Dans la liste désormais riche des applications que va permettre la nanotechnologie, on distingue trois catégories : les produits déjà disponibles, les produits à apparition imminente et les projets qui aboutiront dans la décennie en cours. Dans la première catégorie, on peut citer les disques durs à base de magnétorésistances géantes formées de couches magnétiques multiples en nanostructure, les crèmes solaires à base de nanoparticules qui absorbent les rayons ultraviolets, les lasers, les modulateurs et les amplificateurs de télécommunication, les périphériques informatiques.
Dans la deuxième, les sources d'énergie renouvelable à l'aide de meilleures techniques photovoltaïques, les technologies d'affichage électronique, le verre à revêtement résistant aux égratignures, toutes sortes de matières plus dures, plus légères et plus solides, les labos « sur puces », les appareils électroniques à structure quantique et les appareils photoniques avancés de télécommunication. À plus long terme, enfin, l'administration ciblée de médicaments permettant de réduire les doses et les effets secondaires, les revêtements anticorrosion, des outils de coupe plus solides, l'électronique à polymères, l'affichage électronique sur panneau plat, les greffes médicales et les greffes d'organes (rétiniennes notamment) avec une plus longue durée de vie. Pour sa part, Israël, dans les domaines les plus divers, a déjà amorcé sa révolution nanotechnologique. Malgré sa petite taille et les sévères contraintes de sécurité auxquelles il est astreint, Israël est un centre mondial reconnu de technologies multidisciplinaires. Le pays s'est doté de fortes capacités de recherche, d'une infrastructure technologique de qualité, d'une industrie de pointe très novatrice et d'importantes ressources humaines. La nanotechnologie est en passe de devenir un moteur de puissance nationale, d'excellence académique et de croissance économique pour notre État. Des domaines de recherche prioritaires ont été définis : nanomatériaux, nanobiologie, nanoélectronique, énergie, environnement et dessalement des eaux de mer.
L'INI
En 2002, un comité national professionnel de nanotechnologie en Israël a vivement recommandé le lancement d'une initiative tripartite gouvernement/universités/industrie afin de permettre au pays d'atteindre de manière efficace un haut niveau en la matière. Ainsi est né l’INI (2). Un programme d'investissements a été esquissé. Il devrait mobiliser des centaines de millions de dollars dans un bref délai. La mise en œuvre de ce grand projet a été confiée à un comité de direction (3). L'objectif de l'INI est de multiplier les ressources disponibles par trois, ce qui permettra une multiplication par dix de la capacité israélienne en nanotechnologie dans les cinq ans à venir.
Des exemples
Mais, dès à présent, les exemples ne manquent pas. Ainsi, les disques durs de nombre d'ordinateurs que nous fabriquons sont composés de couches magnétiques à nanostructure. La nanotechnologie est omniprésente dans les lasers, les modulateurs et les amplificateurs que nous réalisons. Israël produit des piles électriques nanotechnologiques à superpuissance, du verre non rayable car revêtu de nanoparticules, des outils nano dont la résistance au choc et à l'effort est dix fois supérieure à la norme. Nous essayons de dessaler l'eau de mer dans de meilleures conditions tout en réalisant des économies substantielles grâce à des membranes issues de la nanotechnologie, et nos billets de banque sont quasiment inimitables grâce aux procédés antifraudes issus du même savoir.
L'argent, qui représente l'accumulation du passé, perdra toujours de sa valeur. La science, qui représente le potentiel de l'avenir, augmentera toujours, elle, sa valeur.
La recherche médicale n'est pas en reste dans ce panorama. Les chirurgiens israéliens savent désormais déceler les tumeurs sans faire appel à leur scalpel.
Pour cela, ils introduisent dans le corps de leurs patients des nanoparticules magnétiques. Bientôt, quand cela se révélera nécessaire, ils pourront traiter les malades en leur inoculant, par des procédés nano, des quantités infimes mais suffisantes de médicaments. D'une manière plus générale, d'ailleurs, nous utilisons en Israël des appareils de diagnostic miniaturisés, appelés « labos sur puce ». Un exemple encore, paramédical mais un peu plus grand public : une crème protectrice pour la peau dont les nanoparticules sont à même d'absorber la gamme ultraviolette.
Il s'agit là du développement le plus sensationnel de notre époque. Un développement dont Israël, une fois la paix instaurée dans la région, est prêt à faire bénéficier tous ses voisins, les Palestiniens en premier lieu.
2. INI, Israelian Initiative in Nanotechnology, Initiative israélienne en technologie.
3. Ses membres sont actuellement le docteur Dan Maydan, président d'Applied Materials Inc., Yehuda Bronicki, de la société Ormat, le docteur Moshe Goldberg, du département de la recherche au ministère de la Défense, le professeur Yossef Imry, de l'Institut Weizmann, le professeur Joshua Jortner, de l'université de Tel-Aviv, et Israel Makov, des laboratoires pharmaceutiques Teva. Un comité consultatif d'experts devrait bientôt compléter cette haute assemblée. (Note de 2003).
Jean-Pierre Allali
Photo : D.R.