Tribune
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Publié le 14 Décembre 2010

L’enfant «justicier» : le petit Oussama et la série Palestine, selon l’Institut français du Proche-Orient, par Marc Knobel

L’information est révélée par le site Internet de l’Institut français du Proche-Orient (IFPO), le 6 décembre 2010 (1). Selon ce site, mai 2010 a vu renaître à Damas le « jeune héros » Oussama, personnage phare de la revue qui porte son nom mais dans laquelle il n’apparaissait plus depuis la fin des années 1970. De quoi s’agit-il ? Le mensuel pour la jeunesse Oussama a été fondée en 1969 par le ministère syrien de la Culture « dans un but éducatif et idéologique », selon l’IFPO. Au lendemain de 1967, l’enjeu était de se rapprocher de la jeune génération et d’exalter chez elle le projet panarabe, le socialisme et la lutte pour la cause palestinienne.




Imaginé par Adel Abû Chanab (auteur syrien de théâtre et de nouvelles), le personnage d’Oussama a été dessiné par Mumtâz Al-Bahra, illustrateur pour la presse et la jeunesse afin d’incarner les valeurs morales et politiques de la Syrie des années 1970, et signifier aux enfants l’importance de la lutte pour la Palestine.



Dès le premier épisode et tout au long des six premières années de la revue, « les aventures du jeune héros » déclinent les différentes façons pour un enfant de participer au combat, indique l’IFPO. Sur les frontières israélo-palestiniennes, Oussama lutte aux côtés des feddayins (combattants palestiniens) qui lui donnent des missions adaptées à sa petite taille et à son jeune âge : il se glisse dans un trou creusé sous des fils barbelés pour aller déposer une bombe dans le camp ennemi, il apporte un panier piégé sur la place du marché chez l’ennemi… A chaque fois, il fait preuve de courage et de ruse pour duper le camp adverse, rapporte l’IFPO. Dans un autre épisode encore, il offre tout son argent de poche à une fatâya (jeune fille du parti socialiste syrien) qui rassemble des fonds pour soutenir les combattants palestiniens.



Après 1973, la guerre d’Octobre et l’honneur arabe « retrouvé », le jeune Oussama s’éclipse progressivement de la revue, pour disparaître tout à fait après 1975. Mais voilà qu’en mai dernier, une nouvelle équipe arrive à la direction de la revue et fait renaître le héros, symbole d’une résistance dont il incarne les formes actuelles. Il est ainsi prévu que le jeune Oussama s’engage à nouveau dans la lutte pour la cause palestinienne. Dans certains récits, il pourra être aux côtés du Hezbollah, ou encore passager d’un bateau de la « flottille pour la paix », précise l’IFPO.



Ce qui est étonnant dans cette petite chronique, c’est la manière dont l’information est transmise. Apparemment, cet article est une sorte de compte-rendu informatif. Il est relativement bien écrit et bien documenté. Mais, dans le corps du texte, nous relevons certains termes surprenants : « but éducatif », « jeune héros », « importance de la lutte pour la Palestine », « participer au combat… »
Bien évidemment, nous supposons qu’il s’agit d’expliquer aux lecteurs quel est le but poursuivi par cette publication destinée à la jeunesse et que sont les thèmes exploités. Il eut été cependant fort utile que l’IFPO ne se limita pas à un tel compte-rendu, il aurait été intéressant de remarquer quel endoctrinent est prodigué à de jeunes enfants en Syrie ; quel impact cet endoctrinement peut avoir sur de jeunes enfants, qui vont forcément s’identifier à leur jeune « héros » et quelle utilisation le ministère de la propagande et les autorités syriennes font de tout cela.
Par la même occasion, l’Institut français (rappelons-le) aurait pu s’alarmer in fine que, dans le monde arabo-musulman, il n’est pas rare de voir à quel point l’enseignement de la haine (des israéliens et des Juifs) est répandu, théorisé, et diffusé aux plus jeunes.



Note :
1) Pour savoir ce qu’est l’IFPO : http://www.ifporient.org/node/1



Photo : D.R.