Tribune
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Publié le 16 Décembre 2010

Le retour des réfugiés palestiniens selon Saeb Erekat, par Marc Knobel

Dans l’interview accordée récemment au quotidien britannique « The Guardian », Saeb Erekat, responsable de l’équipe des négociateurs palestiniens affirme « qu’il y a aujourd’hui plus de sept millions de réfugiés palestiniens dans le monde, qu’il faut qu’ils puissent réintégrer les villes et villages d’où ils sont originaires et en plus leur verser des indemnités ». Il ajoute « que dans tout accord de paix avec Israël, ces réfugiés doivent pouvoir se réinstaller en Israël ».



Au moins, cette déclaration a le mérite de la franchise.
Les exigences palestiniennes sont exprimées ici avec brutalité et sans détour. Et elles interviennent après que les Palestiniens aient menacé de déclarer unilatéralement leur propre État, et dans un certain nombre d’occasions, après qu’ils aient menacé Israël de violence.



Alors que le gouvernement israélien actuel a accepté le principe de deux Etats pour deux peuples, la position palestinienne au cours de ces dix-sept dernières années a-t-elle bougé en ce qui concerne leurs exigences maximalistes ?



Prenons quelques exemples :



Les Palestiniens sont-ils prêts à reconnaître Israël en tant qu’Etat juif ? Non.



Les Palestiniens sont-ils prêts à reconnaître qu’il y a des réfugiés juifs chassés des pays arabes ? Non.



Les Palestiniens sont-ils prêts à reconnaître qu’Israël a des préoccupations de sécurité bien réelles ? Pas forcément.



Or, la question des réfugiés palestiniens est certainement un des dossiers les plus sensibles dans le processus de paix. De fait, cette exigence palestinienne sur les réfugiés est totalement inacceptable pour les Israéliens car elle équivaudrait à la disparition programmée, pure et simple de l’Etat Juif. Cela, Saeb Erekat le sait très bien et il connaît la position des israéliens à ce sujet.



Résumons.



Dans les années 90, les israéliens ont expliqué les motifs qui ont amené Israël à refuser de reconnaître la question des réfugiés palestiniens. Selon Israël, cette question a été créée par les Etats arabes et n'est pas le résultat d'une politique d'expulsion menée par l'armée israélienne. Tout au plus leur situation de réfugiés peut être la conséquence de faits de guerres et non d'une volonté d'expulsion. De plus, Israël estime que le chiffre avancé par les Etats arabes est surestimé, et que le nombre de réfugiés palestiniens en 1948 était compris entre 540 000 et 720 000 personnes. Ce qui correspond à peu près au nombre de Juifs qui viennent des pays arabes et se sont installés en Israël. Depuis, les gouvernements israéliens successifs ont évité de mettre à l'ordre du jour la question des réfugiés. L'axe majeur retenu par Israël est sa volonté de voir les réfugiés palestiniens s'installer dans leur (futur) pays d'accueil grâce à l'aide international ou à des compensations. Le paiement de compensations étant négociable à un niveau collectif et non individuel. Par ailleurs, les Israéliens insistent sur le fait que les parties doivent négocier le sort de l'ensemble des réfugiés de la région, donc des Kurdes, des Arméniens, ainsi que des Juifs émigrés des pays arabes, qu’Israël considère comme étant des réfugiés. En définitive, Israël estime que les réfugiés Palestiniens appartiennent à leur propre état et n’ont pas un droit de retour en Israël.



Seulement voilà, comme le monde (entier) a porté toute son attention sur la construction des implantations, les palestiniens prétendent que le processus engagé par les Américains restera bloqué tant qu’Israël ne cessera pas de construire dans les localités de Judée-Samarie et dans certains quartiers de Jérusalem. Ils rejettent ainsi la responsabilité de l’échec des pourparlers de paix sur Israël. Et comme le monde (entier) est focalisé exclusivement sur la question des implantations, le monde (entier) feint d’ignorer que les exigences et les revendications maximalistes des palestiniens vont aussi à l’encontre de la paix.



Photo : D.R.