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Publié le 11 Mai 2020

France - Déconfinement : loi d'urgence sanitaire, port des masques, chomâge partiel ... Explications.

Le Conseil constitutionnel ne rendra son avis que ce lundi sur cette loi adoptée samedi par le Parlement. Cela repousse l’entrée en vigueur de deux dispositions phare du déconfinement : la limitation des déplacements à 100 km et l’attestation obligatoire dans les transports en commun.En attendant, l’exécutif en appelle à la « responsabilité des Français » pour la limitation des déplacements et l’utilisation des transports en commun.

Publié le 11 mai dans Le Monde

 

Depuis minuit lundi 11 mai, c’est une forme de libération pour des millions de Français. Après cinquante-cinq jours de confinement strict sur l’ensemble du territoire, la France autorise à nouveau certains déplacements, et la réouverture de la plupart des commerces. Mais ce n’est qu’une reprise partielle de l’activité, et les appels à la prudence se sont multipliés à la veille du déconfinement, sur fond de crainte d’une seconde vague. Surtout, ce déconfinement débute avec un raté de taille pour le gouvernement : la loi d’état d’urgence sanitaire n’a pas été promulguée à temps.

  • Certaines règles en suspens au premier jour du déconfinement

C’est un coup dur pour le gouvernement, et un couac que ses adversaires politiques ne manqueront pas de souligner : la loi d’état d’urgence sanitaire, soumise à l’aval du Conseil constitutionnel, n’a pas pu être promulguée à temps pour le début du déconfinement. Dans un communiqué commun, l’Elysée et Matignon expliquent que le Conseil constitutionnel, saisi par Emmanuel Macron notamment, ne rendra finalement son avis que lundi sur cette loi d’urgence adoptée samedi par le Parlement. Ce qui repousse à lundi soir, sous réserve de cet aval, l’entrée en vigueur de deux dispositions-phares : la limitation des déplacements à 100 km du domicile et l’attestation obligatoire dans les transports en commun.

Face au risque de voir de nombreux citoyens en profiter pour parcourir des centaines de kilomètres, l’exécutif fait appel « au sens de la responsabilité des Français », et rappelle : il était « en tout état de cause prévu que les nouvelles mesures devaient faire l’objet d’une période de tolérance ». Le défaut de pouvoir présenter l’attestation d’employeur demandée pour emprunter les transports en commun d’Ile-de-France entre 6 h 30 et 9 h 30 et entre 16 heures et 19 heures ne devait ainsi être verbalisé qu’à partir de mercredi.

Pour ce qui est des autres mesures du déconfinement, elles vont entrer en vigueur dès lundi matin, puisque, « compte tenu de ces circonstances exceptionnelles », un décret temporaire a été publié au Journal officiel lundi pour les faire appliquer avec effet immédiat. Il s’agit de la fin des limitations des sorties du domicile, de l’obligation du port du masque dans les transports en commun, de la réouverture des commerces à condition du respect des gestes barrières et de la distanciation et de la limitation à 10 personnes des rassemblements dans les lieux publics.

  • La crainte d’une seconde vague

Le confinement drastique et inédit d’une bonne partie de la population a porté ses fruits, avec un bilan quotidien des décès retombé dimanche soir à 70 morts, son plus bas niveau depuis la mise sous cloche du pays, le 17 mars. Le bilan s’élève toutefois à au moins 26 380 décès, et les principaux responsables ont multiplié les appels à la prudence et au bon sens. Le ministre de la santé, Olivier Véran, a ainsi averti sur TF1 : « Nous n’en avons pas terminé avec le virus. Nous allégeons les conditions du confinement, mais la vie ne peut pas reprendre comme elle était auparavant. »

L’apparition de trois nouveaux foyers en Nouvelle-Aquitaine et en Vendée, zones classées en « vert », incite plus que jamais à la prudence. D’autant que l’un d’eux a été identifié dans un collège (où des personnels s’étaient réunis pour préparer la rentrée) et un dans une entreprise. « Dans ces zones dites vertes, il faut considérer que le virus est là. Il est en embuscade, il circule », a alerté dimanche la professeure Anne-Claude Crémieux, infectiologue à l’hôpital Saint-Louis à Paris. Et l’absence de traitement ou de vaccin incite à la vigilance : « Malheureusement, l’évolution de l’épidémie est extrêmement incertaine à ce jour et c’est l’avenir qui nous permettra de trancher », a-t-elle dit.

