Extraits.
S'exprimant devant les députés lors d'un débat sur la situation au Proche-Orient, qui ouvrait la session extraordinaire du Parlement, le Premier ministre a rappelé que « cet été, la violence et le deuil ont une nouvelle fois frappé le Proche-Orient. Nos compatriotes ont été profondément touchés par la souffrance du peuple libanais, qui a connu tant de déchirements et de guerres. Devant les images du Liban dévasté par les bombardements israéliens, devant la peur et à la colère légitime des habitants de Haïfa frappés par les tirs de roquette du Hezbollah, nous avons tous éprouvé un même sentiment de révolte. »
Dans cette nouvelle crise qui a secoué le Proche-Orient, la France, sous la conduite du Président de la République, a pris toutes ses responsabilités » a poursuivi le Premier ministre. Le Chef du Gouvernement a rappelé la solidarité de la France au Liban et la participation à la mise en œuvre de la résolution 1701, adoptée le 14 août dernier. L’objectif est de parvenir à une solution durable, garantissant la souveraineté du Liban et la sécurité d’Israël. Le Premier ministre a rappelé que « 11 000 Français ainsi que 2 500 autres ressortissants ont été évacués. Pour répondre à l’urgence humanitaire, la France a en outre apporté 20 millions d’euros de vivres, de médicaments et d’équipements sanitaires. » Le Premier ministre a expliqué ensuite que « des garanties relatives à l’efficacité de la mission confiée à la FINUL renforcée et à la sécurité des soldats français ont été obtenues. 2 000 soldats français serviront sous casque bleu au Liban, sur les 7 300 militaires européens déployés. Le commandement sera assuré par la France jusqu’en février 2007. » Le Premier ministre a affirmé ensuite qu’une « contribution de plus de 40 millions d’euros sera allouée à la reconstruction. Outre la conférence internationale de reconstruction qui se tiendra prochainement, une mission interministérielle d’évaluation se rend le 7 septembre à Beyrouth. » Il s’agit pour la France de « se donner les moyens de jouer un rôle toujours plus important sur la scène internationale » et pour l’Union européenne de devenir « un acteur de premier plan au service de la paix », a conclu Dominique de Villepin.
M. de Villepin a estimé qu'au Liban « le conflit pouvait reprendre à tout moment (...). Or, nous ne pouvons accepter que ce pays serve une nouvelle fois de champ de bataille aux guerres des autres», a-t-il dit.
Dominique de Villepin a également salué la levée du blocus aérien et maritime imposé par Israël au Liban en application de la résolution 1701 des Nations unies. « Concernant cette dernière résolution, je salue la levée du blocus annoncée hier par Israël et qui devait prendre effet cet après-midi », a déclaré le Premier ministre français en ouvrant le débat organisé à l'Assemblée nationale sur le Liban. M. de Villepin a également appelé à la « libération des soldats israéliens enlevés » par le Hezbollah, au « respect de l'embargo sur les armes, au désarmement des milices et au règlement de la question des fermes de Chebaa ». D’autre part, il a lancé un appel à l'Iran et à la Syrie, principaux soutiens du mouvement chiite libanais du Hezbollah, en soulignant qu'il fallait « désormais placer les différents acteurs régionaux devant leurs responsabilités».
Sur l’Iran :
Sur l’Iran, le Premier ministre a déclaré qu'il revenait « maintenant à l'Iran de prendre toutes ses responsabilités». La communauté internationale, qui soupçonne Téhéran de vouloir l'arme atomique, privilégie toujours la voie du dialogue», a-t-il souligné. « La France est ouverte au dialogue avec l'Iran pour autant que ce dialogue soit sincère et concret », a complété le ministre des Affaires étrangères Philippe Douste-Blazy en conclusion du même débat.
Le ministre a expliqué qu’aujourd’hui, « nous sommes dans une phase de consultation », a-t-il expliqué, mentionnant la réunion prévue ce jeudi à Berlin des directeurs politiques des ministères des Affaires étrangères des six pays (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies plus l'Allemagne). « L'objectif est d'amener l'Iran à se conformer aux demandes de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et du Conseil de sécurité », a dit M. Douste-Blazy, rappelant que l'adoption de sanctions contre Téhéran supposait une nouvelle résolution du Conseil de sécurité. « Le risque majeur pour nous aujourd'hui, c'est la division de la communauté internationale », a conclu M. Douste-Blazy. « Si chacun fait preuve de sens des responsabilités, nous pourrons trouver des solutions pour sortir de l'impasse actuelle. »
Le débat à l’Assemblée nationale :
Ensuite intervinrent dans l'ordre suivant et chacun pendant vingt minutes: François Bayrou, président de l'UDF, Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, Bernard Accoyer, président du groupe UMP, et Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste. Leur succédèrent ensuite à la tribune pour une durée chacun de dix minutes Edouard Balladur (UMP), président de la commission des Affaires étrangères, et Guy Teissier (UMP), président de la commission de la Défense.
