Tribune
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Publié le 19 Mai 2011

Cannes touche le fond, par Sandrine Bendavid

Non, Lars Von Trier n’avait rien à dire d’intéressant sur son « Melancholia », présenté mercredi 18 mai 2011 en sélection officielle à Cannes.




En fait, Lars Von Trier (Palme d’Or en 2000 pour « Dancer in the Dark ») n’a jamais rien eu d’intéressant à dire.



Ni sur ses films, ni sur ses actrices.



Alors il insulte publiquement ces dernières en évoquant leur sexualité avec une insistance particulièrement « dérangée ».



Alors il y revient en exprimant à un parterre de journalistes abasourdis des velléités pornographiques scandaleuses.



Alors il salue les photographes avec une insulte obscène taouée sur ses phalanges, poing dressé.



Toute cette provocation, depuis longtemps démodée dans l’art si elle eut jamais un succès temporaire, serait somme toute passée inaperçue au profit d’autres réalisations et réalisateurs-trices, ô combien plus passionnés et passionnants (Naomi Kawase pour « Hazenu No Tsuki » et Xavier Durringer et sa « Conquête ») qui se sont bousculés sur le tapis rouge mercredi 18 mai, si le piètre pitre n’avait ajouté l’inexcusable au ridicule.



Devant une Kristen Dunst grimaçante de malaise et une Charlotte Gainsbourg à qui il a fait perdre un sens de l’humour pourtant à toute épreuve (pauvre papa Serge dans sa tombe…), Lars Von Trier a touché le fond.



De l’imbécilité, de l’ignominie, de sa pensée profonde.



« Je dis que je comprends l'homme », a-t-il affirmé, évoquant subitement Adolph Hitler, sans raison ni lien avec la question qui lui étaient posée. «… Je compatis un peu avec lui» a-t-il renchérit, « je ne suis pas contre les Juifs bien sur mais pas trop ... parce que Israël fait vraiment chier», a-t-il ajouté avant de conclure, « OK, I’m a nazi (d’accord, je suis un nazi)».



Peu de temps après, le réalisateur danois a publié un communiqué déclarant s'excuser sur les propos qu'il a tenus, tandis que la direction du festival s’est émue de ses propos.



Le CRIF, dans un communiqué publié ce jeudi 19 mai 2011, affirme que « Lars Von Trier n’a rien à faire dans un festival de Cannes dont une partie des participants auraient été envoyés en camp d’extermination par Hitler, cet homme pour qui il éprouve tant de sympathie. »



Photo (le poing de Lars Von Trier et son (vrai) tatouage) : D.R.