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Mohamed Latrèche est le fils d’un imam algérien installé à Strasbourg au début des années 60. Il a appris le français chez les prêtres. A 30 ans, il part pour la Syrie, où il se forme à la théologie et à la langue arabe. En avril 1997, de retour en France, avec l'approbation du président de la fédération d'Alsace Lorraine des Français musulmans, Enacer Latrèche fonde le PMF pour « libérer les musulmans de l’influence du Parti socialiste » qu’il qualifie de parti « sionisé » et de la droite, pour laquelle il avoue cependant une grande tendresse « en raison de l’hostilité de De Gaulle et de Chirac à Israël », selon un article publié dans le magazine de Marrakech en ligne, www.emarrakech.info.
Son objectif ? « Accompagner la mutation de 7 millions de musulmans qui vivent en France et qui ont renoncé à leur retour dans leur pays d’origine. » Il faut pour cela redéfinir la laïcité, qu’il juge « trop proche de l’athéisme, alors qu’elle doit être la garantie de l’expression des convictions. »
Son groupuscule est issu de ce que l'on peut appeler les milieux franco-algériens : Français musulmans, Français d'origine algérienne, Algériens. À Strasbourg cependant, c'est une sensibilité minoritaire parmi les sensibilités musulmanes.
Latrèche se distingue néanmoins dans la foulée de la création du PMF, en présentant à Schiltigheim, en Alsace, sa candidature aux élections législatives. Résultat : 0,92 des suffrages. La même année, le PMF obtenait 0,65% aux élections législatives.
Depuis, il fait régulièrement parler de lui au niveau local, rappelle Libération (3 janvier 2004) et les élus et la Police lui reproche d’aller « chauffer » les jeunes des cités.
L’antisionisme et l’antisémitisme de Latrèche :
Les voyages fréquents de Latrèche au Liban et en syrie (il était encore tout récemment, en décembre 2003 dans ces deux pays, selon une information transmise par le Journal du Dimanche, du 28 décembre 2003) font dire qu’il serait très proche du tout puissant général Mustapha Tlass, l’actuel ministre syrien de la Défense, qui est connu pour ses positions antisémitismes. Il n’est pas rare par ailleurs qu’il soit interviewé par les télévisions libanaises et syriennes notamment et qu’il participe à toutes sortes de programmes et de conférences dans ces deux pays.
La prose antisioniste du Parti Musulman de France est complaisamment étalée sur les documents du PMF. Et cette citation extraite du site Internet du PMF révèle tout particulièrement la haine que vaut Israël : « Si le PMF est combattu c’est parce qu’il ose dénoncer cette abominable idéologie qu’est le sionisme… Seul l’idéologie sioniste, initié par Herzl, a permis l’usurpation de la Palestine et les génocides envers les Palestiniens, tout comme le nazisme avait inspiré Hitler. Combattre et faire disparaître cette idéologie, c’est rétablir le droit et la vérité… » (In www.pmfnet.org/index2.html page 10) (1). La thèse du complot juif est permanente. Les Sionistes sont présentés comme des tueurs d’Arabes, des tueurs d’enfants.
À l'automne de l’année 2000, le fondateur du PMF réunit plus de 2500 manifestants contre Israël. Au cours de la manifestation, sont entendus des slogans antisémites, comme le rapporte le quotidien Le Monde du 7 novembre 2000. Immédiatement, le maire de la ville, Catherine Trautmann dénonce publiquement cette manifestation. La LICRA avait porté plainte contre le PMF en 2000 « pour incitation à la haine raciale ». D’autres rassemblements et manifestations sont organisés par le PMF. Mais les défilés sont « presque partout émaillés de dérapages antisémites, tout cela sous couvert d’antisionisme », témoigne le porte-parole local de la LCR, interrogé par le Journal du Dimanche (28 décembre 2003).
A l'automne 2001, Mohamed Latreche organise une manifestation contre l'intervention américaine en Afghanistan. La manifestation réunit à peine 200 personnes. Mais dans son discours, M Latrèche proclame : « Nous sommes tous des Afghans » et d’autres injures sont entendus.
