Tribune
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Publié le 14 Janvier 2009

Divisions et embarras au Conseil des droits de l'homme

L'organisme des Nations unies était plus divisé que jamais, le 12 janvier, pour condamner l'intervention israélienne. Treize Etats se sont abstenus, dont cinq Etats de l'Union européenne et la Suisse.


Au terme de cinq jours de difficiles négociations, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a adopté le 12 janvier à Genève une résolution qui "condamne avec force l'opération militaire israélienne" à Gaza. Il a par ailleurs décidé l'envoi d'urgence d'une mission d'enquête sur les allégations de violation par Israël des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Mais le Conseil a surtout été une nouvelle fois le théâtre de luttes d'influence entre groupes régionaux d'Etats.
Reflétant la réalité des rapports de forces internationaux, l'hémicycle s'est plus que jamais divisé sur la question du conflit israélo-palestinien. Et, à défaut d'un large consensus, la résolution perd l'essentiel de sa force coercitive. Trente-trois Etats, le bloc africain, les pays arabes et musulmans, l'ensemble des pays sud-américains et asiatiques représentés au Conseil des droits de l'homme (qui compte quarante-sept Etats membres) ont accepté la résolution alors que le Canada s'y opposait fermement et que le groupe européen ainsi que la Suisse s'abstenaient.
"Bien sûr, nous sommes déçus, explique Ibrahim Khraishi, l'observateur permanent de la Palestine auprès des Nations unies. Nous avons été très flexibles, mais certains Etats européens ne voulaient pas d'un consensus. Ce Conseil, les conventions de Genève, c'est juste pour le décor ?" L'ambassadeur palestinien se dit également "très déçu" par l'attitude de la Suisse. "On a parlé de toutes les remarques soulevées par la Suisse. Je n'accepte pas sa position. En tant que pays dépositaire des conventions de Genève, elle se devait de tenir un rôle particulier." La diplomatie suisse s'est en effet beaucoup activée en coulisse, effort salué par plusieurs Etats, pour toiletter le texte et le rendre acceptable par toutes les parties. Mais avant le vote, l'ambassadeur suisse auprès de l'ONU, Dante Martinelli, ne pouvait que "vivement regretter le manque d'effort pour obtenir un consensus pour une enquête impartiale sur toutes les allégations de violation des droits de l'homme" et non pas uniquement celles visant Israël comme le stipule le texte. Très loin de s'entendre sur une position commune, la paralysie des Etats de l'Union européenne, selon les termes d'un observateur, est demeurée complète et l'a contrainte à ce vote d'abstention.
Avant le vote, l'ambassadeur d'Israël, Aharon Leshno Yaar, a dénoncé le "monde de conte de fées dans lequel vit ce Conseil" alors que dans le "monde réel" aucun consensus significatif ne peut se construire sans Israël. Il a ainsi critiqué une résolution "déséquilibrée" qui ne reflète pas la réalité du Moyen-Orient et "encourage le Hamas" à persévérer. "Elle va renforcer (chez les Palestiniens) l'illusion que les résolutions de l'ONU sont la solution à leurs souffrances."
Le représentant canadien, qui a appelé au vote final, a pour sa part salué les efforts de la délégation palestinienne pour amender le texte, tout en soulignant que celui-ci ne parvenait pas à stipuler les tirs de roquettes du Hamas et s'en tenait à un langage violent contre Israël. L'ONG UN Watch a également dénoncé le caractère unilatéral de cette résolution qui "fournit la légitimité, l'impunité et un encouragement aux attaques délibérées du Hamas contre des civils".
Frédéric Koller
Le Temps reproduit par courrierinternational.com