Tribune
|
Publié le 10 Mai 2011

La faute: Hessel dans Pote à Pote, par Marc Knobel

Pote à Pote est la revue trimestrielle de la Fédération Nationale des Maisons des potes, proche de SOS Racisme (1). Ce mensuel est distribué par abonnement et selon le site Internet de la Maison des potes, les abonnés sont des associations locales, des institutions, des collectivités territoriales et des particuliers. Or, dans son dernier numéro trimestriel (n° 130, janvier-février- mars 2011), Pote à Pote publie une interview surprenante de Stéphane Hessel.




Deux questions portent plus précisément sur la campagne dite de BDS dont l’objectif –rappelons le- vise les citoyens israéliens (universitaires, chercheurs, sportifs, cinéastes, écrivains) et produits provenant des compagnies israéliennes (nouvelles technologies, fruits et légumes, couches et lingettes pour bébés, cosmétiques, livres, films, spectacles de danse et musicaux, œuvres d'art, médicaments…). Dans cet entretien, Stéphane Hessel prétend étrangement qu’il n’adhère pas « à proprement parler à la campagne BDS », alors que, pourtant, il n’a pas cessé de soutenir le boycott d’Israël et le BDS. Prenons deux exemples. Dans un texte publié le 15 juin 2010 par le Huffington Post, « Les Citoyens du monde doivent réagir là où les gouvernements ont échoué », Stéphane Hessel a accordé au BDS le satisfecit suivant : « Je crois que l’initiative BDS est une stratégie morale qui a démontré son potentiel de réussite », écrit-il. Rappelons également que dans l’édition du 11 janvier 2011 du quotidien Le Monde, Stéphane Hessel n’a pas hésité à maintenir cette position : « La campagne de boycott BDS me semble largement justifiée, aussi bien en France que dans d'autres pays, par exemple en Angleterre, par la violation que l'État d'Israël commet en occupant illégalement des colonies en Cisjordanie et en faisant passer les produits de ces colonies comme produits venant d'Israël. » (2). Nous le voyons ici, Israël est la cible unique d’un boycott inique défendu par M. Hessel, qui -écrivons-le encore une fois- a fait de la détestation d’Israël une véritable obsession.



Ensuite, dans l’entretien qu’il accorde à Pote à Pote, Hessel affirme que les militants du BDS ont « parfaitement le droit d’exprimer leur position » mais qu’il est « en tout cas inadmissible de les mettre devant des tribunaux sous prétexte qu’il s’agirait d’une antisémite ou discriminatoire. »



Seulement voilà : n’en déplaise à Stéphane Hessel, le BDS est en fait une provocation à la discrimination en raison de la nationalité, délit puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende par l'article 24, alinéa 8 de la loi du 29 juillet 1881. Et, si elle est suivie d'effets, les articles 225-1 et 225-2 2° du Code pénal prévoient des peines pouvant aller jusqu'à trois ans d'emprisonnement (3).



Enfin, dans l’interview qu’il accorde à Pote à Pote, Stéphane Hessel réaffirme son engagement et sa participation au tribunal Russel. Or, le Tribunal Russell sur la Palestine est un tribunal d'opinion, fondé en mars 2009. Ses promoteurs sont Ken Coates, président de la Fondation Bertrand Russell pour la Paix, Nurit Peled, une israélienne enseignant à l'Université hébraïque de Jérusalem, et Leila Shahid, déléguée générale de l'Autorité Palestinienne auprès de l'Union Européenne. Ce tribunal comminatoire, a été inauguré en présence de Stéphane Hessel. Son objectif affiché : « réaffirmer la primauté du droit international ». En réalité, les membres du tribunal Russel condamnent systématiquement Israël. D’où cette question : pourquoi absolvent-ils donc le Hamas, qui prône pourtant la destruction de l’Etat d’Israël et la liquidation de son peuple ? Drôle de tribunal, que voilà (4).



Dernier point. Nous rappellerons à Samuel Thomas, président de la Fédération Nationale des Maisons des Potes et au magazine Pote à Pote, la position de l’actuel Président de SOS Racisme, contre le boycott d’Israël.



En effet, Bernard-Henri Lévy, Patrick Klugman, Bertrand Delanoë, François Hollande et d’autres personnalités (5) avaient signé une importante tribune, dans Le Monde du 1er novembre 2010. Ils écrivaient qu’ils sont précisément contre le boycott d’Israël et pour la paix, et précisément, contre le boycott parce qu’ils sont pour la paix (6).
Est-ce là le cas de Stéphane Hessel?



Notes :



1) Sur cette fédération, voir notamment : http://maisondespotes.free.fr/federation.htm.



2) Stéphane Hessel : "Je ne me considère ni comme un sage ni comme une icône", Le Monde, 11 janvier 2011.



3) Comme le rappelle très justement Maître Michaël Ghnassia, l'objet de cette campagne de propagande n'a finalement pour but que de réduire une nation, composée d'individus aux opinions et aux engagements aussi différents que ceux qui peuvent exister en France, en un unique ennemi désincarné et sans humanité : l'"Israélien" ou le " sioniste ". Aujourd'hui, selon la campagne BDS, les Israéliens ne méritent plus aucune considération en tant qu'individu car ils sont chacun d'eux l'incarnation du "colon raciste". Demain, ce seront les "sionistes" du monde entier qu'il faudra boycotter comme étant les complices des Israéliens. In « Le boycott d’Israël : que dit le droit ? », Les Etudes du CRIF, janvier 2011, n° 19, 31p.



4) Le 27 avril 2011, le leader du Hamas, Mahmoud al-Zahar, qui a participé aux discussions, a insisté sur le fait que « la paix avec Israël n'est pas envisagée ». «Notre programme ne comprend pas les négociations avec Israël ou la reconnaissance de cet Etat», a déclaré Zahhar au Caire.



5) Yvan Attal, comédien ; Pierre Arditi, comédien ; Georges Bensoussan, historien ; Michel Boujenah, comédien ; Patrick Bruel, comédien et chanteur ; Pascal Bruckner, essayiste ; David Chemla, secrétaire général de JCALL, Bertrand Delanoë, maire de Paris ; Frédéric Encel, géopolitologue ; Alain Finkielkraut, philosophe ; Patrick Klugman, avocat ; François Hollande, député (PS) de Corrèze ; Georges Kiejman, avocat ; Anne Hidalgo, première adjointe au maire de Paris ; Bernard-Henri Lévy, philosophe ; Mohamed Sifaoui, essayiste ; Yann Moix, écrivain ; Bernard Murat, directeur de théâtre ; Jean-Marie Le Guen, député ; Pierre Lescure, directeur de théâtre ; Serge Moati, journaliste ; Daniel Racheline, vice-président de JCALL ; Arielle Schwab, présidente de l'UEJF ; Dominique Sopo, président de SOS-Racisme ; Gérard Unger, président de JCALL ; Manuel Valls, député-maire d'Evry ; Michel Zaoui, avocat.



6) Cet article peut-être consulté sur le site Internet du CRIF :



Photo : D.R.