eu dans le passé un danger dans la circoncision, c’était le risque de se trouver identifié comme Juif à l’époque où les antisémites et singulièrement les nazis étaient au pouvoir. Ceux qui cherchaient à se cacher sous des identités « aryennes » en savaient quelque chose, notamment en Pologne. J’aurais préféré que ce genre de décision et de considération juridique ne fût pas émis par une cour allemande.
Et maintenant ?
Il y a discussion en Allemagne sur l’étendue géographique de la validité de la décision judiciaire, qui n’est pas susceptible d’appel. Elle pourra être utilisée à titre jurisprudentiel par des tribunaux d’autres ressorts judiciaires. La remise en cause par la Cour suprême de Karlsruhe risque de prendre plusieurs années. C’est pourquoi on pense que le vote d’une loi au Bundestag serait la meilleure solution. Cela prendrait évidemment du temps également. Les traditions de l’Islam n’imposent pas une date très précise pour la circoncision. Chez les Juifs, c’est en général au huitième jour…..
C’est dire que la décision du tribunal de Cologne est préoccupante. La circoncision pour motifs religieux est déjà interdite en Suède, ce qui a entrainé une floraison hypocrite de prétextes médicaux (phimosis…), mais aussi de voyages à l’étranger, lesquels pourraient d’ailleurs eux-mêmes être soumis à poursuites. A terme cette situation n’est pas tenable et ne peut qu’entrainer le départ de la communauté juive et peut-être celui de la communauté musulmane. Est-ce cela qui était anticipé par les juges de Cologne?
Faudrait-il in fine refuser aux enfants toute éducation religieuse au prétexte de les influencer spirituellement de façon peut-être définitive sans leur demander leur avis ? Mais ne faudrait-il pas non plus interdire pour rétablir l’équilibre toute propagande anti-religieuse, quelle qu’elle soit.
L’être humain n’est pas une tabula rasa sur laquelle il déposerait lui-même, les ingrédients dont il veut se servir après les avoir expérimentés en toute spontanéité et réflexion personnelle dans un marché ouvert des idées. Nous sommes aussi construits sur une tradition qui nous forme et nous informe. Les théories du « bon sauvage » ont fait long feu depuis longtemps. Il faudrait l’expliquer aux juges de Cologne.
Richard Prasquier
Président du CRIF