Pour l’UDF :
François Bayrou a comparé le défi lancé par l’Iran à la communauté internationale à celui lancé par l’Allemagne nazie en 1938 :
Au nom de l'UDF, François Bayrou s'est interrogé sur le mandat de la FINUL, qui risque d'être impuissante face au réarmement éventuel du Hezbollah. L’UDF a apprécié que le président de la République « exprime très clairement, le 14 juillet, la responsabilité du Hezbollah dans l’explosion du conflit. Tirs de missiles à Safed, à Nahariya. Enlèvement de deux soldats, après l’enlèvement d’un premier soldat franco-israélien près de Gaza. Cette ligne était claire et juste. »
Le président de l'UDF s'est surtout alarmé du danger incarné par l'Iran pour l'ordre mondial de par son appel à la destruction d'Israël et sa décision supposée d'acquérir l'arme nucléaire : « Quand le Président iranien déclare en juillet : « le problème fondamental du monde musulman est l’existence du régime sioniste qui doit être éliminé ». Quand il déclare en octobre dernier : « comme l’a dit l’imam Khomeiny, Israël doit être rayé de la carte… La nation musulmane ne permettra pas à son ennemi historique de vivre en son cœur même. », ce qu’il dit ne peut être ignoré, et ne peut pas ne pas être mis en rapport avec la question du contrôle de l’arme nucléaire. » « Les démocraties ne peuvent pas accepter la prolifération nucléaire dans un pays qui affirme haut et fort qu'il faut en détruire un autre », a lancé le leader centriste. M. Bayrou a alors comparé le défi lancé par l'Iran à la communauté internationale à celui lancé par l'Allemagne nazie au moment de la conférence de Munich en septembre 1938.
François Bayrou a demandé au gouvernement de se montrer plus ferme vis-à-vis de l'Iran : « que le ministre français des Affaires étrangères se rende à l’ambassade d’Iran à Beyrouth et délivre de surcroît un brevet de respectabilité en désignant l’Iran comme « une puissance stabilisatrice dans la région » nous a paru un risque que la France n’aurait pas dû prendre. »
Comment le quotidien libanais L’Orient le jour commente dans son édition du 8 septembre les propos de François Bayrou ?
« Seule ombre au tableau, le discours de M. François Bayrou (UDF) qui s’est longuement attardé sur les malheurs subis par le peuple... juif et qui ont culminé, selon lui, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Le chef de l’UDF avait rapidement « glissé » sur la question libanaise avant de revenir sur des thèmes soulignant « la responsabilité » et « la culpabilité » de la France et de l’Europe qui ont « laissé faire et commis l’irréparable » écrit L’Orient le jour.
Pour le PCF :
Au nom du PCF, Marie-George Buffet appelle à faire intervenir dans le dialogue autour de la reconstruction du Liban toutes les parties en conflit dans la région, Iran et Syrie compris :
Au nom des députés communistes, Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, s’est félicitée de l’intervention diplomatique de la France et de la place qu’elle a prise au sein de la FINUL. Citant les rapports d’Amnesty International qualifiant les bombardements israéliens au Liban de crimes de guerre, la dirigeante communiste a encore dit : « Au Liban, des milliers de civils restent sous la menace de bombes à sous-munitions non explosées. C’est à toutes ces victimes que vont nos pensées. C’est pour elles que la communauté internationale doit se mobiliser. L’autre drame de l’été fut la tolérance à l’égard de cette guerre. L’action diplomatique aurait pu déboucher plus rapidement sur un cessez-le-feu, comme ce fut le cas il y a dix ans lors d’une précédente crise. » Elle l’a appelée à peser toujours plus dans un dialogue nécessaire « quitte à déranger », pour « tarir les sources de tous les conflits » et régler la question palestinienne. « Le silence actuel de la communauté internationale sur ce drame est insupportable » a-t-elle souligné. Elle a également appelé à faire intervenir dans le dialogue autour de la reconstruction du Liban toutes les parties en conflit dans la région, Iran et Syrie compris, tout en précisant que le Liban doit redevenir un pays souverain.
Pour le PS :
Jean-Marc Ayrault (PS) : « La France a « bien agi au Liban » :
Une position également soutenue par le président du groupe PS Jean-Marc Ayrault, selon qui « on ne peut pas faire la paix qu’avec ses seuls amis. »
Jean-Marc Ayrault a reconnu que la France avait « bien agi au Liban ». Mais il a lui aussi déploré le « grand flou » de la résolution 1701 sur le désarmement du Hezbollah et regretté que la France « n'ait pas su coordonner ses efforts avec ses partenaires européens ».
L'orateur socialiste a aussi dénoncé les « contradictions » de la diplomatie française vis-à-vis de l'Iran et de la Syrie. Alors que Jacques Chirac « refuse tout contact » avec Damas, le ministre des Affaires étrangères Philippe Douste-Blazy « a été jusqu'à louer le rôle stabilisateur que pourrait jouer l'Iran au Proche-Orient », a-t-il remarqué.
Pour l’UMP :
Bernard Accoyer (UMP) : la polémique sur les « atermoiements » de la France au Liban :
Paradoxalement, Bernard Accoyer (UMP) a été le seul à écorner le climat consensuel ambiant en déplorant que « certains présidentiables de l'opposition plus enclins à constituer prématurément des états-majors électoraux qu'à écouter les conseils avisés des états-majors militaires » aient relayé par des « propos à l'emporte-pièce » la polémique sur les « atermoiements » de la France au Liban.
Marc Knobel