Jusqu'à cette manifestation, ce 15ème anniversaire de l'assassinat du premier ministre israélien par Ygal Amir, n'avait pas fait l'objet de beaucoup d'intérêt ou donné lieu à de grands événements en France. En Israël même, des députés travaillistes étaient allés jusqu'à s'interroger sur la légitimité d'une telle commémoration…
Mais les organisateurs ont considéré que, dans un contexte troublé, avec un processus de paix cahotant, des campagnes de boycott et de délégitimation d'Israël, réunir autour de la mémoire d'Itzhak Rabin, assassiné au sortir d'une manifestation pour la Paix, des femmes et des hommes de toutes confessions et de différentes idéologies, revêtait d'autant plus d'importance aujourd'hui. Ils ont donc tenu à donner une solennité particulière à l'événement.
Le public parisien fidèle à cette commémoration l'a sans doute compris et a fait salle comble : "d'année en année, une assistance de plus en plus nombreuse", comme l'a souligné Bernard Zilberg, président de la Maison Itzhak Rabin.
Frédérique Calandra, maire du 20ème, ne s'est pas contentée du discours protocolaire de circonstance. Elle a réaffirmé son soutien au processus de paix et dit son émotion, en rappelant qu'à quelques centaines de mètres de sa Mairie dans un square du 20ème, lors du premier anniversaire de la mort d'Itzhak Rabin, avait été planté, un arbre à sa mémoire.
Au nom de Bertrand Delanoé, Pierre Schapira, adjoint au maire de Paris chargé des relations internationales, depuis toujours très présent dans les manifestations de la Maison Itzhak Rabin a rappelé l'attachement de l'équipe municipale au souvenir d'Itzhak Rabin, dont l'un des jardins de Bercy porte le nom. Il eut le privilège d'être aux côtés des principaux dirigeants du monde, lors des obsèques d'I. Rabin et mit l'accent sur "le discours le plus bouleversant, celui du roi Hussein de Jordanie."
Samy Ravel, Ministre plénipotentiaire près l'Ambassade Israël marquait par sa présence à cette soirée le soutien de l'Etat d'Israël. Il remercia chaleureusement le public français de sa fidélité à I. Rabin et signala qu'à ses côtés se trouvait "l'ambassadeur désigné" qui par respect du protocole, puisqu'il n'avait pas encore présenté ses lettres de créances, n'a pas pris la parole.
Richard Prasquier, président du CRIF, représentait aussi les différentes organisations juives, parties prenantes dans l'organisation de la cérémonie, lui conférant ainsi un caractère représentatif, pluraliste et unitaire. Il rappela l'instant historique, le 13 septembre 1993 sur la pelouse de la Maison Blanche à Washington, de la poignée de mains, entre Rabin et Arafat, "la longue hésitation de Rabin", malgré les encouragements de Bill Clinton. "Puis il finit par serrer la main de Yasser Arafat". "Il y avait quelque chose de très significatif dans cette hésitation suivie de cet acte, dit R. Prasquier. Cela traduisait le parcours d'Itshak Rabin, le soldat, qui, après les combats et les guerres, était arrivé à la conclusion de la nécessité de conclure la paix." Avant de conclure, R. Prasquier souligna qu'en 1993, les choses étaient différentes d'aujourd'hui : "Il s'agissait du conflit entre deux nationalismes. Avec le Hamas, nous sommes confrontés à l'aspect irrationnel du fanatisme religieux.
Danièle Hoffman-Rispal, députée socialiste de Paris, vice-présidente du Groupe parlementaire d'Amitié France Israël à l'Assemblée Nationale, est depuis l'instauration de cette cérémonie, l'un des piliers de la commémoration à la mémoire du Premier ministre assassiné. De retour d'une rencontre avec ses homologues israéliens du groupe parlementaire Israël France de la Knesset, elle a décrit l'immense émotion ressentie lors de la visite (avant son ouverture au public) du musée Itzhak Rabin et appelé tous ceux qui se rendent en Israël à visiter ce lieu symbolique qui aide à comprendre à travers l'histoire d'un homme, celle du sionisme et d'Israël.
Cette première partie, politique, s'acheva sur une réflexion autour du thème "l'héritage d'Itzhak Rabin et les perspectives de Paix", animée par Eric Halimi, rédacteur en chef de RFM, avec la participation de Daniel Bensimon, député travailliste à la Knesset et Frédéric Encel, politologue. De cet échange, riche et passionné, retenons la conclusion du député israélien, membre de la coalition gouvernementale conduite par le Premier ministre, Benyamin Netanyahou : "les Israéliens sont à 70% pour la paix, pour des idées de la gauche israélienne, mais font confiance à Netanyahou pour mener cette politique…" Quant à F. Encel, il revint sur l'assassinat d'I. Rabin en rappelant "que non seulement avait été commis un crime, mais également un acte illégal dans un Etat de droit et que force devait rester à la Loi de l'Etat". En miroir, il stigmatisa le Hamas, au-delà des crimes et des actes terroristes commis par l'organisation islamiste, sur "son refus de respecter les engagements signés par l'OLP, là encore, une transgression de la Loi…"
C'est par un "Concert pour la Paix" que s'acheva cette soirée avec la magie du violoncelle de Sonia Wieder Atherton et de la voix de Rosemary Standley.
Photo : D.R.