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Publié le 30 mars 2020 dans Le Monde
A partir du 30 mars, les quelque 20 millions d’habitants de Moscou et de sa banlieue viendront rejoindre les trois milliards d’êtres humains soumis à un confinement strict à travers la planète. L’annonce en a été faite, dimanche soir, par la mairie de la capitale russe, face à l’aggravation de l’épidémie de Covid-19.
« Le confinement sera en vigueur pour tous les résidents de Moscou, quel que soit leur âge », alors qu’il ne concernait depuis le 23 mars que les plus de 65 ans, indique un communiqué du maire de la ville, Sergueï Sobianine.
Les Moscovites ne seront autorisés à sortir de chez eux que pour se rendre au travail, descendre les poubelles, se ravitailler « au magasin le plus proche » ou dans une pharmacie, ou encore en cas de nécessité vitale. La promenade des animaux domestiques n’est autorisée que dans un rayon de 100 mètres autour du domicile.
Ces mesures prennent effet à partir du 30 mars, sans évocation d’une date de fin, et concernent également la grande région administrative qui entoure la capitale. Les accès à celle-ci ne seront pas fermés et les transports publics continueront d’y fonctionner. Dimanche soir, Sergueï Sobianine a aussi précisé que ceux qui perdraient leur emploi à Moscou à cause de la quarantaine recevraient une compensation mensuelle de 19 500 roubles (220 euros).
Cette annonce intervient après plusieurs jours de forte hausse des cas de contamination dans le pays. Selon le dernier bilan fourni dimanche par les autorités sanitaires, la Russie compte 270 malades de plus, pour un total de 1 534 cas, dont 1 014 à Moscou. Le pays a aussi enregistré huit morts liées à l’épidémie.
Cette hausse correspond à la fois à une simplification de la procédure de test, depuis une semaine, et à une progression de la maladie, potentiellement désastreuse dans un pays au système de santé très appauvri.
Les mesures prises par la ville de Moscou l’ont ensuite souvent été dans les autres régions du pays, avec quelques jours de décalage. Outre ses fonctions de maire, M. Sobianine occupe le poste de chef du groupe de travail mis en place par le Kremlin. C’est lui qui, le 24 mars, a mis en garde le président Vladimir Poutine sur le fait que le nombre de contaminations était « significativement plus élevé » que les bilans officiels et que le coronavirus était désormais « une affaire sérieuse » dans le pays.
Dans la foulée, le président russe s’était résolu à annoncer le report d’un vote prévu le 22 avril sur une réforme de la Constitution et des mesures de soutien à l’économie. Il avait aussi annoncé que la semaine du 30 mars serait chômée dans le pays, « avec maintien du salaire ». M. Poutine avait engagé les Russes à rester chez eux, mais sans évoquer de quarantaine.
La ville de Moscou avait toutefois immédiatement embrayé sur ces annonces en fermant les parcs et les cafés de la capitale, ainsi que la plupart des commerces, mais cela n’a pas dissuadé nombre de Moscovites de profiter de ce week-end ensoleillé pour se promener. L’Eglise orthodoxe s’est quant à elle montrée plus que réticente à se conformer à la consigne présidentielle.
C’est apparemment en réaction à cette désinvolture que des décisions supplémentaires ont été prises par la mairie de la capitale. Les mesures de rétorsion contre les éventuels contrevenants sont en revanche peu claires, et plusieurs voix font d’ores et déjà remarquer que M. Sobianine n’est pas fondé à prendre de telles dispositions sans déclaration d’un état d’urgence.
La mairie évoque seulement un « système intelligent de surveillance » pour vérifier l’application du confinement. Cette référence rappelle l’usage qui a été fait du système de reconnaissance faciale (plus de 100 000 caméras à Moscou) pour surveiller les personnes revenant de l’étranger et placées en quarantaine. Le site Meduza cite quant à lui l’éventuelle mise en place d’un système attribuant un code QR à chaque habitant de la ville, répertoriant son lieu de vie et un droit temporaire à sortir.
Depuis plusieurs jours, ce sont surtout les importants mouvements de troupes de la Garde nationale en ville qui ont été remarqués par les Moscovites.