« Qu’est-ce qui fait sens pour I, me, and myself »
Les incubateurs de projets, comme Bikkurim, correspondent aux besoins de la troisième et quatrième génération de juifs américains. Les jeunes « entrepreneurs » veulent s’engager dans des projets actuels, pertinents avec leur vécu, leur quotidien, leur préoccupation. Une fondation spéciale « Andréa et Charles Bronfman » a été par exemple mise en place pour financer des organisations nouvelles, ce qui reflète les préoccupations des nouvelles générations de financeurs, avec leur souhait de donner de l’argent à des organisations pertinentes pour leur existence. « What is meaningful? » « Qu’est-ce qui fait sens pour moi » ?
La génération « post-moderne » a développé un sens de l’opportunité créatrice, et non de la protection identitaire. A l’époque « ipod », les jeunes n’ont plus de patience pour les gros programmes et les longs « process » : ils aiment les « happening », les événements à forte implication.
Les organisations qui forment la « Conference of President » semblent être dépassées par ce phénomène. « Defense », « Communities relations », ce langage ne passe pas avec la nouvelle génération. On passe de la « big », « impersonal diplomacy », au souhait de participation, au potentiel de transformation de son environnement, et d’influence de son environnement sur des projets : c’est l’écosystème de l’innovation qui permet l’éclosion des projets culturel, sociaux, politique juifs pertinents.
Iconique « entrepreneur social »
Le médiateur de la transmission n’est plus seulement le témoin des événements historiques vécus ou l’intellectuel visionnaire. A côté d’eux, l’entrepreneur social redonne sens au passé en l’inscrivant dans un présent des préoccupations.
Le catalogue de projets « Slingsgot », qui regroupe les cinquante projets les plus innovants de l’année, donne une idée de la variété des champs d’investissements possibles de l’entrepreneur social.
Dans l’éducation : l’enseignement dans les écoles juives autour du pluralisme dans l’éducation,
Dans l’environnement : la promotion de la nourriture bio à travers le « matching » entre une ferme et une synagogue,…
Dans la culture, la promotion de musique juive contemporaine, l’organisation de « happening » pour la fête de Shavouot (notamment à San Francisco), la reconstruction des villes juives de diaspora sur numérique (Google).
En politique : la promotion de la place des femmes dans la gouvernance des organisations juives, un programme de dialogue avec les palestiniens complétant le « birth right », etc.
Pas de divorce : le lien entre les organisations anciennes et nouvelles
Si le « gap » générationnel existe, les moyens de lier anciennes et nouvelles préoccupations aussi. Le mentorat et l’acquisition de projets « nouvelles générations » par les anciennes organisations commencent à être pratiqués. Ainsi, le B’nai Brith International organise, à New York, des tables rondes informelles et à taille humaine où se rencontrent diplomates et jeunes actifs. Le consul de France à New York, Philippe Laillot, s’est déjà prêté au jeu, présentant aux jeunes venus partager une discussion avec lui un visage accessible. « Je préfère faire venir les jeunes actifs juifs et des diplomates pour parler face à face de projets écologiques, qu’une conférence impersonnelle sur l’éternel antisémitisme », indique ainsi Harriet Mandel, à l’origine du projet des «tables rondes globales », à New York.
Et en France ?
La première organisation qui en France a adopté cette methode fut « Ezra Venture », formée par un groupe de Français et d’Américains travaillant entre Paris et San Francisco dans le domaine des hautes technologies. « Ezra Venture » finance seulement un projet par an, mais le nombre de dossiers déposés ne cesse d’augmenter.
Le « Ariane de Rothschild Fellowship » s’est, lui, spécialisé dans la promotion des entrepreneurs juifs et musulmans avec un intérêt pour le dialogue interculturel.
Le CRIF, pour sa part, prend connaissance des nouveaux projets émergeants en France et peut les plébisciter comme faisant parti intégrante, et preuve, d’une communauté vivante.
On entend déjà parler de « René Cassin France »… A suivre.
Eve Gani