- English
- Français
Publié le 8 juin dans Ouest-France
Citations d’auteurs, témoignages des derniers survivants, collecte de films et journaux régionaux d’époque apportent un éclairage sur une France en fuite, vidée d’elle-même, inconsciente des enjeux dans L’Exode, le documentaire événement sur un épisode de la seconde guerre mondiale, de France 3 .
L’Exode est un mouvement de masse irréfléchi, qui jette sur les routes des Belges, des Luxembourgeois, des Néerlandais rejoints par des Français, après la percée de Sedan et lors de la bataille de France, en mai-juin 1940, cette dernière se soldant par la victoire allemande.
Emmanuelle Nobécourt, réalisatrice de L’Exode pour France 3, explique : « Le film restitue ce phénomène irrationnel, au-delà des non-dits officiels. Cette période fait partie des plaies mal cicatrisées de notre mémoire nationale ». Ce travail d’un an très complet, validé par les historiens Olivier Wieviorka et Éric Alery, recense les certitudes extravagantes d’une population désinformée.
Les Français sont sûrs d’être protégés par la ligne Maginot et l’épaisse forêt des Ardennes, que les Allemands n’atteindront jamais Paris et que franchir la Loire les mettra à l’abri… Une dizaine de survivants se souviennent de la peur lors des frappes aériennes de la Luftwaffe, de la faim, de la saleté et de la traversée des villages désertés. Les écrivains Antoine de Saint-Exupéry et Benoîte Groult ; Jean Moulin, alors préfet à Chartres, et le futur « collabo » Lucien Rebatet font renaître les événements de leur plume alerte.
L’Exode met en lumière la fuite des administrations et des médecins, jusqu’à celle du gouvernement Paul Raynaud, qui quitte la capitale en cachette le 10 juin, créant un vent de panique. Lucie Pastor, coproductrice chez Cinétévé, précise : « Nous apportons de l’inédit quant aux voyages de retour rendus difficiles dans la zone interdite et au-delà de la ligne de démarcation. Les Juifs originaires d’Alsace et de Moselle, annexées par l’Allemagne, n’ont pas le droit de revenir ».
Au total, 900 000 Français ne rentrent pas chez eux. Des Ardennais s’installent en Vendée. Un film émouvant les montre dégustant leur premier plat de mogettes. D’autres réfugiés ont tout perdu, leur maison a été pillée ou détruite.
L’émission de radio À la recherche des enfants perdus voit le jour et la presse régionale publie des avis de recherche, en vain pour les tout petits enfants. « Toutes ces familles seront culpabilisées, humiliées par le gouvernement de Vichy, qui leur reprochera d’être en partie responsables de l’effondrement du pays », conclut Lucie Pastor.
L’Exode, à 21h05 sur France 3