En 2002, le PMF (accompagné de La Pierre et l’olivier, association propalestinienne radicale, présidée par Ginette Skandrani), publie un opuscule de 64 pages. Cet opuscule intitulé Le Manifeste judéo-nazi d’Ariel Sharon est en réalité un faux grossier, une « vraie-fausse interview » d’Ariel Sharon. Ce texte violemment antisémite, s’en prend au premier ministre israélien, qualifié de « nazi », et accusé des pires crimes contre l’Humanité.
Ce manifeste circulait préalablement sur Internet, et un personnage ambiguë est à l’origine de sa publication : Mondher Sfar. Sfar qui entretient de bonnes relations avec Mohamed Latrèche avait publié en 1990, trois articles négationnistes dans la Revue d’histoire révisionniste. Il se livrait à une dénonciation forcenée du « mythe des chambres à gaz. » Selon Le Monde de 17 novembre 2002, le Manifeste judéo-nazi s’ajoute à la longue liste de pamphlets contre les Juifs, comparable au tristement célèbre Protocole des Sages de Sion. La collaboration de ces différents milieux franchit une nouvelle étape le 26 octobre 2002 à Paris, avec la tenue d'une réunion dont l'objet principal était de démontrer que le président américain, Georges W. Bush, menait une politique de conquête du monde dictée par « les organisations juives américaines, l'Etat d'Israël et Ariel Sharon ». A la tribune Mohamed Latrèche était flanqué de Serge Thion.
En avril 2002, le journal islamiste At-Tajdid, publié au Maroc, donnait la parole à l’ex-chercheur Serge Thion révoqué du CNRS pour sa « remise en cause de l’existence des crimes commis contre l’humanité ». Dans un article intitulé « Les saboteurs sionistes sont démasqués », Serge Thion remerciait le service d’ordre du PMF qui avait protégé les distributeurs de La Vieille Taupe (officine de propagande négationniste) lors d’une manifestation en Palestine.
Le voyage en Irak :
Début 2003, le Parti des Musulmans de France (PMF) prépare un voyage de onze jours en Irak qui a lieu du 22 février au 4 mars 2003 (Voir notamment Frank Viart, Dernières nouvelles d’Alsace, 7 février 2003). Mais dans le groupe, on reconnaissait un dirigeant de Nation, un groupuscule belge d’extrême droite.
Avant même ce périple hautement politique, deux informations suffisent à comprendre le sens de ce voyage : l'hébergement et le déplacement sur le territoire irakien seront pris en charge par l'Irak et l'ambassade de Syrie en France délivrera un visa collectif à titre gratuit.
L'aller-retour pour Bagdad eut pour objectif de « manifester la solidarité » du PMF à l'égard du régime de Saddam Hussein. Une opération « boucliers humains » fut même envisagée : « Il pensait emmener tout au plus une dizaine de personnes. Finalement, Mohammed Ennacer Latrèche, le président du Parti des Musulmans de France (PMF) est parti pour l'Irak avec un nombre inespéré de boucliers humains potentiels. Le voyage de solidarité, qu'il a organisé avec l'aide de l'ambassade de Syrie et des autorités irakiennes, a suscité un nombre inespéré de candidatures. Trente-deux personnes ont décollé pour Damas avant de rejoindre la capitale irakienne en bus. Six, parties dimanche dernier, sont déjà à Bagdad. Et le principe d'un deuxième voyage, début mars, est d'ores et déjà acquis. Histoire de permettre à tous ceux qui en ont exprimé le souhait de manifester sur place leur refus de la guerre ». (Odile Weiss, DNA, 21 février 2003)
La manifestation du 17 janvier
Pour conclure, nous ferons référence à l’article de Libération du 3 janvier 2004. On apprend notamment qu’à l’origine de l’appel à manifester le 17 janvier, se trouve le très controversé PMF et Latrèche, un « antisémite notoire. »
Marc Knobel
Note :
1. Le site Internet de Proche-Orient Info a largement fait état de quelques unes des tirades violentes, antisionismes et antisémites, du PMF et plusieurs remarquables articles de ce site parlent des activités du PMF et rendent compte de sa dangerosité : voir notamment l’édition Proche-Orient. Info des 13 mai 2002, et plusieurs enquêtes qui ont été réalisées sur ce sujet.