« Nous rentrons dans un monde qui est nouveau, dans lequel il faut que nous apprenions à conjuguer activité économique, travail et circulation du virus, et le succès de ce défi que nous avons à relever, il dépendra de chacun d’entre nous », a affirmé lundi le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, sur BFM Business.

  • Prérentrée pour les enseignants

Dans l’autre dossier explosif, les écoles, la journée de lundi doit permettre une prérentrée des professeurs pour organiser la reprise, les élèves n’étant attendus qu’à partir de mardi, voire plus tard selon les communes, avec des règles sanitaires drastiques.

« Quatre-vingt-cinq pour cent des écoles sont prévues pour rouvrir lundi (…) Un million d’enfants vont retrouver le chemin de l’école, les conditions sanitaires sont réunies », a assuré le ministre de la santé, Olivier Véran. Le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, souhaite que tous les enfants aient pu retrouver « au moins une fois » leur école d’ici à la fin de mai, déclare-t-il dans une interview au Journal du dimanche.

  • Port du masque et inquiétudes persistantes

Dès lundi, le masque devient le sésame obligatoire dans les transports publics. A compter de ce jour, l’Etat met « 10 millions de masques à disposition des opérateurs de transport », destinés aux usagers, dont 4,4 millions pour la région Ile-de-France, selon Christophe Castaner. A Paris, la mairie a ouvert des inscriptions en ligne pour obtenir gratuitement un masque en tissu réutilisable auprès de « pharmacies volontaires », sans toutefois donner beaucoup de précisions sur les modalités pratiques.

La journée de reprise se déroule « correctement » pour l’instant, a assuré lundi matin Jean-Baptiste Djebbari sur CNews. Le secrétaire d’Etat aux transports s’est aussi réjoui de constater que « quasiment 100 % des personnes portent des masques » dans les transports en commun. Seulement « 5 % des personnes qui se présentent n’ont pas de masques ». « C’est un motif de satisfaction indéniable de voir que le port du masque est bien respecté », a expliqué le secrétaire d’Etat, qui explique que les distributions de masques de lundi matin dans les transports en commun franciliens ont eu lieu « dans de bonnes conditions ». Pour ce qui est du trafic routier et des trains grandes lignes, « on a un trafic réduit », a-t-il déclaré, avant de souligner que « c’était attendu ».

Les craintes semblent largement partagées par ceux qui s’apprêtent à reprendre le travail lundi : 53 % disent avoir personnellement plus peur pour leur santé ou celle de leurs proches que des conséquences économiques de la crise, selon un sondage IFOP.

Quatre régions (Ile-de-France, Hauts-de-France, Grand-Est et Bourgogne-Franche-Comté) et 32 départements, dont Mayotte, restent classés « rouge » en raison de la circulation toujours rapide du virus et du risque de saturation des hôpitaux qu’elle entraîne.

Pour marquer cette nouvelle étape à Lille – classée en zone « rouge » – la maire, Martine Aubry (PS), a demandé et obtenu une dérogation pour la réouverture dès lundi du plus grand et principal parc de la ville, celui de la Citadelle. A l’inverse, le maire d’Ajaccio, Laurent Marcangeli, a expliqué sur Twitter que les plages de sa ville resteraient fermées encore « au moins quinze jours », faisant valoir depuis le début de la crise sa « prévoyance ».

  • Le chômage partiel va être « progressivement réduit »

La ministre du travail, Muriel Pénicaud, a confirmé lundi que le dispositif de prise en charge du chômage partiel allait être progressivement réduit, estimant que l’Etat n’avait pas vocation à continuer de payer « l’intégralité des salaires » du secteur privé. « Aujourd’hui, il y a 12,2 millions de salariés qui sont couverts par le chômage partiel », soit « six emplois sur dix du secteur privé », a déclaré Mme Pénicaud sur LCI, en assurant que ce dispositif avait permis d’éviter une vague de licenciements massifs.

Mais « aujourd’hui, les conditions de la reprise sont là. Donc il n’y a pas tellement de raison que ce soit l’Etat qui continue à payer l’intégralité des salaires de 12 millions de salariés en France », a poursuivi la ministre sur LCI. « C’est pour ça qu’on va définir, je pense dans la semaine, quelle est la part de salaire que paiera l’entreprise », a-t-elle précisé, en expliquant que ce montant n’était « pas encore décidé ». « Ce sera modeste dans un premier temps, mais progressif », a-t-elle néanmoins promis.